Wallonie-Santé arrive au bout de son enveloppe initiale

Legia Park Wallonie-Santé a déjà investi 22,5 millions d’euros dans ce futur pôle biotech. © PG
Christophe De Caevel
Christophe De Caevel Journaliste Trends-Tendances

La structure dédiée au financement des institutions de soins a déjà investi dans une soixantaine de projets à travers la Wallonie. Ses moyens pourraient être amplifiés lors de la prochaine législature.

« Nous sommes l’une des rares business units de Wallonie Entreprendre à être profitable. » Philippe Buelen n’est pas peu fier des résultats de l’outil de financement des institutions de soins qu’il dirige depuis sa création en décembre 2018. Wallonie-Santé a récolté, l’an dernier, 1,2 million d’euros sur les différents prêts accordés et dégagé ainsi une marge nette de 115.000 euros. « Ce chiffre sera au moins doublé en 2023 », assure le CEO de Wallonie-Santé.

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“La plupart des dossiers n’auraient pu aboutir sans notre intervention.” PHILIPPE BUELEN, CEO DE WALLONIE SANTÉ

Cela dit, pour une telle structure, l’impact sociétal prime sans doute sur les résultats strictement financiers. Cet impact est de plusieurs ordres. D’abord, Wallonie-Santé finance des centres d’hébergement pour personnes handicapées, des maisons médicales, des maisons de retraite ou, tout récemment, un centre de périnatalité en Brabant wallon. « La plupart de ces dossiers n’auraient pu aboutir sans notre intervention, précise Philippe Buelen. Notre apport –généralement des prêts subordonnés, du quasi-capital donc- rassure les banques, pour lesquelles les soins de santé sont un segment risqué. Nous contribuons ainsi à l’amélioration des infrastructures et de la qualité de vie des résidents. »

Consolider les écosystèmes

Un produit spécifique (Start-Santé) a été développé à l’intention des structures émergentes. L’idée est de leur octroyer une avance de trésorerie, afin qu’elles puissent commencer à fonctionner sans devoir attendre le versement des subsides promis par l’Aviq (Agence pour une vie de qualité, le département Santé et Aide aux personnes de l’administration régionale) ou tout autre pouvoir public. Wallonie-Santé vient ainsi d’accorder un prêt Start-Santé de 60.000 euros à une initiative d’habitation protégée (prise en charge de personnes ayant connu des difficultés psychiatriques et dont les symptômes sont stabilisés) en Brabant wallon. Celle-ci pourra donc démarrer ses activités très rapidement, au bénéfice des neuf jeunes de 16 à 25 ans qui y séjourneront, avec tout l’accompagnement requis.

Les interventions de Wallonie-Santé permettent ensuite de consolider des écosystèmes de santé en Wallonie. L’organisme est par exemple le premier bailleur de fonds (22,5 millions en prêts) du Legia Park à Liège, piloté par Noshaq et qui vise à implémenter des start-ups et des activités de recherche, avec une connexion immédiate avec l’hôpital du Mont-Legia. Ces jeunes entreprises évoluent bien entendu avant tout dans le domaine des sciences du vivant. « Nous venons par ailleurs de marquer notre accord de principe pour un prêt subordonné de dix millions d’euros, en vue de faciliter la mutualisation des services au sein des hôpitaux du réseau Hélora à Mons, ajoute Philippe Buelen. Ce projet permettra de libérer des espaces au profit des activités médicales. » Hélora regroupe sept sites hospitaliers (CHU Ambroise Paré, Jolimont, CHU Tivoli…) et souhaite réunir les activités de cuisine, de buanderie et de magasins sur un seul site à Mons. L’objectif est de garantir la maîtrise et la qualité de ces services, en les internalisant au lieu de recourir à des prestataires externes. Ce logipôle serait une première en Belgique, mais des structures similaires existent déjà en France et en Allemagne.

Enfin, Wallonie-Santé octroie des prêts verts, pour aider les institutions de soins à investir dans les énergies renouvelables ou dans les économies d’énergie. Quelque 28,6 millions d’euros ont déjà été engagés dans cette optique. Wallonie-Santé a notamment conclu un partenariat avec CAP 48 et la banque CBC, en vue de financer des travaux énergétiques dans cinq institutions d’accueil de personnes handicapées. « Nous leur octroyons des prêts bonifiés, dans le respect des règles européennes, qui permettent à ces institutions sociales d’investir en vue de réduire leurs factures d’énergie, résume Philippe Buelen.

Depuis 2019, Wallonie-Santé a conclu 68 dossiers d’investissement au bénéfice d’institutions de soins. « Nous avons réussi à créer une dynamique, se félicite le CEO. Au départ, certains hésitaient, se demandaient à quoi nous servions. Aujourd’hui, les dossiers nous arrivent spontanément. Nous recevons même des demandes pour le financement de crèches mais ce n’est pas –encore- dans le spectre de nos interventions. »

Le succès fait que l’enveloppe initiale de 135 millions sera bientôt épuisée (nous étions à 117 millions fin 2022 et le prêt pour le Logipôle d’Hélora a été décidé depuis). La question se posera au prochain gouvernement wallon (et le cas échéant à Wallonie-Entreprendre) : faut-il réalimenter la pompe ou ralentir le rythme des prêts, en se limitant à la réaffectation des intérêts et remboursements perçus ? Entre les urgences sociales et les difficultés budgétaires de la Région, les arbitrages risquent d’être délicats.

Pour préparer l’échéance, Wallonie-Santé a commandé une étude à PwC. Il en ressort que la structure est effectivement très bien reconnue et appréciée dans le secteur de la santé (secteur qui, rappelons-le, emploie 200.000 personnes en Wallonie). Cela plaide a priori pour un refinancement de l’outil. Si tel devait être le cas, PwC suggère d’accorder la priorité à quatre types d’investissement : les soins à domicile, la santé mentale, les critères ESG et la digitalisation.

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