“Quand la licorne perd sa corne, que reste-t-il ? Un beau cheval ou un âne ?”

Marc Simoncini © DR

Le fondateur du site de rencontres Meetic Marc Simoncini est l’un des entrepreneurs web les plus en vue de France. Interview express sur sa vision de la réussite, des levées de fonds et de la vente de sa start-up.

MARC SIMONCINI. Avant Meetic, j’ai vécu des échecs notamment parce que je n’avais pas assez d’ambition et que je n’ai pas osé emprunter auprès des banques. J’ai développé ma première entreprise en étant un peu “paysan”, c’est-à-dire que j’ai attendu d’avoir de l’argent pour m’équiper. J’attendais d’avoir assez de cash pour acheter un nouveau serveur. Du coup, je travaillais six mois et j’achetais un serveur, puis j’attendais encore six mois et ainsi de suite. Mes concurrents, eux, allaient voir une banque, empruntaient 20 millions et avaient 20 serveurs d’un coup. Donc ils allaient 20 fois plus vite que moi (rires). Je me suis donc trompé en étant trop lent. Je n’étais peut-être pas assez courageux, ambitieux ou inconscient pour emprunter beaucoup d’argent. Il y a deux types d’entrepreneurs : ceux qui vont lever 30 millions d’un coup et aller très vite en espérant que la fusée décolle. Et ceux qui vont mettre 10 ans à fabriquer la fusée sans s’endetter. Ce sont deux visions différentes et je ne sais pas qui a raison…

Pour la plupart de vos projets, vous dites qu’il vous a fallu 10 ans pour réussir. Vous ne croyez pas au succès rapide des (futures) licornes ?

En réalité, 10 ans, ce n’est pas très long. Mais il faut bien 10 ans pour créer un cycle d’entreprise. iFrance, c’était 10 ans. Pour Meetic, il a fallu 10 ans. Idem pour Sensee, cela fera 10 ans, et il me faudra le même temps pour mes vélos Heroin. Les start-up ultra-rapides, je n’y crois pas vraiment, sauf exception. Mais on verra celles qui vaudront vraiment de l’argent à la fin et se feront racheter. Je pense qu’il y a des licornes qui vont perdre leur corne. Après, à voir si cela fait un joli cheval ou… un âne. En réalité, on ne connaît la valeur de ce que l’on crée qu’au moment où l’on vend. Avant, c’est du vent.

Du coup, l’objectif pour un entrepreneur,c’est forcément l'”exit” ?

Non, bien sûr que non. Il y en a pour qui c’est l’objectif, mais je pense que ceux-là se plantent. Moi, j’ai toujours créé les choses pour défendre une cause – diminuer le prix des lunettes par exemple – et pas uniquement pour le business. Malheureusement, le maître-étalon pour juger le succès d’une start-up, c’est l’argent qu’elle gagne ou l’argent qu’elle vaut. C’est triste à dire mais c’est comme ça.

Néanmoins, vous avez déjà déclaré que quand vous créez une start-up, vous avez toujours en tête une idée de l’acheteur à qui vous pourriez la revendre…

Pour certains, la start-up est le projet de leur vie et, toute leur vie, ils travailleront pour cette start-up. Moi, ce n’est pas mon cas parce que je suis plus vieux et parce que je sais que je n’aime pas m’occuper d’un projet pendant de plus de 10 ans. Donc, quand je monte un business, je me demande toujours qui cela pourra intéresser pour continuer l’aventure. Cela a marché pour Meetic. Du coup, j’en ai fait une généralité. Et quand j’ai proposé Ouicar à la SNCF, je me doutais que ce serait un acteur du transport qui allait reprendre la start-up. Mais ce n’est pas parce que je l’imagine que je vais y arriver. C’est un pari que je fais. Et pas forcément un conseil que je donne.

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