Les animaux domestiques, véritable poule aux oeufs d’or
La pandémie a dopé le secteur des produits pour animaux, déjà en verve et résistant généralement bien aux récessions. Les acteurs spécialisés dans l’alimentation, mais aussi les soins et jouets pour animaux, ont de beaux jours devant eux. Des opportunités intéressantes se profilent aussi pour les investisseurs.
Nombreux sont les propriétaires d’un animal de compagnie à considérer ce dernier comme un membre de la famille à part entière; ils n’hésitent pas à dépenser sans compter pour lui, même lorsque l’économie va mal. Les animaleries font des profits énormes sur la nourriture, les soins et même les jouets, parfois très onéreux. Les start-up se bousculent au portillon pour profiter de cette manne; les rachats et introductions en Bourse devraient dès lors se succéder lorsque les marchés financiers se seront apaisés, offrant autant d’opportunités d’investissement intéressantes.
La pandémie a véritablement dopé le secteur: avec le télétravail, les ménages ont massivement sauté le pas et fait l’acquisition d’un animal de compagnie. Le chiffre d’affaires (CA) de Tom & Co., leader du marché belge pour l’alimentation et les produits pour animaux de compagnie, poissons, oiseaux et reptiles, a ainsi augmenté de 15% en 2020 et de 10% de plus (264 millions d’euros) en 2021. Plus de la moitié des parts de la société ont été rachetées par la famille de Spoelberch, l’une des plus riches de Belgique, via son véhicule d’investissement Verlinvest. En 2021, le holding avait acquis l’indien Heads Up For Tails, sur le même segment. Quelques années plus tôt, Verlinvest avait déjà tiré un coquet bénéfice de la vente de Chewy (vente en ligne d’aliments pour animaux de compagnie) à PetSmart pour 3,35 milliards de dollars (3,11 milliards d’euros).
La famille Reimann, aussi très fortunée, investit également dans le secteur, ciblant plus précisément les assurances, un secteur en pleine croissance (en Scandinavie, la plupart des chiens et des chats sont déjà assurés). Le holding familial JAB a récemment investi 1,4 milliard de dollars dans des assureurs pour animaux de compagnie appartenant au groupe canadien Fairtax.
Un marché en plein essor
Le marché belge des aliments et des soins pour animaux de compagnie suit la tendance mondiale. Selon les chiffres de l’American Pet Products Association, trois des ménages américains sur quatre possédaient un animal de compagnie ces dernières années. Et la forte croissance du secteur se poursuit, malgré une inflation élevée, qui ampute le pouvoir d’achat de nombreux consommateurs. En Asie-Pacifique (Chine, Inde, Japon, Australie, etc.), la demande devrait aussi augmenter significativement dans un avenir proche.
Au-delà de l’alimentation, le marché des médicaments, des traitements médicaux et des compléments nutritionnels pour animaux est lui aussi en plein essor. Enrico Bastianelli a ainsi fondé la start-up TheraVet, qui produit des médicaments pour les chiens et les chats souffrant d’inflammation chronique. Le milliardaire Marc Coucke, qui a généralement l’oeil pour les bonnes affaires, est l’un des principaux actionnaires d’Animalcare, fabricant britannique de médicaments vétérinaires. Le marché des produits de soins pour animaux de compagnie devrait dépasser 350 milliards de dollars d’ici 2027 (dont 94,2 milliards de dollars pour l’alimentation).
Le secteur est dominé par une série d’entreprises non (ou plus) cotées en Bourse, dont la plus importante est Mars Petcare (Pedigree, Whiskas, Royal Canin…). La plupart des acteurs sont originaires des Etats-Unis, mais quelques entreprises dignes d’intérêt sont actives en Europe. L’une des plus importantes est l’allemande Zooplus, cotée à la Bourse de Francfort depuis 2008 et qui gère une plateforme de vente en ligne de produits pour animaux de compagnie. Créée il y a 23 ans, elle compte 10 millions de clients dans 30 pays et ses ventes augmentent en moyenne de 120% par an depuis plusieurs années. Fin 2021, elle a été rachetée pour 480 euros par action par la société de capital-investissement américaine Hellman & Friedman et son homologue suédoise EQT Private Equity, une opération qui l’a valorisée à pas moins de 3,7 milliards d’euros hors dette. Les actions ont été retirées de la cote peu après la prise de contrôle.
L’indice FactSet Pet Care est composé de 26 sociétés actives dans les produits pour animaux de compagnie (dont Nestlé, Chewy, General Mills, Colgate-Palmolive, J.M. Smucker). L’ETF Proshares Trust Pet Care, qui le réplique, a perdu 35% de sa valeur en 12 mois – un recul logique du fait du pessimisme boursier ambiant, qui plombe même les titres les plus prometteurs. Les cours actuels offrent toutefois des opportunités d’achat.
Le britannique Pets at Home, qui vend des aliments, des jouets et des médicaments pour animaux, a vu son titre dévisser de 35% sur un an à Londres. Le potentiel reste toutefois intact et l’action affiche actuellement une valorisation raisonnable, avec un ratio cours/bénéfice de 14. Le premier détaillant d’articles pour animaux de compagnie de Grande-Bretagne possède 450 magasins; son bénéfice net est estimé à 124,50 millions de livres sterling cette année et en 2023. Comme c’est le cas pour l’alimentation pour bébé, les produits pour animaux sont peu affectés par la hausse générale des prix, car peu de ménages rechignent à dépenser pour ceux qu’ils aiment – qu’ils aient deux ou quatre pattes.
Le CEO de Nestlé, Mark Schneider, soulignait récemment l’engouement pour les aliments pour animaux de compagnie, annonçant que le groupe allait relever les prix de ces produits de 7,7%. L’accent sur la branche animaux (via la filiale Nestlé Purina PetCare, avec notamment Purina Pro Plan, Purina ONE et Felix) explique le succès de Nestlé face à ses concurrents Unilever et Danone. La division représente déjà 15% des 87 milliards de francs suisses de CA, et sa part va croissant. L’action convient donc aux investisseurs en quête de stabilité et de sécurité.
Le géant américain de l’alimentation General Mills (avec les céréales Cheerios, les chips Bugles ou encore les crèmes glacées Häagen-Dazs) commercialise les aliments pour animaux de compagnie de la marque Blue Buffalo, sous la devise “Aimez-les comme un membre de la famille, nourrissez-les comme un membre de la famille”. Le bénéfice d’exploitation a augmenté de 11% en 2021, à 3,5 milliards de dollars, grâce notamment à la division animale, dont les ventes nettes ont progressé de 37% au 4e trimestre, à 610 millions de dollars, surprenant jusqu’à la direction. Le titre peut être acheté dans une perspective à long terme.
Au-delà de l’alimentation
Le groupe Henry Schein, spécialisé dans les instruments médicaux et vaccins pour médecins et dentistes, a scindé sa division vétérinaire et l’a fusionnée avec Vets First Choice, un prestataire de services technologiques pour les cabinets vétérinaires. La scission des divisions animales est une véritable tendance; en 2013 déjà, Pfizer avait introduit en Bourse sa division Zoetis, active dans la recherche, le développement, la production et la commercialisation de médicaments, vaccins, outils de diagnostic et technologies sanitaires pour chiens, chats, chevaux, bovins, porcins, volaille, poissons et moutons. L’action a gagné plus de 400% depuis sa cotation.
Mais toute hausse spectaculaire laisse généralement la place à une baisse. Ainsi, Chewy est en difficulté en Bourse depuis un certain temps déjà. Via son site Internet et ses applications mobiles, exclusivement, elle fournit des produits (aliments, compléments alimentaires, médicaments) pour les animaux de compagnie au sens large (y compris les reptiles). Chewy n’a pas encore dégagé de bénéfices, et ne devrait le faire ni en 2022, ni en 2023; néanmoins, plusieurs analystes recommandent l’achat du titre, au motif qu’aujourd’hui, seuls 20% des ventes de produits pour animaux se font en ligne. Un potentiel de croissance considérable existe ainsi dans le commerce électronique.
En 2006, Freshpet a initié une révolution dans un secteur qui n’avait pas changé depuis plus de 50 ans, en proposant de créer des aliments frais et sains, sans conservateurs, pour animaux. Si le CA a augmenté de 41,5% sur un an au premier trimestre de 2022, la perte s’est creusée, de 11 à 17,5 millions de dollars, principalement du fait des investissements supplémentaires et de la hausse des coûts des salaires et des matières premières. Le cours de l’action avait grimpé jusqu’au début de l’an dernier, mais a perdu 70% en 12 mois. Autre acteur du secteur, Petco Health and Wellness Company se concentre sur la santé et le bien-être des animaux de compagnie et entend améliorer la vie des animaux et de leurs propriétaires en proposant divers services: toilettage, dressage canin, services vétérinaires. Toutefois, ceux qui ont investi n’ont pour l’instant pas de motif de se réjouir. Nous restons confiants, mais conformément au dicton boursier “On n’attrape jamais un couteau qui tombe”, nous recommandons d’attendre un étiage pour acheter l’action.
Stratégie
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