La Bourse va arrêter de jouer les montagnes russes

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Les investisseurs américains ont vécu une année folle à cause des marchés boursiers. Mais 2024 devrait être plus stable, et même mieux, elle sera une belle année.

Dans The Gap in the Curtain, un roman de 1932 de John Buchan, cinq personnes voient la première page d’un journal un an à l’avance. Deux d’entre eux y voient l’annonce de leur propre mort et passent l’année à essayer d’éviter leur destin, sombrant peu à peu dans la folie. Or le jour venu, l’un d’entre eux se rend compte qu’il s’est trompé : ce n’est pas sa nécrologie qu’il a aperçue, mais celle d’un homme portant le même nom que lui. Hugh Hendry, un gestionnaire de fonds spéculatifs excentrique, a qualifié ce livre de “meilleur livre d’investissement de tous les temps” parce qu’il lui a appris à se préoccuper du voyage et de la destination des prix des actions.

En octobre 2023, l’indice américain S&P 500 oscillait autour de 4.100 points. Si nous avions pu jeter un coup d’œil à travers le rideau, nous aurions pu voir à différents moments en 2021, 2022 et 2023 que les actions resteraient largement inchangées à la fin de 2023 par rapport à leurs niveaux de l’époque.

Mais ce que nous n’aurions pas vu, ce sont les hauts et les bas en cours de route. En 2021, avec un marché haussier (bullish), les investisseurs auraient pu penser qu’il s’agissait d’un beau plateau. Or, en 2022, les actions ont plongé, à la vitesse d’un couperet, lorsque les taux d’intérêt ont été relevés. Les investisseurs auraient pu alors s’imaginer que ce tour de vis monétaire avait cessé. Au lieu de cela, le graphique des actions américaines sur trois ans ressemble à des montagnes russes, avec des hausses régulières et des baisses violentes.

Records

À la fin de l’année 2023, la situation est plus étrange à ce que même la science-fiction aurait pu prédire. Malgré les hausses extrêmes et continues des taux d’intérêt, qui ont provoqué la faillite de plusieurs banques de taille moyenne au printemps 2023, le taux de chômage n’est encore que de 3,8 %. Et malgré une croissance économique toujours forte, l’inflation est beaucoup plus modérée. Au cours de l’année 2023, les marchés ont adopté, même si cela n’a pas été sans heurts, ce mélange inhabituel de croissance forte, d’inflation modérée et de hausse des taux d’intérêt.

Mais la destination n’est qu’une moitié de l’histoire. Le voyage est tout aussi important. Il est difficile de croire que des taux d’intérêt (encore plus élevés) ne pourraient pas détruire davantage de choses dans le système financier américain, voire même suffisamment pour perturber la croissance économique. La sonnette d’alarme a déjà été tirée dans le secteur de l’immobilier commercial. Les “banques de l’ombre”, créées par les prêts aux entreprises, pourraient connaître des difficultés si la croissance commence à ralentir.

Aucun de ces risques n’a encore entamé l’enthousiasme des investisseurs. Le scénario optimiste est donc celui d’un atterrissage en douceur, où la croissance reste robuste, l’inflation retombe doucement et la Réserve fédérale peut commencer à réduire les taux d’intérêt en 2024 ou 2025. Un tel scénario ne manquerait pas d’alimenter une hausse qui atteindrait déjà de nouveaux records.

Alice Fulwood – Rédactrice à Wall Street pour “The Economist”
Traduit de “The World in 2024”, supplément de “The Economist”

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