La meilleure Bourse de 2022 est… la Bourse turque

Quand l’inflation s’emballe, la Bourse attire. Les investissements massifs pratiqués en Turquie l’an passé ont fait grimper les cours des actions. A tel point que le pays est numéro 1 des classements relatifs à l’année boursière 2022.

Si la politique turque fait régulièrement les gros titres (comme en décembre encore), c’est l’économie du pays qui surprend cette fois. L’indice turc (BIST 100) a bondi de 195% en 2022, un pourcentage qu’il convient néanmoins de mettre en perspective. La livre a en effet chuté l’an dernier de plus de 24% face à l’euro, et davantage encore par rapport au dollar. Reste que même si l’on convertit tous les rendements de 2022 en dollar, le BIST 100 conserve la première place (+107%). La chute de la livre et la hausse de la Bourse d’Istanbul sont à l’évidence liées à la montée en flèche de l’inflation, de 84,4% en novembre.

Cette inflation galopante incite à investir dans les actions, dont la valeur a été, l’an dernier, bien mieux préservée que celle de la devise. L’envolée du BIST 100 prendra fin tôt ou tard; mais le fait que l’indice ait été le plus performant de l’année boursière 2022 prouve à quel point l’inflation a gouverné les marchés financiers depuis janvier dernier. Sept des actions qui composent le BIST 100 ont progressé de plus de 500% en monnaie locale, et les 10 premiers titres de l’indice affichent une hausse supérieure à 450%. Il s’agit, nous le répétons, de rendements exceptionnels, que l’inflation inhabituelle incite à relativiser.

Top 10 exotique

Un examen du reste du top 10 révèle que le thème de l’inflation porte le marché boursier argentin (numéro 2), par exemple, également: là aussi, la population cherche à se protéger contre la valse des étiquettes en investissant en Bourse. La moindre performance de la Russie (en monnaie locale) ne surprendra sans doute personne. On note également la présence dans le peloton de queue de l’indice S&P 500 (bien en retrait de la plupart des indices européens) et de nombreux indices asiatiques, dont ceux de Hong Kong, de Taïwan et de Corée du Sud.

Il est humain, lorsqu’on se projette dans l’avenir, d’accorder une importance disproportionnée aux évolutions actuelles les plus frappantes. A l’approche de 2022, ce “biais de récence” avait incité maints analystes à prêter énormément d’attention à la crise sanitaire, dont on savait pourtant qu’elle commençait à s’essouffler. Il semble tout aussi erroné de vouloir considérer l’inflation comme le principal thème d’investissement de 2023.

L’inflation recule en effet presque partout depuis quelques mois. Dans la zone euro, elle est passée de 10,6% en octobre à 10,0% en novembre; aux Etats-Unis, elle est tombée de plus de 9% à 7,7% depuis juin. Même en Turquie, le taux très élevé du mois de novembre est légèrement inférieur aux 85,5% enregistrés en octobre. Tout porte désormais à croire que la crise sanitaire et l’inflation marqueront l’année boursière 2023 sans, probablement, la dominer.