Fini le cash, place à la monnaie numérique

© getty images

Les banques centrales “se hâtent lentement” vers l’émission d’une monnaie numérique.

Les pièces frappées sous le règne d’Auguste César, le premier empereur romain, portaient sa tête d’un côté et un dauphin entrelacé avec une ancre de l’autre. L’emblème maritime représentait la devise favorite de l’empereur: “festina lente” ou “hâte-toi lentement”. En bref, le moyen le plus rapide de faire quelque chose est de le faire correctement dès le début.

Cette approche semble avoir été adoptée par les banques centrales du monde entier, qui se préparent à frapper pour la première fois une monnaie numérique de banque centrale (“Central Bank Digital Currency” ou CBDC, en anglais). Actuellement, la seule monnaie émise par une banque centrale et utilisée par des personnes ordinaires est l’argent physique. Les systèmes de paiement numériques, qui sont en plein essor, reposent sur des entreprises privées, telles que les banques, les sociétés de cartes de crédit et les entreprises technologiques. A mesure que l’argent liquide tombe en désuétude, les banques centrales du monde entier commencent à se demander s’il ne faudrait pas le remplacer par une alternative numérique.

Jerome Powell a déclaré qu’il est plus important “de bien faire les choses plutôt que d’être les premiers”.

Les banquiers centraux se sont précipités pour mener l’enquête (86% des banques centrales mondiales effectuent des recherches sur les CBDC, contre deux tiers en 2018), mais aucune grande économie n’a encore franchi le pas. Seules les Bahamas, une nation des Caraïbes, et quelques-uns de ses voisins du sud (Saint- Kitts-et-Nevis, Antigua-et- Barbuda, Sainte-Lucie et Grenade) ont émis une CBDC “réelle”.

La Chine est prête

La Chine est la grande économie la plus susceptible de les rejoindre en 2022. En effet, le géant asiatique a d’abord lancé un projet pilote pour sa CBDC en décembre 2019, mais il est rapidement monté en puissance. Selon un document publié en juillet par la People’s Bank of China (PBOC), la banque centrale chinoise, près de 21 millions de portefeuilles numériques ont déjà été créés pour contenir des yuans numériques. Quelque 70 millions de transactions ont déjà été effectuées. La PBOC semble vouloir que sa monnaie numérique soit largement utilisée avant les Jeux olympiques d’hiver, qui se tiendront à Pékin en février 2022.

Les autres banques centrales agissent plus lentement. Bien qu’elle tienne la tête du peloton depuis bien longtemps, la Suède n’a lancé son projet pilote qu’en 2021. Dans un livre blanc publié postérieurement, la Riksbank, sa banque centrale, a déclaré qu’elle devait encore tester une série de caractéristiques essentielles, notamment pour savoir si une e-krona pouvait être utilisée à grande échelle pour les paiements de détail, comment l’intégrer avec les points de vente des commerces et comment développer les moyens de l’utiliser hors ligne. La Riksbank pense pouvoir lancer une CBDC d’ici cinq ans.

Une approche lente, mais constante, est compréhensible: un jeton numérique d’une banque centrale représente un changement radical du système financier d’un pays et il ne doit pas être entrepris à la légère. Il est très peu probable, par exemple, qu’un dollar numérique voie le jour en 2022. Jerome Powell, le président de la Réserve fédérale, a déclaré qu’il est plus important pour l’Amérique de “bien faire les choses plutôt que d’être les premiers”.

Un article d’Alice Fulwood, correspondante à Wall Street, The Economist.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content