Trends Winter University: 70 patrons du numérique belge près des volcans d’Islande

Ces patrons ont libéré du temps pour embarquer vers l’île nordique et y partager quatre jours intenses, ‘‘entre pairs’’. © D.R.
Christophe Charlot
Christophe Charlot Journaliste

Pendant quatre jours, les plus grands entrepreneurs du numérique belge se sont retrouvés en Islande, pour un moment suspendu. Entre workshops, “keynotes” inspirants et découverte des geysers et des éléments naturels de l’île nordique, la Trends Winter University a, une nouvelle fois, confirmé son statut d’événement tech incontournable.

Ils ne pouvaient espérer territoire plus adéquat pour se retrouver entre entrepreneurs du numérique. Permettant au froid de la glace de côtoyer le feu des volcans, l’Islande constituait un paysage parfait pour la troisième édition de la Trends Winter University, l’événement incontournable des fondateurs de scale-up digitales proposé par les rédactions de Trends-Tendances, en collaboration avec PwC et le cabinet Four & Five. Habitués à naviguer au quotidien entre les difficultés de l’acte d’entreprendre et les joies des succès, ces patrons ont libéré du temps pour embarquer vers l’île nordique et y partager quatre jours intenses, ‘‘entre pairs’’.

L’Islande était un paysage parfait pour la troisième édition de la Trends Winter University.


C’est après avoir voyagé en groupe, découvert les coulées de lave encore fumantes de la dernière éruption à proximité du célèbre Blue Lagoon et au sortir d’une première découverte culinaire locale que la septantaine de patrons de start-up et de scale-up belges ont pu démarrer les activités académiques de cette grand-messe spécialisée.


Zhong Xu a ouvert le bal sur un ­keynote inspirant. L’homme est aujourd’hui à la tête de Deliverect, une des licornes du nord du pays. Sa solution ‘‘saas’’ ­(software as a service, Ndlr) permet aux restaurateurs et à tous les commerçants qui souhaitent faire de la livraison de centraliser et d’automatiser les commandes. Après sa dernière levée de fonds, de 150 millions ­d’euros, en 2022, Deliverect compte 470 employés répartis un peu partout sur la planète. La firme, qui a déjà permis de traiter pas moins de 500 millions de repas dans le monde, dessert près de 50.000 clients. L’entrepreneur est revenu, sans langue de bois, sur le parcours de sa licorne et les défis relevés. Il a montré, par l’exemple, comment (et pourquoi) il était important de sortir de sa zone de confort, et expliqué la manière dont il s’y était pris pour ‘‘aller vite’’ avec Deliverect. Car selon lui, la vitesse est essentielle à la réussite, sur un marché comme le sien.

Lancer une start-up globale

Se sont ensuite succédé, durant deux matinées, une série de tables rondes en plus petits comités. Les participants pouvaient en effet choisir d’aller écouter plusieurs entrepreneurs, que des journalistes de Trends et de Trends-­Tendances interrogeaient sur des thématiques ciblées et concrètes de la vie des start-up et des créateurs d’entreprise. Ainsi Sébastien de Halleux, entrepreneur belge à succès aux Etats-Unis, a-t-il détaillé comment, avec Playfish, ses associés et lui ont imaginé une ‘‘start-up globale’’. C’est-à-dire comment ils se sont dès 2007 lancés à l’assaut du marché du jeu vidéo sur trois continents – les Etats-Unis, l’Europe et la Chine – à la fois. Il a expliqué pourquoi il a, à l’époque, fait naître trois hubs créatifs différents éparpillés dans le monde, la première de ses motivations étant liée au recrutement de talents, un des points que ses cofondateurs et lui avaient identifié comme source de problème potentiel au moment de faire grandir leur boîte. Il a aussi proposé une table ronde inspirante sur les raisons qui imposent de faire des choix difficiles au quotidien, quand on poursuit une immense ambition.


Simultanément, Jurgen Ingel, investisseur via Smartfin et ancien entrepreneur à succès (il a cofondé et revendu sa plateforme de paiement Clear2Pay), détaillait les ‘‘nouvelles manières’’ de lever des fonds, dans un contexte où les tours de table se compliquent. En effet, comme l’avait anticipé un des plus gros fonds mondiaux, Sequoia, l’argent disponible pour les start-up et les scale-up de la tech se fait bien plus rare : les levées auraient diminué de moitié au niveau mondial, la Belgique ne faisant pas exception à la règle… Parallèlement, Jonas Dhaenens, fondateur de Team.Blue, une licorne flamande spécialiste de l’hébergement (autrefois Combell), a exposé sa politique d’acquisitions, lui qui assume cette responsabilité au sein de son entreprise depuis qu’il en est le président.

De 0 à 200 commerciaux

De son côté, Laura Warnier a captivé l’audience en dévoilant la stratégie de développement des équipes de vente qu’elle a mise en place au sein de la start-up Go Student. L’oratrice fut une des premières employées de la scale-up de tutorat en ligne, qui compte actuellement 1.800 personnes. C’est elle qui, en partant de zéro, a créé des équipes de vente qui ont rapidement atteint et dépassé les 200 commerciaux. Autant dire que ses insights sur la manière d’implémenter des équipes sales, au niveau local puis, rapidement, international, ont passionné un public pourtant déjà averti. ‘‘Je vois depuis San Francisco à quel point l’écosystème belge de la tech évolue vite, admire Sébastien de Halleux. Et il était fascinant pour moi de passer quelques jours avec les gens qui font progresser la scène numérique belge, de découvrir leur vision et leur prise de risques pour faire bouger les choses, pas seulement en Belgique mais même à l’international. Et d’avoir du temps qualitatif pour échanger.’’

Les participants ont été invités à sélectionner ­plusieurs activités ludiques durant lesquelles ils ont eu l’occasion de partager des moments spéciaux ensemble.


Des échanges qui ne se sont pas limités aux discussions et au volet académique. Car après les tables rondes et un keynote prononcé par Sébastien de Halleux, les participants ont été invités à sélectionner plusieurs activités ludiques durant lesquelles ils ont eu l’occasion de partager des moments spéciaux ensemble. Sous un soleil éclatant et un ciel totalement bleu, rare en Islande, ils ont par exemple pu admirer la cascade de Gullfoss. Ces ‘‘chutes dorées’’, qui font partie de l’emblématique Cercle d’or, sont une des attractions les plus spectaculaires de l’île. Ces cascades impressionnantes composées de deux sauts, dont un de 21 mètres de haut, témoignent de la force nécessaire à l’eau pour se frayer un passage vers les gorges. Comme l’eau de cette cascade, l’entrepreneur est poussé à avancer et à s’adapter aux éléments, au marché, aux besoins en mutation constante des clients… Les participants ont aussi pu faire du snowmobile sur un glacier, du snorkeling dans une eau à 4°C en plein cœur du Cercle d’or, ou marcher dans un tunnel de lave. ‘‘Ce sont des expériences incroyables, qui créent des liens entre entrepreneurs !, s’exclame Jean-Charles Velge, cofondateur de Qover. Je trouve une valeur immense dans ces quatre journées passées en compagnie de gens qui rencontrent les mêmes problèmes que moi. De l’extérieur, l’entrepreneuriat est glamour, mais c’est aussi brutal de l’intérieur. Pouvoir parler de ce que l’on vit avec des gens qui passent par les mêmes étapes et les mêmes problématiques est hyper-précieux. Dans cet environnement extraordinaire, on vit des moments d’échanges et d’apprentissage qui ne sont pas possibles ailleurs de cette façon. J’ai pu, là-bas, avoir des échanges que je ne pourrais jamais avoir avec personne ailleurs. Ce n’est pas du simple networking !’’

Pont rare

Lorenz Bogaert, serial entrepreneur flamand de la tech (il a entre autres fondé Netlog), est lui venu témoigner de ses expériences de ‘‘pivot’’. L’intérêt d’être de l’aventure était aussi ‘‘d’apprendre, admet-il. Même en tant que serial entrepreneur, j’aime apprendre de mes pairs durant un événement comme celui-ci. Pendant mon parcours, j’ai commis des erreurs, les autres aussi. Echanger sur tout cela est riche, pour nous en tant qu’orateurs mais aussi pour les entrepreneurs qui n’ont pas encore franchi les mêmes étapes.’’


Par ailleurs, comme le souligne Sébastien Deletaille, CEO de Rosa, ‘‘ce voyage annuel est le seul endroit où les scènes flamande et francophone de la tech se rencontrent. C’est une des grandes valeurs ajoutées de la Trends ­Winter University. Et comme la scène flamande est plus mature, on apprend énormément d’elle.’’ L’événement, organisé par ­Roularta Media Group avec le soutien de PwC, rassemble en effet depuis trois ans l’écosystème du numérique en Belgique, tant francophone que néerlandophone. Un fait rare puisque, malheureusement, ces écosystèmes sont encore très cloisonnés. Les rencontres d’hiver attirent désormais, ­notamment pour cette raison, des habitués comme Jan Hollez ­(Deliverect), Jorik Rombout (Rombit), Sébastien Deletaille (Rosa), Thomas Goubau ­(Q7 Leaders et WeLoveFounders), Matthias Gerooms (OTA Insight), mais aussi de nouveaux visages, dont, cette année, les patrons des scale-up francophones Sortlist^, Urbantz et Qover. Lesquels ont tous d’ores et déjà manifesté leur intérêt à l’idée de se retrouver dans un an, probablement dans un autre lieu. z

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