Nokia & SABMiller
Comptez-vous revoir la note de Nokia à présent que l’acquisition d’Alcatel-Lucent est entrée dans sa dernière ligne droite ?
Cette année, Nokia a de nouveau franchi deux étapes importantes dans la transformation qui doit l’amener à sortir du marché de la téléphonie mobile, dont le groupe finlandais a longtemps été le leader incontesté. La principale de ces étapes remonte à la mi-avril, lorsque Nokia a annoncé l’acquisition du groupe français Alcatel-Lucent. L’offre attribue à Alcatel-Lucent une valeur d’entreprise de 15,6 milliards EUR, contre 23,8 milliards EUR pour Nokia. Le rapport a été fixé à 0,55 action nouvelle Nokia par action Alcatel-Lucent, et les actionnaires d’Alcatal-Lucent détiendront ainsi environ un tiers du nouveau groupe. Entre-temps, toutes les approbations nécessaires à l’acquisition ont été obtenues et la transaction sera finalisée au 1er trimestre 2016. Avec cette acquisition, Nokia renforce significativement sa position d’entreprise de technologies de réseaux avec une forte présence en Europe, en Amérique du Nord, mais aussi en Chine. Elle peut maintenant investir pleinement dans les technologies et services de nouvelle génération. Simultanément, Nokia a bouclé la semaine dernière la vente pour 2,8 milliards EUR de la division Mapping et services de localisation, mieux connue sous le nom de ” Here “, à un consortium formé par Audi, BMW et Daimler. Le montant de la transaction est cependant nettement inférieur aux 4 milliards EUR espérés initialement. La troisième division, TechnologiesNokia, gère et valorise le portefeuille de brevets de Nokia. Elle sera conservée. Fin septembre, Nokia disposait d’une position de trésorerie nette de 4,14 milliards EUR, et a annoncé un nouveau plan d’optimisation de la structure capitalistique de 7 milliards EUR ; 4 milliards EUR reflueront vers les actionnaires sous la forme d’un dividende brut d’au moins 0,15 EUR par action en 2016 et 2017 (0,14 EUR cette année), d’un dividende spécial de 0,1 EUR par action en 2016 et d’un programme de rachat d’actions propres d’une valeur de 1,5 milliard EUR (4% de la capitalisation boursière consolidée actuelle) sur la période 2016-2017. Les 3 milliards EUR restants seront affectés à la réduction de la dette. Nous pensons que ces mesures vont soutenir le cours. Associées à une valorisation correcte – 20,8 fois les bénéfices attendus en 2016 et ratio valeur d’entreprise/cash-flows opérationnels attendus (EBITDA) 2016 de 8,4 -, elles justifient un relèvement de la note à ” conserver “(2B).
Pourquoi le cours de l’action SABMiller est-il si éloigné du prix offert par ABInBev ?
Il n’est pas si inhabituel que le marché applique une décote sur le prix proposé dans le cas d’une offre en cash, mais une remise d’environ 10% à ce stade du processus d’acquisition paraît quand même assez considérable. Logiquement, elle devrait plutôt s’établir autour de 5%. Elle représente le temps d’attente, mais aussi la possibilité que l’acquisition finisse par échouer. Il est évident que l’acquisition de SABMiller par ABInBev pour une valeur d’entreprise de 120 milliards USD n’est pas sans risque. A nos yeux, le principal écueil a cependant déjà été franchi. Celui-ci consistait à obtenir l’accord des actionnaires de référence de SABMiller, Altria avec 26,56% et Bevco (la famille colombienne Santo Domingo) avec 13,9%. Il l’a été en prévoyant un volet optionnel de 3,7788 GBP en cash et de 0,483969 action ABInBev par action SABMiller parallèlement à l’offre ” ordinaire ” de 44 livres britanniques (GBP) en cash. Altria et Bevco pourront ainsi devenir actionnaires d’ABInBev à des conditions fiscalement intéressantes, alors que la dilution est limitée à maximum 20%. Bien entendu, il subsiste de nombreuses incertitudes. Tout d’abord, les autres actionnaires tant d’ABInBev que de SABMiller doivent accepter l’offre. En outre et surtout, l’acquisition doit être approuvée par les autorités à la concurrence de différents pays. Une première étape importante a déjà été franchie aux Etats-Unis, avec la vente conditionnelle – la réussite de l’acquisition – de la participation de 50% de SABMiller dans Miller Coors à Molson Coors, une joint-venture entre Molson Coors et SABMiller aux Etats-Unis et à Porto Rico, le tout pour 12 milliards USD. Grolsch et Peroni, les deux grandes marques européennes de SABMiller, sont également en vente, et des mesures comparables suivront sans doute encore dans plusieurs autres pays, notamment la Chine. ABInBev a accepté de payer une indemnité de 3 milliards USD en cas d’échec de l’opération, et est bien décidée à ne plus lâcher une proie qu’elle poursuit depuis longtemps. Puisque le financement – notamment par 75 milliards USD de nouvelles dettes – est bouclé, le dernier élément qui justifie une décote par rapport au prix offert est le temps qui nous sépare encore de la finalisation de l’acquisition, pour l’instant prévue pour le 2e semestre 2016. Entre-temps, les actionnaires de SABMiller ont touché un dividende de clôture de maximum 0,9375 USD par action en août 2016, en plus du dividende intérimaire de 0,2825 USD par action qui a été payé le 4 décembre. Nous relevons la note deSABMiller à ” digne d’achat ” en raison de la grande probabilité d’obtenir un rendement de 10% (en GBP) en maximum un an (1A). La note d’ABInBev demeure ” conserver ” (2A).
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