Le robot qui s’auto-répare

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Seppe Terryn, doctorant de la VUB, expérimente la capacité de robots à s’auto-guérir grâce aux propriétés de nouveaux matériaux élastomères. Ces robots “mous”, autonomes et plus sûrs pour l’être humain recèleraient un énorme potentiel durable et économique.

L’idée

Elle a jailli lors d’un réveillon de Noël. Autour du sapin : Seppe Terryn, étudiant en ingénierie électromécanique, Herman son père, professeur en sciences des matériaux, et Bram Vanderborght, son cousin et professeur de robotique. Ce trio de la VUB a l’idée d’unir ses spécialités pour concevoir des robots capables de s’auto-réparer. Seppe Terryn en fait sa thèse de doctorat. Il en explore ensuite le potentiel, à travers des expériences soutenues par la VUB alliée à d’autres universités européennes. Les premières applications apparaissent, sous la forme de prototypes de muscles, de mains ou de grappins souples.

De toutes les matières, c’est la molle que je préfère

Les automates industriels sont souvent lourds, durs et dangereux. D’où l’intérêt de robots mous. ” Dans le monde industriel, on pourrait envoyer à la casse les machines lourdes, disproportionnées, rigides et dangereuses et les remplacer par des robots plus compacts, mieux dimensionnés à chaque tâche, légers, moins énergivores et plus sûrs dans les interactions avec les humains car plus mous, plaide le chercheur. Ils seraient parfaits pour l’emballage alimentaire et l’agriculture, avec des pinces et grappins mous pouvant saisir des fruits, légumes et autres denrées délicates sans les endommager, ou dans des secteurs nécessitant des manipulations délicates (chimie, pharmacie, etc.). Leur deuxième atout tient à leurs composants plus souples, flexibles et surtout auto-réparateurs. Leurs propriétés reconstituantes sont synonymes de moins d’entretien et d’une plus grande longévité du matériel. ”

Le robot qui s'auto-répare
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Comme notre peau, le robot cicatrise

La molesse a un prix : la fragilité et vulnérabilité des composants. ” D’où la recherche d’une solution proche de celle du corps humain, de ses tissus et de sa peau, explique Seppe Terryn. Pour le robot, le moyen de s’auto-réparer réside dans les polymères mous dits de Diels-Adler “. Le jeune chercheur a ainsi fait subir à différents éléments (mains, doigts, pinces) des incisions, lésions et perforations. Et obtenu des guérisons ! Ceci grâce à deux types de polymères. Pour l’un, la réparation nécessite un passage de la partie endommagée dans un four à 90° pendant 40 minutes puis un repos de 24 heures. Pour l’autre, la régénération se déroule carrément à température ambiante, suivie d’un repos de quelques heures à quelques jours. Dans les deux cas, les ” blessures ” ressortent complètement ” cicatrisées ” sans perte de tonus ou de qualité. ” Comme quand un humain se blesse, son corps déclenche des processus réparateurs (coagulation, nouvelles cellules, etc.), indique le doctorant. Nos matériaux auto-cicatrisants font quasiment pareil pour revenir à leur état d’origine grâce à des processus favorisés par la lumière et la chaleur. ”

Le robot qui s'auto-répare
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Auto-diagnostic

Seppe Terryn aspire vraiment à étendre sa trouvaille à un maximum d’applications robotisées, non seulement humanoïdes mais aussi de robotique prosthétique, d’exosquelettes, etc. La deuxième étape, en cours de recherche, est de parvenir à les affranchir de l’intervention humaine pour s’auto-réparer. La solution : les doter d’un monitoring autonome. ” Le projet Shero auquel nous participons avec d’autres universités (www.sherofet.eu) a l’ambition de créer un prototype qui peut non seulement guérir mais aussi détecter de manière autonome l’endroit où il a subi un dommage et déclencher lui-même son auto-réparation. Le but est qu’à l’arrivée, il puisse diagnostiquer si les dommages ont bien été complètement et correctement guéris. Ce prototype sera probablement prêt dans trois ans. Après, nous pourrons commencer la valorisation de nos découvertes à travers des produits industriels et commerciaux. En mission de sauvetage ou dans l’espace, ces nouveaux robots pourraient faire une sacrée différence ! ”

Par Fernand Letist.

En chiffres.

50 euros

En matériel, le coût d’une main de robot soft, ce qui est très bon marché. En production de masse, le coût du matériau devient négligeable.

7 jours

La durée maximum de revalidation pour un dégât grave (sectionnement d’un doigt) survenu à un robot composé de polymères mous de Diels-Adler.

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