L’héritage de la discorde: les fabriques d’églises de Flandre détiennent un “trésor” estimé à 
370 millions d’euros

Closeup of a Crucifix in the Collegiate Church of Our Lady (Collégiale Notre Dame de Dinant), a 13th century gothic Dinant Cathedral. © Getty Images

Depuis l’émission “Godvergeten” – “Les oubliés de Dieu” –, un documentaire choc portant sur les abus sexuels commis au sein de l’Eglise catholique, le financement des cultes fait, en Flandre, l’objet de discussions passionnées. Un récent héritage est venu relancer le débat.

Une fabrique d’église de l’entité de Saint-Trond a en effet hérité d’une somme de 1,2 million d’euros qui a été convertie en appartements ; par la suite, elle est allée réclamer des subsides de fonctionnement à la commune. Le procédé est parfaitement légal. Les communes, en effet, ne peuvent obliger les fabriques à puiser dans leurs réserves pour couvrir leur déficit d’exploitation mais dans l’opinion, cet interdit passe d’autant plus mal que certaines d’entre-elles sont fort riches. Régulièrement, des propositions de décret sont introduites afin de faire sauter cette disposition, sans jamais aboutir.

Hasard ou coïncidence, la “révélation” de cet héritage précède de quelques jours la publication d’une étude commanditée en 2023 par Bart Somers, alors en charge des Affaires intérieures, sur les obligations imposées aux pouvoirs locaux par un vieux décret napoléonien. Celui-ci impose en effet aux communes de subvenir à l’insuffisance des revenus de la fabrique pour les charges relatives aux frais du culte et de l’entretien des églises, soit, pour la Flandre, une charge annuelle d’environ 60 millions d’euros, ce qui représente, compte tenu du fait que 94% de ces subsides vont à l’Eglise catholique, un débours moyen de 188.000 euros par commune.

Ensemble, les fabriques d’église de Flandre détiennent un “trésor” estimé à 
370 millions d’euros.

Quelles solutions ?

Forte de quelque 400 pages, l’étude commandée à l’Université d’Anvers propose trois scénarios. Le premier consiste à lever l’interdit évoqué plus haut. Ensemble, les fabriques d’église de Flandre détiennent un “trésor” estimé à 370 millions d’euros, constitué de 280 millions d’investissements et de 90 millions de liquidités. S’y ajoute un patrimoine immobilier dont, à l’heure actuelle, personne ne connaît l’ampleur exacte. Ces millions étant fort inégalement répartis, les auteurs proposent l’instauration d’un mécanisme de solidarité entre fabriques. “Il n’y aura plus, à terme, ni capital, ni revenus”, s’est déjà insurgé Kerknet, le portail de l’Eglise en Flandre.

Une deuxième piste est celle d’un plafonnement des interventions, à l’image de ce qui se pratique déjà à Bruxelles, où les pouvoirs locaux ne comblent que 30% des déficits. Ayant repris en novembre dernier le portefeuille jusque-là détenu par Bart Somers, Gwendolyne Rutten récuse cette dernière solution en raison de son caractère impératif. La ministre préfère en effet laisser les communes libres de décider en la matière.

La troisième piste est celle d’une simplification. Le financement des communautés de croyants relève, par exemple, des villes et des communes lorsqu’elles sont catholiques, et des provinces lorsqu’elles concernent d’autres religions. Les ministres des cultes de leur côté sont payés par le SPF Justice, ce qui a coûté en 2022 quelque 98 millions d’euros. Mais pour simplifier, il faut revoir la Constitution et Bart Somers n’a jamais caché son désir de regrouper dans une seule main – de préférence, flamande – toutes les matières relatives à la religion.

Guillaume Capron

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