La résurrection du Bel 20: vers de nouveaux records en 2025 ?
Longtemps abonné aux performances décevantes, le Bel 20 a enfin réussi à tirer son épingle du jeu en 2024, boosté par son repositionnement sectoriel. 2025 pourrait bien être l’année du record pour l’indice bruxellois.
Laminé par la crise financière et sa dépendance aux valeurs bancaires, le Bel 20 a perdu plus de la moitié de sa valeur entre début 2007 et fin 2011. Une dégringolade tant absolue que relative, l’indice paneuropéen Stoxx 600 ayant reculé de 32% “seulement” et le S&P500 de 10%.
Diversification avortée
Confronté à l’effondrement boursier des grandes banques de l’époque (KBC, Dexia et Fortis), le Bel 20 a tenté de se réinventer en diversifiant sa composition avec l’intégration d’entreprises comme D’Ieteren, Elia, bpost ou encore la biotech ThromboGenics.
Parallèlement, l’intervention historique, en juillet 2012, de Mario Draghi, avec son fameux “whatever it takes” (quoi qu’il en coûte), a marqué la fin de la crise des dettes souveraines de la zone euro, redonnant un nouveau souffle aux marchés européens, y compris bruxellois.
Cependant, cet élan fut de courte durée. L’espoir d’un Bel 20 plus dynamique a été sapé par les déboires de bpost et de ThromboGenics (devenu Oxurion depuis), ainsi que par les difficultés d’AB InBev à digérer le rachat de SAB Miller, qui n’était ni plus ni moins que son principal concurrent au niveau mondial.
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À l’image de l’économie belge
Au fil des révisions de l’indice, la biopharmacie a toutefois pris une place de plus en plus importante. Ce qui est somme toute logique, le secteur étant un des piliers de l’économie belge. Pourtant, les succès ne furent pas toujours au rendez-vous, à l’image de ThromboGenics. Quant à Galápagos, après un démarrage prometteur, elle a aussi vu sa valeur plonger sous son niveau de 2016, année de son intégration dans le Bel 20.
Néanmoins, des réussites notables ont émergé. UCB et argenx, fers de lance de la biopharmacie belge, ont permis au Bel 20 de s’illustrer en 2024. À l’heure d’écrire ces lignes, l’indice bruxellois affiche un gain annuel de 13 %, soit plus du double du Stoxx 600, grâce à des bonds spectaculaires de 133 % et 75 %, respectivement pour les deux biopharmas.
Le Bel 20 est aujourd’hui largement recentré autour de secteurs prometteurs.
Pas de successeur
Ces performances ont propulsé UCB et Argen-X respectivement aux deuxième et troisième rangs des entreprises belges en termes de capitalisation boursière, uniquement dépassées par AB InBev. Ensemble, les deux groupes biopharmaceutiques pèsent désormais un quart du Bel 20 et pourraient donc continuer de soutenir la tendance.
Les perspectives restent en effet au beau fixe. Leurs produits phares ayant été récemment commercialisés, les risques de déconvenue ont nettement diminué… tout comme le potentiel de gains. Si l’écrasante majorité des analystes reste à l’achat, les objectifs de cours moyens laissent aujourd’hui peu de marge d’appréciation.
Malheureusement, aucune autre société biopharmaceutique ne semble prête à prendre le relais. Galápagos doit composer avec l’échec commercial du Jyseleca (traitement de la polyarthrite rhumatoïde), cédé à Alfasigma, et un portefeuille de médicaments expérimentaux peu avancés. Hors indice, le successeur d’argenx se fait attendre. Mithra, Biosenic, Hyloris, Celyad, Biocartis ou Biotalis ont en effet enchaîné les déceptions.
KBC comme moteur ?
Parmi les poids lourds de l’indice, la bonne surprise de 2025 pourrait venir de KBC. Le titre a récemment atteint un sommet pluriannuel, alors que l’environnement financier s’améliore pour le secteur bancaire. Les baisses de taux successives de la Banque centrale européenne (BCE) vont en effet réduire ses coûts de financement, que cela soit directement (opérations auprès de la BCE) ou indirectement, les taux de la Banque centrale influençant le rendement des produits d’épargne.
Des taux plus bas sont aussi de nature à stimuler les opérations transactionnelles (fusions, acquisitions, introductions en Bourse), de bon augure pour les activités de banque d’investissement.
Le bancassureur profite ainsi depuis quelque temps des rapports plus optimistes, à l’image de Barclays. Les analystes britanniques ont relevé leur avis à surpondérer mi-décembre avec un objectif de cours de 87 euros. En tenant compte du poids de KBC, cela ferait gagner une centaine de points au Bel 20.
Nouvelles locomotives
Pour battre son record historique de 4.756,82 points, atteint en mai 2007, le Bel 20 devra toutefois s’appuyer sur d’autres locomotives. Lotus Bakeries, valeur phare des 20 dernières années sur Euronext Bruxelles, est un candidat sérieux. En décembre 2004, le cours du producteur du célèbre spéculoos, devenu entretemps Biscoff pour partir à la conquête du monde, oscillait autour de 100 euros. Aujourd’hui, il dépasse allégrement les 10.000 euros. Une envolée qui a fini par lui ouvrir les portes du Bel 20 en mars dernier.
Récemment, le titre a subi des prises de bénéfices, ayant chuté de 15% depuis la mi-octobre. Fondamentalement, rien n’a changé. Le titre est toujours chèrement valorisé à plus de 50 fois les bénéfices, mais continue d’afficher des niveaux de croissance insolents année après année. Son chiffre d’affaires a ainsi à nouveau bondi de 20% au premier semestre. Sur 12 mois, il devrait atteindre 1,24 milliard selon les analystes, plus du double de 2019.
Son faible niveau d’endettement lui permet également de continuer à investir sereinement, que cela soit dans ses outils ou des rachats ciblés. Lotus Bakeries a notamment réussi à développer un deuxième pôle de croissance, à côté du Biscoff et de ses multiples déclinaisons, grâce au rachat de plusieurs spécialistes des encas sains (Nakd, Trek, Bear et Kiddylicious) entre 2015 et 2018.
Secteurs prometteurs
Pour atteindre un nouveau record en 2025, impliquant une progression de près de 12%, le Bel 20 pourrait aussi compter d’autres valeurs. Syensqo est leader dans plusieurs spécialités chimiques prometteuses comme les matériaux composites (notamment pour l’aéronautique) et les polymères avancés. Le holding Sofina est un acteur de référence dans le secteur du private equity au niveau international, ayant notamment investi dans Bytedance (TikTok).
Véritable conglomérat, Ackermans est notamment leader mondial du dragage via DEME et un acteur prépondérant de la banque privée en Belgique (Delen et Van Breda). Melexis (semi-conducteurs spécialisés) et Umicore (catalyseurs et batteries) sont à la pointe de la transition verte dans le secteur automobile – même si les 12 derniers mois ont été assez difficiles.
Le Bel 20 est ainsi aujourd’hui largement recentré autour de secteurs prometteurs, l’une des principales exceptions étant sans doute AB InBev. La consommation de bière est en effet sous pression et s’oriente de plus vers les brasseries artisanales.
Amundi Bel 20
Faut-il en conclure que c’est le moment de miser pleinement sur l’Amundi BEL 20 (ticker BEL sur Euronext Bruxelles), seul ETF répliquant l’indice vedette d’Euronext Bruxelles ? Cela serait aller vite en besogne. Le Bel 20 a certes redressé la barre au niveau des performances, ce qui peut justifier une petite position dans cet ETF, mais les problèmes demeurent nombreux en termes de construction de portefeuille.
Outre la concentration géographique évidente, la diversification sectorielle demeure hasardeuse avec, par exemple, trois groupes chimiques (Solvay, Syensqo, Azelis), trois entreprises biopharmaceutiques (UCB, argenx, Galápagos) et trois immobilières (WDP, Cofinimmo, Aedifica), dont deux sont essentiellement actives dans les maisons de repos.
Ce dernier élément illustre d’ailleurs un autre problème du Bel 20 : le manque de profondeur du marché belge. En tant que leader du logement pour seniors, Orpea (devenu Emeis) est un important client de Cofinimmo et Aedifica. Ces derniers ont ainsi perdu respectivement 63% et 51% depuis janvier 2022, quand la sortie du livre Les Fossoyeurs a plongé le groupe français dans la crise.
Peu de membres du Bel Mid, antichambre du Bel 20, ont une taille suffisante et la plupart des valeurs importantes de l’indice sont d’anciens membres du Bel 20 (Bekaert, bpost, Colruyt, Proximus, Barco…). On y retrouve ainsi beaucoup d’entreprises en perte de vitesse, comme l’illustre le piètre bilan boursier 2024: chute de 17% et seules six valeurs sur 25 en hausse depuis le début de l’année. L’une des rares exceptions est DEME, déjà présent dans le Bel 20 via Ackermans, actionnaire à 62%.
Diversification
Le Bel 20 doit ainsi demeurer une position de diversification, que vous pouvez éventuellement étoffer un peu au vu de l’amélioration des perspectives. Mais cela ne remplace certainement pas un portefeuille diversifié. D’autant plus à l’heure actuelle où même le MSCI World est décrié par certains observateurs en raison d’une trop grande concentration.
Les Sept Fantastiques (Apple, Alphabet, Amazon, Meta, Tesla, Nvidia, Microsoft) représentent en effet plus de 22% de l’indice mondial (des marchés développés), comptant pourtant 1.397 grandes entreprises.
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