Carte blanche

Déchets : “La montagne d’emballages à gérer est le fruit de choix mercantiles et délibérés”

Si les industriels ne veulent pas de la consigne, c’est tout simplement pour protéger leurs intérêts et c’est assez compréhensible. Une opinion de Régine Florent, auteure d’une pétition au parlement wallon en faveur de la consigne sur les canettes et les bouteilles en plastique.

Tout le monde s’accorde pour dire que la situation des déchets sauvages est inacceptable mais ni l’industrie, ni la COPIDEC (1), ni la CIE (2) ne proposent de vraie solution.

Si ce n’est “the click“, qui est un gadget compliqué et peu convaincant, une (très pâle) caricature de la consigne.

Si ce n’est le travail des “pigeons ramasseurs”, des ouvriers communaux et régionaux payés par les citoyens.

Et pendant ce temps-là, l’industrie met toujours plus d’emballages (déchets potentiels) sur le marché. On ne fait pas de “statu quo” … la situation empire de jour en jour et on s’aperçoit que ça n’inquiète pas du tout l’industrie qui “se doit de fournir des tonnages de déchets” aux usines de recyclage.

Vouloir à tout prix assurer un volume d’emballages à récolter, trier, recycler est en soi assez malsain … !

De plus, on peut se poser la question de savoir si ce qui est récolté est vraiment recyclé ? N’est-ce pas une illusion comme se le demandait récemment Cash investigation ? (3)

La promesse de recyclage n’est-elle pas une manière de rassurer le consommateur ? Tout va bien, rendormez-vous et continuez à consommer !

Toujours plus d’emballages sophistiqués et plus difficiles à recycler, toujours plus de mauvais choix motivés par le marketing. Fruits pelés, pré-découpés et autres inepties.

Toujours plus de canettes, même de très petites canettes, toujours moins de bouteilles en verre consignées.

On voit clairement que l’industrie veut aller encore plus loin dans la voie du jetable gratuit qui est vendeur, qui est la solution idéale puisqu’elle lui permet de se “dédouaner” des conséquences liées au sort des emballages jetables gratuits.

Une fois vendus, ce n’est plus leur problème.

Qu’ils soient jetés dans les sacs bleus, dans les poubelles publiques ou dans la nature, les emballages-déchets ont un coût environnemental et financier que nous supportons tous et dont l’industrie se décharge.

Sacs bleus – (collecte et traitement supportés in fine par le consommateur) ; production d’une quantité minime (quelle quantité ?) de produits recyclés, d’une quantité de produits “décyclés” (4), de grandes quantités de produits “valorisés” (incinérés ) et de quantités de produits enfouis.

Déchets :
© Jean luc Magnée

Comment les empêcher de mettre toujours plus de déchets sur le marché si cela ne leur coûte rien ?

Les industriels ne veulent évidemment pas de la consigne puisque la situation actuelle est optimale pour eux. On ne change pas une équipe qui gagne …

Les coûts liés à la consigne, qu’ils considèrent comme inacceptables, sont tout simplement un retour à une situation normale où les producteurs sont responsabilisés.

Pourtant, les coûts liés à la consigne, qu’ils considèrent comme inacceptables, sont tout simplement un retour à une situation normale où les producteurs sont responsabilisés.

Il y a 30 ans, ils géraient et assumaient la consigne de toutes les bouteilles (bières, limonades, eaux, lait …) de A à Z et il n’y avait (presque) pas de déchets sauvages. La situation actuelle (déchets sauvages, montagnes d’emballages à gérer) est le fruit de leurs choix mercantiles et délibérés mais ils refusent le changement puisque tout roule pour eux !

Et pourtant, d’un point de vue environnemental, le changement est indispensable et les industriels en sont sans doute bien conscients.

Malgré toutes leurs “gesticulations”, les effets bénéfiques de ce système ne doivent pas leur échapper.

Les industriels ne peuvent pas ignorer que la consigne fonctionne très bien dans de nombreux pays et a déjà modifié la donne chez nos voisins hollandais.

Ils continuent à utiliser différents arguments désespérés tels que le mythe des sacs bleus déchirés pour récupérer de potentielles canettes consignées … mais l’expression de cette crainte est en fait, la preuve qu’ils ont bien compris que le stimulant financier est un moteur universel, quel que soit le niveau d’éducation et que la consigne EST un outil performant.

S’il ne veulent pas de la consigne, c’est tout simplement pour protéger leurs intérêts et c’est assez compréhensible en fait …

C’est ici que le politique doit intervenir.

On peut comparer l’industrie à un enfant gâté qu’il faut “cadrer”, sinon il fait n’importe quoi.

Il faut leur fixer des règles et des limites et seuls les gouvernements peuvent le faire. Nous, consommateurs, sommes impuissants, nous sommes noyés dans une foule d’autres consommateurs qui se sont laissés piéger par le marketing affuté de l’industrie et la voie de la facilité.

A titre individuel, nous ne pouvons rien faire que satisfaire notre bonne conscience en tentant modestement d’aller à contre-courant.

Nous ne pouvons pas être de vrais acteurs du changement, mais le monde politique a ce pouvoir !

Régine Florent, citoyenne auteure d’une pétition au parlement wallon en faveur de la consigne.

Références

(1) COPIDEC = Conférence permanente des intercommunales wallonnes de gestion des déchets.

(2) CIE (Commission interrégionale de l’emballage)

(3) https://www.france.tv/france-2/cash-investigation/2874175-dechets-la-grande-illusion.html

(4) Décyclé : le décyclage (en anglais, downcycling) est un procédé par lequel on transforme un déchet en un nouveau matériau de qualité ou de valeur moindre

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