Ce qu’implique vraiment le lancement d’Amazon en Belgique
D’ici quelques mois, la firme de Jeff Bezos déclinera sa plateforme de vente en ligne sur le marché belge. Une arrivée que l’on n’attendait plus vraiment puisque clients et commerçants du plat pays sont évidemment déjà actifs sur Amazon, mais qui répond à une logique stratégique.
Le géant mondial de l’e-commerce a enfin jeté son dévolu sur notre marché. La firme de Jeff Bezos prévoit en effet le lancement d’une version belge de sa plateforme: amazon.com.be. L’annonce est tombée discrètement au début du mois d’août au travers d’un communiqué de presse, mais aussi d’une communication auprès des commerçants. L’information a de quoi surprendre puisque depuis des années, les Belges, tant clients que vendeurs, peuvent commander sur Amazon ou utiliser la plateforme pour développer leur propre business. La création d’une version belge du plus grand site d’e-commerce change-t-elle quelque chose? Pourquoi ce membre éminent des Gafam décide-t-il de faire du plat pays le 21e à disposer d’une plateforme spécifique? Réponse et analyse en quatre points.
La firme se rend probablement compte que sur le marché du Benelux, Bol prend des parts de marché qui deviennent significatives.”
Damien Jacob, fondateur du cabinet Retis
1. Amazon n’était-il pas déjà en Belgique?
Si les Belges utilisent déjà massivement le site du géant du net, c’est au travers des plateformes des pays voisins. Depuis 2003, les francophones peuvent commander sur Amazon.fr et les néerlandophones ont commencé à acheter via le “.de” avant de pouvoir, depuis 2016, faire leurs emplettes sur la version néerlandaise. Par ailleurs, le site d’e-commerce a multiplié les partenariats avec des transporteurs dans notre pays depuis des années. Mais le tout piloté à distance, sans réelle présence physique. En Belgique, Amazon ne compte en effet d’entité juridique que pour ses activité d’espaces cloud et services data qu’il vend aux entreprises. Une centaine de personnes travailleraient chez nous au travers de diverses structures belges liées à ce secteur spécifique.
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2. Qu’est-ce que cela change?
Ce qu’annonce désormais la firme d’e-commerce, c’est
: une version bilingue, offrant des produits qui seront tous disponibles et livrables chez nous, et à laquelle seront probablement intégrés des moyens de payements locaux. Une manière, selon l’entreprise, d’améliorer l’expérience utilisateur de ceux qui doivent encore passer par une version étrangère et ne peuvent pas se faire toujours tout livrer. Aujourd’hui, la firme est donc en mode séduction des commerçants. L’idée est de pousser les vendeurs habituels présents sur Amazon à ajouter la Belgique à leur zone de chalandise. Et d’en attirer de nouveaux. Objectif? Doper l’offre et la disponibilité des produits. “Avec ce lancement, les vendeurs auront psychologiquement le sentiment de couvrir un territoire de plus, décrypte Stephan Pire, fondateur du bureau d’analyse LR Physics, spécialiste de l’e-commerce. Certes, ils étaient déjà présents en Belgique, mais ils n’avaient pas vraiment beaucoup d’informations claires sur les opérations effectuées chez nous. L’arrivée d’Amazon Belgique pourrait leur permettre d’optimiser le marketing payant sur le marché national. Enfin, le focus belge d’Amazon pourrait attirer un peu plus de monde sur la plateforme et doper les ventes des commerçants. On peut espérer une augmentation de 10%, voire 20%, à terme.”
3. Pourquoi ce lancement?
Même si Amazon dispose d’une cote de popularité importante, la Belgique n’est certainement pas son marché le plus facile. Surtout au nord du pays où la concurrence est importante et où seul un Flamand sur deux aurait déjà commandé sur sa plateforme. Pour Damien Jacob, fondateur du cabinet Retis spécialisé en e-commerce, l’arrivée d’un site spécifiquement dévolu aux clients belges s’inscrit dans un contexte bien particulier: “La firme se rend probablement compte que sur le marché du Benelux, Bol prend des parts de marché qui deviennent significatives en Flandre, en même temps que cette plateforme s’attaque progressivement au marché francophone.” Sans compter Coolblue, qui se développe aussi fortement sur le marché belge. Contrer ces deux concurrents d’origine néerlandaise était déjà un des objectifs de l’offensive d’Amazon quand le géant a lancé sa plateforme “.nl”. Réagir à la croissance belge de ces acteurs fait sans doute partie de la même stratégie. En outre, pour Amazon, il s’agit de prouver qu’elle est bien la meilleure des plateformes là où certains concurrents tentent, dans leur marketing, d’imposer leur supériorité. Avec un site belge et l’amélioration de la livraison, Amazon semble vouloir reprendre l’avantage…
4. Amazon payera-t-il des impôts chez nous?
Le sujet est sensible pour l’ensemble des Gafam, qui ont fait de l’optimisation fiscale une de leurs spécialités. Aujourd’hui, Amazon ne paie pas d’impôt sur ses activités de vente en ligne en Belgique pour la bonne et simple raison que l’entreprise n’y dispose, en ce domaine, d’aucune entité. Rien d’illégal: tout passe via d’autres structures, créées dans d’autres pays européens. Et malgré son intention de lancer une version belge de son site, la firme n’établira pas pour autant une nouvelle entité juridique chez nous bien qu’elle soit en train de constituer une équipe spécifique: une country manager et de nouveaux engagements sont prévus. Mais cela ne signifie pas que l’activité d’Amazon ne profite absolument pas aux rentrées de l’Etat. Sur les produits vendus en Belgique, la TVA est effectivement toujours due…
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