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Un parachute… sans chute

Les 270.000 euros que percevra Stefaan De Clerck, ancien ministre de la Justice et député fédéral, à titre d’indemnité de départ de la scène politique, auront eu pour mérite de faire bouger les choses !

Contrairement à l’indemnité perçue en 2009 par José Happart, alors président du parlement wallon. Cette dernière se montait au double : pas moins de 530.000 euros ! Est-ce trop? Est-ce indu ? On ne versera pas dans le populisme (de gauche ou de droite ?) en critiquant a priori la rémunération des représentants du peuple et autres mandataires politiques. Un salaire décent est censé garantir leur indépendance, tout comme une indemnité de départ en cas de non-réélection. Certains scrutins valent en effet C4 sans préavis… Il s’agit, toujours en théorie, d’éviter la tentation de coupables compromissions anticipées en vue de se recaser.

Ce parachute (plus ou moins) doré, pour utiliser la terminologie qui prévaut dans le monde des affaires, doit permettre à l’intéressé de ne pas se retrouver à la rue avant de pouvoir rebondir. Et peu importe que des personnes comme Stefaan De Clercq (62 ans en décembre) ou José Happart (62 ans en 2009) en aient moins besoin, en raison tant de leur âge que de leurs relations, que quelques jeunots encore anonymes dont le zèle politique se trouve brutalement étouffé par des électeurs ingrats. La règle est en effet la même pour tous : l’indemnité de départ est versée pendant deux mois par année d’exercice du mandat, avec un maximum de quatre ans. Le bât blesse quand l’intéressé est en fin de carrière et a droit à une pension complète, comme c’était le cas du “hérisson fouronnais” en 2009. Le vocable “indemnité” en devient totalement abusif. Et plus encore quand il renonce lui-même à son mandat, a fortiori pour “aller sur un plus grand”, comme on dit à Bruxelles. Avec les 180.000 euros annuels qu’il percevra en tant que président de Belgacom, l’ancien ministre de la Justice n’a évidemment pas besoin d’un parachute, puisqu’il ne chute pas !

C’est pour la même raison que la Finlande, Premier ministre inclus, s’est scandalisée du parachute doré que percevra Stephen Elop, le patron de Nokia.

En cause : le rachat de la division des téléphones mobiles par Microsoft, laquelle sera dirigée par… Stephen Elop. Pour changer d’employeur mais sans perdre son job, il touchera la bagatelle de 18,8 millions d’euros ! Un million par milliard que Nokia a perdu en valeur sous son règne, ont grincé certains. On en hésite à accabler des gagne-petit comme Stefaan et José…

Si ces deux derniers cas ont choqué, c’est pour une double raison. D’abord, parce que d’autres ont renoncé à de pareilles indemnités. Dernier exemple en date, parmi les patrons d’entreprises publiques en l’occurrence : Jannie Haek, qui perd la SNCB Holding mais gagne la Loterie nationale. Ensuite, parce que l’accord de gouvernement de la fin 2011 prévoyait précisément que ces indemnités “seront supprimées en cas de démission volontaire en cours de mandat”. Une promesse non tenue, donc. En janvier 2012 par contre, le parlement décidait de diminuer de 5 % le “salaire” de base des députés et de 20 % celui des présidents de la Chambre et du Sénat. Un geste supposé fort, mais qui était finalement à côté de la plaque. Seuls les gens médiocres reprochent aux mandataires publics d’être trop payés dans l’absolu. Ce qui choque, ici comme partout dans le monde, ce sont les cumuls abusifs, les indemnités injustifiées, les conflits d’intérêts inavoués, etc. Sans le vouloir, Stefaan De Clerck aura un peu fait avancer les choses sur ce point.

GUY LEGRAND, Directeur adjoint

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