Bourse : il est temps de revenir sur l’immobilier

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Les fonds investis sur l’immobilier n’ont pas encore digéré la purge de 2022, mais la perspective d’une baisse des taux (en Europe) est de nature à redonner de l’attrait pour ce secteur délaissé.

Le secteur immobilier a traversé trois phases durant les 10 dernières années. Nous avons tout d’abord assisté à une longue phase haussière soutenue par les politiques extrêmement accommodantes des banques centrales, qui ont permis aux groupes immobiliers de s’endetter à des taux très favorables et d’accroître rapidement la taille de leur portefeuille foncier.

Double impact

Le secteur a ensuite encaissé deux chocs, avec tout d’abord l’épidémie de covid en 2020 qui a pesé lourdement sur certains segments (immobilier commercial, bureaux, maisons de santé), et ensuite la hausse de l’inflation en 2022 qui a contraint les banques centrales à resserrer drastiquement leur politique monétaire, avec des conditions de refinancement nettement moins favorables qui ont contraint de nombreux groupes à vendre des actifs pour réduire leur endettement.

Si la performance des fonds immobiliers avait digéré assez facilement l’impact du covid, on ne peut pas en dire autant de la hausse des taux, qui a provoqué une correction massive (-28% en moyenne durant l’exercice 2022) pour les fonds immobiliers de notre échantillon, qui reprend les meilleures stratégies globales et ­européennes.

Alors que les fonds immobiliers avaient autrefois la réputation de permettre aux investisseurs d’être protégés contre les périodes plus volatiles sur les marchés financiers, les dernières années ont clairement rappelé que les banques centrales restent prédominantes pour la trajectoire du secteur, avec une performance annualisée qui est désormais proche de zéro durant les cinq dernières années.

Europe vs Global

L’examen du tableau permet également de remarquer des différences de comportement entre les stratégies investies sur les foncières européennes, et celles investies globalement. Les fonds “européens” ont subi beaucoup plus lourdement la correction de 2022 (-32% contre -23% pour les fonds globaux) et ont davantage rebondi en 2023 (+16% contre +6% pour les fonds globaux).

Ces écarts s’expliquent par les très fortes différences dans les compositions des différents fonds. Les produits globaux sont très fortement exposés sur le marché américain (plus de 60% des encours en moyenne), qui est également beaucoup plus diversifié d’un point de vue thématique (logistique, maisons de repos, location résidentielle, hôtels, casinos, centres commerciaux, data centers, antennes télécoms, espaces de stockage, etc) que le marché européen, qui est dominé par le résidentiel allemand et le commercial français.

Les fonds globaux sont également plus diversifiés (58 lignes individuelles pour les stratégies globales contre seulement 32 pour les européennes) et ils ont également une exposition plus importante sur des grandes capitalisations tandis que les fonds européens sont davantage exposés sur les foncières de taille moyenne.

Surperformance

En tête des performances sur cinq ans, le fonds Nordea 1 Global Real Estate est piloté par une équipe de spécialistes mondiaux chez le gestionnaire américain Duff & Phelps. Geoffrey Dybas, gestionnaire du fonds et head of real estate chez Duff & Phelps, souligne s’attendre à une croissance économique qui va continuer à ralentir durant les prochains mois. “La qualité des bilans et la résilience des flux de trésorerie vont rester les facteurs déterminants dans un environnement incertain.”

Nous trouvons ensuite deux fonds de Janus Henderson (global et Europe), qui ont affiché des performances très similaires sur cinq et dix ans en dépit d’une composition différente. Guy Barnard, gestionnaire des deux produits, souligne que la valorisation des valeurs immobilières européennes ont intégré un scénario excessivement pessimiste.

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Il est probable que 2024 constituera un point d’inflexion pour le secteur.” – Guy Barnard (Janus Henderson)

“Dans le même temps, certains groupes montrent actuellement de belles performances opérationnelles. Même si des risques restent présents, nous continuons de privilégier une approche sélective sur des groupes financièrement sains. La correction a déjà eu lieu, et il est probable que 2024 constituera un point d’inflexion pour le secteur.”

Détente monétaire

Le grand facteur qui est susceptible de soutenir la performance des foncières pour les prochains trimestres est la normalisation de l’inflation et des politiques monétaires, qui a déjà commencé en Europe avec les baisses des taux annoncées par les banques centrales suisse et suédoise, tandis que la BCE devrait probablement baisser le sien lors de sa réunion du mois de juin.

“Le secteur a fait les frais depuis le début 2024 d’un cocktail croissance/inflation qui a ajourné les premières baisses de taux et l’intensité de l’assouplissement à venir, constate Paul Reuge, gestionnaire du fonds R-co Thematic Real Estate. Dans le même temps, la baisse des taux obligataires a fait nettement retomber les coûts de refinancement, avec pour conséquences une réduction de l’impact négatif sur la profitabilité des sociétés immobilières et un soutien à la valorisation des immeu­bles. La baisse du coût de l’argent va permettre d’atteindre plus rapidement le moment du rebond pour les valeurs immobilières.”

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“La baisse du coût de l’argent va permettre d’atteindre plus rapidement le moment du rebond pour les valeurs immobilières.” – Paul Reuge (R-co Thematic Real Estate)

“Historiquement, le secteur immobilier au niveau global a montré une capacité de surperformance suite à la fin du mouvement de hausse des taux directeurs”, souligne encore Geoffrey Dybas, qui pointe également la forte décote de l’immobilier coté par rapport aux actifs non cotés, qui devrait inciter les flux financiers à se diriger principalement vers cette partie du marché.

Guy Barnard indique également que les actions cotées ont intégré automatiquement l’impact des hausses de taux, contrairement aux actifs non cotés. “Cela signifie que les foncières cotées sont négociées à des décotes importantes par rapport aux actifs privés, et elles sont aujourd’hui susceptibles de bénéficier plus fortement d’un retournement de la direction des taux directeurs.”

Attrait sectoriel

Le premier segment qui semble bénéficier de cette forte décote est le secteur de l’immobilier résidentiel, qui a fait l’objet de deux acquisitions importantes (Tricon Residentiel et Apartment Income) de la part du groupe immobilier privé Blackstone.

“Avec ces deux transactions conclues à plus de 20 % de prime par rapport aux cours des actions, il s’agit d’une illustration claire de la valorisation attractive des immobilières résidentielles au niveau américain, souligne Guy Barnard. Mais ce segment est également attractif en Europe au vu des fortes décotes qui ont pénalisé les groupes endettés.”

Pour Geoffrey Dybas, “les groupes exposés sur les centres de données ou la logistique vont continuer d’afficher une croissance solide pour les prochaines années”.

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