Wall Street ne croit pas aux plans de déportation de Trump et aux réductions des dépenses gouvernementales de Musk
Donald Trump qui veut déporter des “millions” d’immigrés, Elon Musk qui veut réduire les dépenses gouvernementales de 2.000 milliards de dollars… les investisseurs actifs sur la bourse américaine n’y croient pas vraiment. Qu’est-ce que cela veut dire pour le marché ?
Dans sa campagne électorale, Donald Trump, le nouveau président des Etats-Unis, a promis de déporter des “millions de sans-papiers”. Ce qui serait le programme de déportation le plus important de l’histoire du pays. Mais entre promesses de campagne (soit dit en passant, inhumaines et rappelant les heures les plus sombres de l’histoire, mais qui semblent convaincre la moitié de la population américaine) et réalité de terrain, il y a souvent un monde.
Marché du travail et inflation
Mais Wall Street ne croit pas à ce que Trump va appliquer ce programme. C’est ce que montre un sondage de Goldman Sachs, repris par CNN. Les investisseurs s’attendent certes à ce que l’immigration soit quelque peu réduite ; la moitié d’entre eux s’attend à un chiffre d’entre 500.000 et un million de nouveaux arrivants par an (en termes nets, soustraction faite des départs). 20% pensent que le chiffre augmentera de plus d’un million par an, soit plus qu’avant la pandémie. Ce serait donc moins que les 1,75 million par an en moyenne de ces dernières années (avec un pic de trois millions en 2023). Mais ils ne sont que 6% à croire qu’il y aura moins d’immigrés dans le pays dans quatre ans qu’il n’y en a aujourd’hui.
C’est que les investisseurs savent que l’économie a besoin de bras. Le marché de l’emploi américain a été particulièrement tendu ces dernières années, notamment à cause d’une pénurie de main d’œuvre. Réduire encore davantage – et massivement – la population active aurait donc un effet néfaste sur les entreprises et leur production. Cela pourrait mener à une pénurie de biens et des services et une importante hausse des prix. Puis il y a aussi des aspects légaux et logistiques qui limitent le champ d’action de Trump.
L’Italie de la (post-)fasciste Giorgia Meloni (Fratelli d’Italia) en a fait le constat et est revenue sur ses projets de réduction de l’immigration, par exemple.
Musk l’efficace ?
L’autre question du sondage portait sur Elon Musk, et son programme de réductions des dépenses gouvernementales en tant que co-ministre de l’Efficacité. Le marché est plutôt sceptique aussi. 10% des investisseurs pensent que l’entité co-dirigée par Musk pourra réduire les dépenses de 400 milliards de dollars ou plus par an. 10% encore s’attendent à une réduction d’entre 200 et 400 milliards. Au contraire, 42% des investisseurs s’attendent à des baisses modestes ou insignifiantes.
Mais même 400 milliards (un chiffre qui ne convainc que la minorité la plus optimiste), ce ne serait pas un effort énorme. Sur un budget de 6.500 milliards de dollars, cela représente un peu plus de 6%. Cela ne couvrirait ni le déficit (plus de 2.000 milliards) ni même les intérêts sur la dette payés tous les ans (875 milliards de dollars, en 2023). Et surtout, c’est très loin des objectifs fixés par Musk : il vise les 2.000 milliards, a-t-il notamment expliqué durant la campagne.
Les deux revers d’une médaille
Il y a donc un côté positif et un côté négatif dans ces croyances des investisseurs. Et même si elles ne sont que des croyances, elles ont un impact sur les cours en bourse, car elles reflètent le prix que les investisseurs sont prêts à payer. Le côté positif, c’est que Trump pourrait ne pas appliquer son programme de déportations et faire crasher l’économie. Le côté négatif, c’est que Musk pourrait ne pas réussir à réduire les dépenses et la bureaucratie. Un gouvernement fortement endetté (plus de 120% du PIB), avec une dette croissante, et beaucoup de paperasses ne sont pas des bonnes perspectives pour les entreprises.
Pour l’heure, c’est plutôt l’optimisme qui est de mise, car les indices américains sont à des sommets.
Mais cela pourra-t-il durer ? A la question des mesures politiques qui les préoccupent le plus, 60% des investisseurs ont répondu la hausse des taxes d’importation. Elle devrait ainsi avoir un impact sur l’inflation (à la hausse), la croissance économique (vers un ralentissement) et les actions (volatilité, comme c’était le cas lors du dernier mandat de Trump, à chaque annonce de nouveaux droits de douane). Ces craintes, et leur impact sur les cours, pourraient s’affiner au fur et à mesure des annonces de Trump.
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