ThromboGenics et Yingli Green
N’êtes-vous pas devenu trop négatif vis-à-vis de ThromboGenics ? L’arrivée de Philippe Vlerick ne prouve-t-elle pas que l’entreprise recèle encore beaucoup de valeur ?
Nous considérons l’achat de 1,3 million d’actions ThromboGenics (3,6% du capital) par Philippe Vlerick comme une décision mûrement réfléchie. L’homme a tout de même gagné ses lettres de noblesse, et sa présentation pour un siège au conseil d’administration de ThromboGenics démontre qu’il s’agit d’un engagement à long terme. La détérioration des ventes de Jetrea – médicament contre les maladies oculaires – aux Etats-Unis, avec 1400 injections au 2e semestre contre 1800 au premier, et 7000 en 2013, associée à des prévisions modestes de 3500 à 4000 injections en 2015, nous a décidés à assortir l’action d’un conseil de vente en mars. De plus, les objectifs – chiffre d’affaires (CA) de 30 millions EUR et rentabilité aux Etats-Unis à partir de 2016, cash-flows opérationnels positifs en 2017 et CA du groupe de 100 millions en 2019 – ont été abandonnés. L’entreprise mise sur le renversement de tendance nécessaire au cours de la troisième année de commercialisation, avec une équipe commerciale réduite, plus concentrée. En outre, les résultats d’études complémentaires sur les patients doivent infléchir la perception négative des chirurgiens oculaires concernant le Jetrea. L’étude Oasis a récemment confirmé le profil de sécurité et montré, moyennant une sélection affinée des patients, une efficacité accrue comprise entre 40% et 58% (contre 26,5% dans l’étude de phase III). Entre-temps, ThromboGenics étudie, sans son partenaire Alcon, de nouvelles applications pour le Jetrea : la rétinopathie diabétique (démarrage d’une étude de phase II à l’automne) et l’occlusion veineuse rétinienne (affection vasculaire de la rétine; étude préclinique démarrée). Les économies sur les coûts ont ramené la consommation de liquidités à 5,4 millions EUR au 1er trimestre (8,3 millions EUR hors éléments exceptionnels), un bon début pour atteindre au moins l’objectif d’un cash-burn de 44 millions EUR en 2015. La baisse de la consommation de liquidités laisse en effet un peu plus de temps à l’entreprise pour redresser les ventes et investir dans la recherche sans éveiller la crainte d’une augmentation de capital. Nous relevons dès lors la note à ” conserver/attendre ” (2C). Mais un achat n’est pas à l’ordre du jour, malgré la valorisation très faible. Nous attendons pour cela le signe clair d’une amélioration substantielle des ventes aux Etats-Unis. Car malgré les recherches sur de nouvelles applications – qui pourraient effectivement apporter un surcroît de valeur à long terme -, l’évolution du cours à brève échéance sera surtout dictée par celle du CA du Jetrea et de la position de trésorerie (121,7 millions EUR le 31 mars). Nous relevons donc la note sans vouloir créer trop d’attentes. Les résultats semestriels (publication le 26) devraient donner une indication importante concernant le renversement de tendance (indispensable) dans les ventes de Jetrea.
Quelle est la raison de la forte baisse de Yingli Green Energy la semaine dernière ? Dois-je m’inquiéter ?
L’action Yingli Green a perdu plus de 40% de sa valeur après que l’entreprise a dû reconnaître dans son rapport annuel publié le 15 mai que le risque de faillite était réel. Yingli a changé d’auditeur l’an dernier, abandonnant KPMG pour s’engager avec PricewaterhouseCoopers (PWC), et ce dernier a manifestement estimé l’avertissement nécessaire. Pour couper court à toute ambiguïté, cela ne signifie pas qu’une faillite soit imminente. Mais c’était pour nous le signal d’abaisser immédiatement la note à vendre (rating 3C). Nous avions déjà abaissé une première fois la note après la présentation des résultats annuels en mars. La marge bénéficiaire brute s’est certes améliorée à 17,3% en 2014 (16,8% au dernier trimestre) contre 10,9% en 2013, mais cela s’est avéré largement insuffisant pour renouer avec la rentabilité. Une grande déception, surtout compte tenu de la forte croissance des volumes au cours des dernières années. La perte nette a baissé de 321,2 millions USD en 2013 à 209,5 millions USD, soit de 2,01 USD à 1,21 USD par action. La position nette d’endettement est en léger recul, de 2,43 milliards USD fin 2013 à 2,3 milliards USD fin 2014, mais reste élevée. En outre, le taux d’intérêt moyen atteint désormais 6,44% (contre 6,31% en 2013). Mais c’était surtout l’annonce que des options étaient à l’étude pour renforcer la position financière du groupe qui nous a incités à faire preuve d’un surcroît de prudence. Le fait que l’entreprise ne soit pas parvenue à trouver une solution avant la publication du rapport annuel laisse songeur. La capitalisation boursière s’est entre-temps réduite à 200 millions USD, et dans ces conditions, même une augmentation de capital significative ne permettra pas à l’entreprise de retrouver une position d’endettement rassurante. Désormais, reste à espérer l’arrivée de nouveaux investisseurs stratégiques. Yingli a beau être un acteur connu, la faillite de la principale division de Suntech Power en 2013 démontre que les autorités chinoises ne vont pas nécessairement sauver toutes les grandes entreprises actives dans l’énergie solaire. Nous trouvons que le risque est désormais trop élevé, d’où le récent abaissement de la note.
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