Ne pas se fier au rebond de Seadrill
La rédaction répond à la question : “Seadrill a demandé une protection contre ses créanciers, mais l’action a progressé depuis. Y a-t-il encore de l’espoir, ou ai-je perdu tout mon argent ?”
Il est exact que le leader mondial norvégien dans la location d’installations de forage pétrolier Seadrill a demandé une protection contre ses créanciers aux États-Unis (le fameux “chapitre 11”) le 2 septembre dernier. Cette décision n’était pas inattendue, car l’entreprise surendettée essayait de procéder à un important refinancement depuis un an. L’objectif initial était de le finaliser fin 2016. Le fait qu’elle n’y soit parvenue qu’aujourd’hui est évidemment révélateur d’une situation extrêmement difficile. En anticipation, nous avions émis un conseil de vente début 2016. Il était déjà clair à l’époque qu’une augmentation de capital entraînant une forte dilution des participations existantes serait indispensable pour rééchelonner une charge de dette nette d’environ 8 milliards de dollars. La réalité est cependant nettement plus grave : dans le meilleur des cas, les actionnaires existants ne détiendront que 1,9% de la nouvelle Seadrill, ce qui, sur la base d’une valeur attendue d’environ 1 milliard de dollars après la relance, correspond à une valeur théorique de 0,04 dollar par action Seadrill actuelle.
Le plan de refinancement a été publié avec la demande de protection contre les créanciers, et prévoit une injection de liquidités de 1,06 milliard de dollars, dont 860 millions par la voie d’une émission d’obligations couvertes (à un taux usuraire de 12%) et 200 millions par le biais d’une émission d’actions. Les deux moteurs du plan sont le grand actionnaire John Fredriksen (23,41%) et Centerbridge, un fonds spéculatif spécialisé dans les refinancements. Les crédits bancaires encore à rembourser de 5,7 milliards de dollars seront prolongés de quatre ans, les remboursements étant gelés jusqu’en 2022. Les titulaires d’obligations non couvertes (pour un total à rembourser de 2,3 milliards de dollars) se verront attribuer environ 15% du nouveau groupe, et récupéreront ainsi 6% de leur investissement. Attention : ces créanciers doivent encore approuver le plan présenté, et sans leur feu vert, il ne restera plus rien pour les actionnaires existants. Se sont rangés derrière le plan 97% des créanciers bancaires et 40% des créanciers obligataires non couverts. L’objectif est de pouvoir relancer l’entreprise d’ici août 2018. La restructuration réduirait le rapport entre la dette nette et le cash-flow opérationnel (EBITDA) de 10,4 fois en 2017 à 3,3 fois en 2020.
Le fait que les actionnaires actuels aient encore une perspective de participation très limitée dans la nouvelle Seadrill est inattendu, et constitue la raison du récent rebond de l’action. Mais le niveau de cours actuel n’est absolument pas réaliste et est uniquement le fruit de l’activité des traders journaliers spéculatifs. Nous confirmons le conseil “vendre” (3C).
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