Bourse : les États-Unis sont-ils surévalués par rapport à l’Europe ?

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Les actions américaines valent plus que les européennes. Cet écart serait justifié. Mais 2025 devrait être l’année de la revanche pour l’Europe. Analyse.

“Les actions américaines sont-elles surévaluées par rapport aux actions européennes ?”. Voilà la question que se pose, dans une note, Patrick Artus, conseiller économique pour le gestionnaire d’actifs français Ossiam (groupe Natixis). La valorisation des titres américains a en effet augmenté beaucoup plus rapidement que celle des titres européens, ces dernières années. Le S&P 500 a vu son cours se multiplier par 5,5 environ, depuis 2016, mais celui de l’Euro Stoxx a à peine doublé.

Autre chiffre qui montre l’écart : “La valorisation des actions américaines (PER forward, sur les résultats de l’année suivante, de 22,2) est nettement supérieure à la valorisation des actions européennes (PER forward de 13,9)”, explique-t-il, mentionnant le ratio de cours/bénéfice estimé pour 2025. Mais cet écart entre les deux marchés se justifie-t-il donc ? Ou s’agit-il d’un attrait surdimensionné pour Wall Street et notamment la tech ?

“Justifié”

La réponse est oui, selon l’expert, l’écart est justifié. Il se base sur différents facteurs pour analyser cet écart. C’est notamment la différence entre le taux d’intérêt à dix ans et la croissance des profits des entreprises qui est plus importante aux États-Unis. Ce qui veut dire que les entreprises américaines gagnent plus d’argent. “Cet écart valide amplement l’écart de valorisation entre le marché des actions américaines et celui des actions européennes”, selon l’expert.

Ce sont aussi le taux de croissance anticipé du PIB et la déformation du partage des revenus (en d’autres mots, la productivité comparée aux salaires réels) qui jouent pour déterminer la juste valeur, en bourse. De ce point de vue, “on voit, aux Etats-Unis, depuis 2021, une croissance stabilisée à un niveau assez élevé et une déformation du partage des revenus en faveur des entreprises ; en zone euro, une croissance faible et une stabilité du partage des revenus.” Les entreprises américaines sont donc plus productives. La croissance devrait rester plus lente en Europe et le partage des revenus moins favorable aux entreprises.

Une croix sur l’Europe ?

Faut-il pour autant ne pas investir en Europe ? Différents analystes estiment que cette valorisation plus basse permettra justement à l’Europe de prendre sa revanche sur Wall Street, en 2025.

C’est par exemple le cas de Goldman Sachs. Dans ses prévisions pour 2025, la banque conseille avant toute chose de diversifier les placements. Et ne pas uniquement miser sur les géants technologiques américains, qui pèsent de plus en plus lourd à Wall Street. “Le marché américain atteint son plus haut niveau de concentration depuis un siècle. La domination des méga-capitalisations est insoutenable, ce qui rend les stratégies passives en grande capitalisation plus risquées”, peut-on lire. Une piste serait alors de miser sur le secteur financier du Vieux continent, “les banques européennes ayant récemment surperformé les géants technologiques américains.”

Inversion de la tendance ?

C’est aussi le cas de BCA Research. “Les actions européennes souffriront en début d’année, surtout par rapport aux actions américaines. Toutefois, cette baisse fera place à une longue période de surperformance européenne, emmenée par les actions allemandes”, écrit Mathieu Savary, stratégiste en chef pour l’Europe, dans un récent rapport sur les perspectives pour 2025. Voilà qui mettrait fin à une sous-performance qui dure depuis 15 ans. Les actions européennes n’avaient d’ailleurs jamais été si bon marché par rapport aux actions américaines qu’aujourd’hui.

Le potentiel de hausse du marché européen vient de différents facteurs, explique Savary. “Les tendances négatives pour les actions européennes s’inversent. Les largesses budgétaires des États-Unis vont diminuer, tandis que l’Europe va commencer à dépenser davantage. Le désendettement de l’Europe est terminé, d’autant plus que les banques européennes sont de nouveau en bonne santé. L’Europe sera de plus en plus approvisionnée en gaz naturel grâce aux échanges avec les États-Unis, ce qui réduira son handicap en matière d’électricité. L’incertitude politique des États-Unis augmentera alors que celle de l’Europe diminuera, car l’incertitude exceptionnellement élevée de l’Allemagne s’estompera. Les États-Unis fermeront leurs frontières et leur avantage démographique fondra. Ce nouveau monde sera beaucoup plus favorable au taux de rendement en Europe et favorisera l’afflux de capitaux dans la région.”

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