Bpost risque de perdre sa concession presse ? “C’est une bonne nouvelle”

Xavier Bouckaert, CEO de Roularta et président de WeMedia, la fédération qui regroupe les magazines, est loin d’être contrarié par la perte possible de la concession presse par bpost. Il nous explique pourquoi.

Que pensez-vous du fait que la concession presse pourrait échapper à bpost ?

C’est une bonne nouvelle ! Tout simplement parce que les prix qui sont mentionnés dans la concession des magazines sont totalement irréalistes. Ils nous imposent des tarifs sans nous consulter et nous on doit juste payer la facture ?!  Or on ne veut pas des tarifs de la concession. Ils sont inacceptables. Et même si on le voulait, on ne pourrait pas. Ce sont des millions et des millions d’euros qui vont s’ajouter l’année prochaine. C’est tout simplement impossible. Surtout, et c’est aussi mon principal reproche, que ce ne sont pas les prix du marché. Quand on voit ce que l’on va payer aux Pays-Bas et en Allemagne l’année prochaine – deux pays qui, rappelons-le, n’ont pas de subsides – on ne comprend juste pas ce qui se passe en Belgique. Dans ces deux pays aussi cela augmente, mais que de 13%. Alors, qu’en Belgique, on va payer deux fois plus que cette année. Et personne n’est capable de nous dire pourquoi. C’est hallucinant.

Et donc qu’envisagez-vous pour l’avenir ?

Cela fait quelque temps déjà qu’on essaie de trouver des alternatives avec d’autres partenaires en dehors de cette concession. Ce qui veut dire que même pour bpost, si elle n’est pas reprise dans la concession, ça peut être une opportunité, voire une bonne affaire. Parce qu’on va pouvoir alors, s’ils le souhaitent, négocier de meilleurs prix. Après tout, pour bpost, les magazines peuvent être glissés dans le courrier ou avec la distribution de paquet. Cela ne représente pas un gros travail, ni beaucoup de coûts supplémentaires. En tout cas pas l’équivalent des prix de la concession. Et pour les lecteurs cela ne change rien, car il ne devrait pas y avoir une perte de qualité dans la livraison. Mais bon, je ne sais pas quelle est leur stratégie et tout va dépendre des prix.

La fin d’une concession par bpost est donc moins catastrophique pour les magazines que pour la presse quotidienne ?

Pour les magazines, le prix est de toute façon beaucoup plus problématique que pour la presse quotidienne qui bénéficie de prix plus concurrentiels. En ce qui concerne la qualité de la livraison, c’est-à-dire l’assurance d’une livraison matinale précoce, celle-ci revêt moins d’importance pour les magazines. Par ailleurs, on avait déjà mis toute une logistique en place pour que nos magazines soient classés et prêts à être livrés. En gros, ils n’ont presque plus rien à faire si ce n’est le donner au facteur. Et toute cette logistique peut tout à fait être adaptée à un autre distributeur sans une trop grande perte de qualité.

L’idée est donc de bypasser la concession ?

Oui, en quelque sorte. Il faut savoir que pour les distributeurs qui veulent livrer les magazines, la concession est super intéressante, car les prix sont de facto élevés. Le seul point sur lequel les candidats pouvaient se démarquer était la facturation ou non de la livraison dite du jour d’après, ou lieu d’une livraison dans les trois jours. Une donnée importante pour les magazines d’actualité et donc Proximi a probablement dû jouer là-dessus pour obtenir le marché. Néanmoins, au vu de ces prix complètement absurdes, on peut tout à fait se passer de la concession. On cherche donc à établir une relation préférentielle avec un candidat qui ne s’est pas porté candidat à la concession. Bien sûr, on est assez réaliste pour savoir qu’on ne pourra pas certainement distribuer tout le volume que nous avons via un autre distributeur unique. Mais rien n’empêche de confier un volume important à un acteur et de laisser les régions plus difficiles à couvrir à celui qui aura la concession.

La concession garantit aussi, en principe, la livraison dans les régions moins facilement accessibles…

Oui et c’est pourquoi on a toujours besoin à l’heure actuelle d’une concession pour les territoires moins accessibles. Par exemple les petits villages reculés. Pour eux, ces subsides sont un peu nécessaires pour rendre la livraison intéressante pour les services de livraison. Mais ces subsides sont aussi mis en question puisque le gouvernement fédéral se dit que de toute façon, tout devient digital. Malheureusement, les magazines ont un autre rythme. C’est ce qu’on leur explique depuis un an, mais ils ne veulent toujours pas comprendre. La digitalisation est en marche depuis plusieurs années, sauf que c’est un processus très lent, très graduel. Je pense qu’il faudra encore au moins dix ans avant que les magazines soient lus de façon complètement digitale. Et d’ici là les magazines auront encore besoin d’être livrés.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content