L’OPEP a jeté de l’huile sur le feu
Si la baisse perdure, la probabilité que l’Occident sombre en récession augmentera.
La décision de l’OPEP de maintenir sa production inchangée n’a fait qu’aggraver la situation. Personne n’en tirera avantage, malheureusement. Pas même les pays producteurs de pétrole, l’Arabie Saoudite incluse. Elle devra en effet faire une ponction sur ses réserves de change colossales dès l’année prochaine pour éviter tout dérapage budgétaire si le prix du baril persiste sous la barre des 80 dollars. Seuls les pays qui résisteront le plus longtemps à cette baisse suicidaire en profiteront.
Répercussions de la baisse
Les pays producteurs occidentaux ne seront pas mieux lotis. Cela se remarque déjà sur le marché des changes où le cours de la couronne norvégienne (NOK) a chuté de 3,4%, le double de la baisse du cours du dollar canadien (CAD), abandonnant 1,7%. Les devises liées aux matières premières ont souffert également. Le rand sud-africain (ZAR) a perdu 1,5%, le dollar australien (AUD) 2,7%, le peso mexicain (MXN) 2,1% et le dollar néo-zélandais (NZD) 1,25%. Le dollar américain (USD) ne semble pas encore trop perturbé par les événements. Il a cédé 0,5%. Il ne tiendra cependant pas très longtemps. Non seulement parce que sa robustesse dépend pour une large partie de celle du prix du baril, mais surtout parce qu’une baisse prolongée de ce prix étoufferait la fragile reprise économique du pays.
Comme signalé précédemment, la production de pétrole à partir de gisements de schiste requiert un prix du baril supérieur à 90 USD pour être rentable. Plus longtemps ce prix fléchira, plus les compagnies pétrolières et leurs sous-traitants souffriront. Même les grandes compagnies ne seront pas épargnées. Elles réduiront sensiblement leurs investissements. Ce qui réduira à la longue la production. Il est probable que ce soit le but recherché par l’Arabie Saoudite pour éliminer des concurrents encombrants.
La situation pourrait avoir des répercussions malsaines sur le dollar lui-même. Si la baisse du prix du baril n’affectera pas outre mesure des pays comme la Russie ou l’Iran – quoiqu’on prétende le contraire en Occident – elle pourrait accélérer l’abandon pur et simple du billet vert dans le règlement des transactions commerciales internationales. La Russie s’active déjà depuis un bon moment pour ériger de nouveaux cartels la rendant moins dépendante de l’hégémonie occidentale sur les marchés.
De grandes banques affectées
La baisse du prix du brut perturbe aussi le monde financier. Un nombre impressionnant de produits liés à la performance du pétrole – produits souvent économiquement inutiles – ont fortement chuté ces derniers jours. Leur dégringolade affecte leurs émetteurs, essentiellement des grandes banques. JPMorgan et Wells Fargo, par exemple, s’apprêtent à réserver plusieurs centaines de millions de dollars pour faire face aux amortissements impromptus. D’autres institutions suivront certainement leur exemple.
Mais le danger principal se trouve au niveau macroéconomique. Dans un monde endetté jusqu’à la gorge, il vaut mieux éviter toute incitation à la déflation. Une baisse du prix du baril devrait par conséquent être confinée. Car dès que la déflation sévit, il faudra rembourser les dettes avec de l’argent réel. Ce qui est devenu irréalisable pour la majorité des pays occidentaux. Si la baisse perdure, la probabilité que l’Occident sombre en récession augmentera. Et aucune expansion monétaire ne pourra l’empêcher.
Panique sur les marchés
La panique était d’ailleurs perceptible sur le marché des capitaux. Les titres des compagnies pétrolières, surtout celles du secteur de schiste, ont fortement chuté la semaine dernière. La demande pour ce genre de titres s’est écroulée. Ce dont ont profité les émetteurs souverains ainsi que les industriels de renom. Ce qui a eu pour conséquence une baisse généralisée des taux d’intérêt, qui ont une nouvelle fois pulvérisé leurs records. Les échelles se sont en outre aplaties. Ce qui est de mauvais augure. Si l’échelle tend vers l’horizontal, la relance de la conjoncture deviendra plus malaisée. Pourquoi investirait-on à long terme si le court terme rapporte autant ?
La tendance sur le marché des capitaux était néanmoins positive. Le nombre de titres à la hausse surpassait celui des autres dans une proportion qui atteignait parfois 5 par rapport à 1. Les profits dépassaient facilement les 5%. Il n’empêche que le volume s’est tassé. On a nettement moins échangé que les semaines antérieures. La plupart des investisseurs préfèrent assurément attendre de meilleures circonstances. Notons toutefois la bonne performance des titres pourris libellés en euro (EUR), alors qu’ils fléchissaient dans les autres devises. Les émetteurs russes ont cédé pas mal de terrain, tout comme le rouble (RUB) qui a chuté de 7,9%. Les analystes craignent que les émetteurs russes rencontrent quelques difficultés lors du remboursement de leurs emprunts échus. Selon eux, ils ne seront plus capables de les renouveler. Ils oublient que ces émetteurs trouveront toujours de nouveaux créanciers en Chine et ailleurs. Il n’en demeure pas moins qu’ils devront récolter les dollars nécessaires aux remboursements.
La panique était aussi perceptible sur le marché primaire où l’activité s’est fortement tassée. Certes, les banques continuent d’inonder ce marché de leurs émissions. Et vu que les taux d’intérêt sont dans l’impossibilité de remonter d’ici peu, leurs titres ont trouvé facilement preneurs. Les émissions industrielles ont rencontré plus de difficultés. Mais ne vous laissez pas leurrer par leurs performances sur le marché gris. Ainsi, la pétrolière espagnole Repsol (BBB-) y affiche une surcote malgré les sombres perspectives de ce secteur. Cette prouesse est uniquement attribuable au soutien assidu des banques chargées du placement.
National Australia Bank
Peu de nouveautés intéressantes pour les petits porteurs sont apparues la semaine passée. Et quand il y en avait une, ses conditions n’étaient généralement pas très attrayantes. On ne peut se satisfaire, par exemple, d’un rendement de 4,13% pour la nouvelle émission de la Rabobank (A+) en NZD. Il accuse en effet un manque de l’ordre de 1% par rapport à la moyenne du marché significative pour cette qualité-là. Aussi nous vous renvoyons à l’alternative issue du même secteur, National Australia Bank (AA, alt.1) qui lui est qualitativement supérieure et rapporte plus. Sans tenir compte de l’amélioration qualitative, frais et différence de prix peuvent atteindre 0,78% avant que le surrendement disparaisse.
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