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Un peu de sérieux, s’il vous plaît !

“A l’avenir, il nous faut une mention dans le traité permettant, en dernier recours, d’exclure un pays de la zone euro si les conditions ne sont pas remplies de manière répétée sur le long terme.” Les déclarations de la chancelière allemande Angela Merkel devant le parlement allemand ont fait l’effet d’un électrochoc dans de nombreuses capitales européennes.

“A l’avenir, il nous faut une mention dans le traité permettant, en dernier recours, d’exclure un pays de la zone euro si les conditions ne sont pas remplies de manière répétée sur le long terme.” Les déclarations de la chancelière allemande Angela Merkel devant le parlement allemand ont fait l’effet d’un électrochoc dans de nombreuses capitales européennes. Même si les conditions posées sont nombreuses, le simple fait d’envisager l’exclusion d’un Etat membre de la zone euro est inédit. Certaines voix s’élèvent pour prédire l’éclatement de la zone euro. L’économiste français Jacques Sapir date même l’événement : dans deux ans.

Un tel scénario serait grotesque et tout à fait suicidaire. Certes, la crise grecque génère des tensions au sein de la zone euro. L’Allemagne, grâce notamment à la réduction des coûts du travail ces dernières années – ils baissent de 1,4 % par an depuis 10 ans – a dopé sa compétitivité et ses exportations (ses exportations intra-européennes ont même grimpé de 44 %). La fourmi allemande n’a donc pas envie de tendre la main à la cigale grecque, qui a vu ses salaires augmenter 20 % plus vite que les salaires allemands depuis son entrée dans l’euro. L’Allemagne oublie cependant que son modèle – faible demande intérieure, énorme excédent d’exportations – n’est viable en Europe que parce que d’autres pays creusent leur déficit en achetant des produits made in Germany.

Sortir de la zone euro n’aiderait pourtant pas la Grèce. Le pays pourrait dévaluer sa monnaie mais verrait ses taux d’intérêt monter en flèche, puisqu’il ne bénéficierait plus de l’effet rassurant de l’euro. Le gain temporaire d’une dévaluation serait donc vite anéanti par la hausse des taux d’intérêt.

Malgré les tensions, la crise actuelle ne peut, à mon sens, sonner la fin de la zone euro. Il serait ridicule d’enterrer une des plus importantes réalisations européennes. Sauf si l’Europe veut devenir insignifiante au niveau global… Comme l’explique dans le quotidien Le Monde le professeur Jean-Hervé Lorenzi, “le monde de demain comprendra quelques grandes zones monétaires : autour du dollar, de l’euro et de l’espace chinois. Abandonner l’euro serait donc un contresens historique”.

D’autant que les bénéfices sont là. L’euro a ainsi permis de vivre pendant 10 ans sans choc financier et monétaire majeur et les Etats de l’eurozone ont bénéficié de taux d’intérêt limités. Il a aussi poussé les échanges et exportations intra-européennes en créant un espace sécurisé sans problème de taux de change ni de frais de couverture. L’euro a également permis au consommateur de mieux comparer les prix et de bénéficier d’un pétrole moins cher. L’euro a en outre forcé la compétitivité des entreprises. Bref, comme le rappelle l’économiste Joseph Stiglitz à nos confrères du Figaro : “L’euro a une énorme valeur et survivra.”

Avec de la vision et du courage politique, la crise actuelle pourrait même aboutir à un renforcement de la zone euro. Nombreux sont en effet ceux qui plaident pour une plus grande gouvernance économique. Une meilleure coordination des politiques budgétaires et fiscales permettrait effectivement d’harmoniser les réalités économiques. Les disparités actuelles sont de taille. Le taux de chômage est ainsi de 3,2 % aux Pays-Bas et de 19,7 % en Espagne. L’Allemagne est parvenue à limiter son déficit à 3,2 % de son PIB alors qu’il est de 11 % en Espagne ! Cependant, le projet de gouvernance économique renforcée met à mal le désir d’autonomie des Etats membres. Il faudra donc faire preuve de beaucoup d’ingéniosité pour sortir renforcé de la crise.

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