Recherche rendements désespérément: nos conseils pour 2015

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Pour dénicher les placements juteux, les investisseurs devront faire preuve d’une grande créativité.

Quel sera l’investissement le plus prisé en 2015 ? Les actions et les obligations, qui constituent la principale composante de la plupart des portefeuilles, semblent extrêmement onéreuses. Par exemple, les rendements de certains titres d’emprunt d’Etat à court terme sont déjà négatifs : leur prix est donc supérieur à ce qu’ils rapporteront en intérêt et principal. De même, l’indice S&P 500 a battu des records à plusieurs reprises en 2014. Les cours des actions sont nettement supérieurs à leur moyenne à long terme par rapport aux bénéfices.

Dans de telles circonstances, les investisseurs n’ont que peu de choix. Leur réponse jusqu’alors a été de dénicher, dans les marchés d’actions et d’obligations, les rares recoins où il est encore possible d’obtenir des rendements qui ne soient pas dérisoires, parce que les actifs en question sont très risqués.

En 2014, ils se sont rués sur les obligations d’Etat de pays comme la Côte d’Ivoire et la Grèce, qui étaient en cessation de paiement seulement quelques années auparavant. Ils ont aussi jeté leur dévolu sur des obligations de sociétés, dites “à haut rendement”, émises par des entreprises aux assises financières relativement fragiles, en contrepartie de prix si élevés qu’on ne peut plus vraiment attribuer cette qualification à ces titres.

Ce comportement ne mourra pas tout à fait. On assistera à une certaine réhabilitation, par exemple, des créances les plus douteuses qui soient : “le crédit structuré”. Des instruments financiers connus pour avoir engendré la crise financière, comme les titres adossés à des actifs, appartiennent à cette catégorie. Depuis la crise, ils sont devenus des anathèmes pour la plupart des investisseurs. Mais les banques centrales ont très envie de les remettre au goût du jour comme moyen pour les banques de rétrocéder des prêts, et ainsi de disposer de la marge de manoeuvre financière nécessaire pour en proposer de nouveaux. D’ailleurs, la Banque centrale européenne a promis d’en acheter en quantité : une initiative qui dynamisera ce segment.

“Bêta intelligent”

Dans l’ensemble, cependant, les investisseurs feront marche arrière dans leur longue ascension de la “courbe des risques”. Certains se sont déjà mis à liquider leur dette à haut rendement.

Les obligations hybrides seront une autre victime de cette nouvelle tendance. Ces cousins peu recommandables des obligations privées ont vu leur prix augmenter énormément ces dernières années, alors que les gestionnaires d’actifs s’étaient lancés dans une quête désespérée de hauts rendements. Mais les obligations hybrides, en raison des risques supplémentaires qu’elles font courir (soit elles se convertissent en actions soit l’émetteur suspend le paiement des intérêts s’il rencontre des difficultés) vont commencer à ressembler à un mauvais compromis.

Sur les marchés d’actions, le moyen le plus simple pour les investisseurs d’augmenter leurs gains sera de faire baisser leurs coûts.

Les très faibles rendements ont déjà accéléré le désintérêt pour les fonds soumis à une gestion active onéreuse, en faveur des fonds à gestion passive, qui ont pour simple ambition d’être en phase avec le marché dans son ensemble. Une tendance va se renforcer : la quête d’un “bêta intelligent”, autrement dit de stratégies d’investissement plus sophistiquées permettant de suivre un marché élargi, qui ne sont cependant pas associées aux lourdes commissions facturées par les fonds d’arbitrage.

Malheureusement, ces stratégies ne seront pas d’un grand secours lorsque les taux d’intérêt commenceront à augmenter, ce qui sera le cas en 2015 aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne tout du moins. Quand les taux augmentent, les prix des obligations chutent automatiquement. Théoriquement, la hausse des taux devrait passer pour une bonne nouvelle en ce qui concerne les actions, dans la mesure où elle annonce enfin un rétablissement des économies concernées. Mais à en juger par les cours actuels des actions, cette bonne nouvelle semble avoir déjà été prise en compte. En attendant, les emprunts coûteront plus cher aux entreprises ; celles qui sont lourdement endettées auront plus de mal à assurer le service de leur dette. Les investissements tout en haut de la courbe des risques sont naturellement ceux dont les prix sont susceptibles d’enregistrer la baisse la plus brutale.

Investissements “non corrélés”

Par conséquent, on assistera également en 2015 à une multiplication des investissements dits “non corrélés”, autrement dit qui ne suivent pas l’évolution des prix des obligations et des actions. En général, c’est l’argument de vente en faveur des produits de base, mais compte tenu de leurs mauvaises performances récemment (comme presque de tout temps), ils ne connaîtront guère de renouveau. La demande d’obligations catastrophes à haut rendement, qui rapportent moins lors de la survenance de sinistres résultant d’une catastrophe naturelle, de même que la demande de financements de litiges, des opérations dans le cadre desquelles des investisseurs souscrivent à des procès susceptibles de donner lieu à d’importants règlements, ne fléchiront pas. Mais ces minuscules marchés ne peuvent satisfaire la masse des investisseurs.

Les capitaux se porteront plutôt sur d’autres “actifs réels”, autrement dit sur du tangible, et non des instruments financiers abstraits. L’immobilier est l’actif réel le plus courant ; les biens immobiliers les plus appréciés seront ceux qui sont à l’abri des fluctuations économiques à court terme, comme les bâtiments commerciaux assortis de baux à long terme. De même, les investisseurs se précipiteront sur les infrastructures, les terres agricoles et les plantations forestières, qui génèrent toutes des revenus protégés de l’inflation. Les vergers d’amandiers, par exemple, sont un investissement en vogue.

Puis il y a les investissements liés à la volatilité elle-même. On peut acheter un assortiment d’instruments dérivés et de produits négociés en Bourse qui rapportent en cas de hausse de l’indice le plus courant de la volatilité, le VIX. Ces investissements sont cependant soumis à des commissions extrêmement élevées, car ils nécessitent généralement un renouvellement fréquent des contrats standardisés à court terme.

Les investisseurs prudents risquent de se méfier d’une telle approche qu’ils pourraient juger obscure. Ils se rabattront plutôt sur des actifs qui, certes, perdent souvent de la valeur (à tout le moins, en tenant compte de l’inflation), mais évitent que quiconque y laisse sa chemise : les liquidités.

Edward McBride (The Economist)

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