Un grand coup de pied dans la fourmilière
La cigale wallonne ayant chanté bien des étés va-t-elle se transformer en fourmi ? Ce poncif souvent véhiculé au nord du pays pourrait bien prendre fin. Il n’y a qu’à lire les commentaires surpris des éditorialistes flamands. Le 11 juillet, jour de la fête flamande, la fourmi wallonne veut devenir plus efficace, plus travailleuse et moins dépensière. Tel est le message adressé hier par Georges-Louis Bouchez et Maxime Prévot, lors d’une présentation choc de la DPR et DPC.
Un grand coup de pied dans la fourmilière. Maxime Prévot n’aimera sans doute pas cette expression, mais c’est pourtant bien de cela qu’il s’agit. Pêle-mêle, le gouvernement de centre-droit compte secouer la gouvernance, en limitant le nombre d’élus, en diminuant le nombre de ministres et la taille des cabinets. À terme, le duo veut supprimer le niveau provincial, monstre du Loch Ness de la politique belge.
“Les faits du prince, c’est également terminé”, ont ajouté un Georges-Louis Bouchez et Maxime Prévot, visiblement fiers de leur coup. Le pouvoir discrétionnaire laissé aux ministres en termes de subsides est révolu. Le ministre ne pourra plus, à lui seul, dépenser des millions d’euros pour soutenir telle ou telle ASBL. Les subsides seront désormais structurés, rationalisés et pérennisés, “pour les associations qui en ont vraiment besoin, tout en réduisant le volume global”, a précisé le président des Engagés sur la RTBF, à Jeudi en Prime.
Au niveau de l’emploi, le duo veut “tout remettre à plat”. Une réforme du Forem est dans les cartons. L’institution devra dorénavant se concentrer sur l’activation. La formation est l’autre révolution culturelle qui est mise en avant : MR et Engagés veulent en finir avec “le morcèlement des structures”, un mal typiquement wallon.
Sur le volet communautaire, l’enseignement n’est pas en reste. Le duo a acté la fin des nominations pour les nouveaux profs : place aux CDI, comme dans toute autre entreprise, “avec l’activation d’un second pilier des pensions”, ont précisé les deux formateurs. L’autre révolution est la fusion des réseaux officiels et le renforcement financier de l’enseignement libre. “1 enfant = 1 enfant”, a insisté Maxime Prévot. Pour le supérieur, le duo n’a pas encore fait de choix et se laisse trois options : le retour complet au décret Glatigny, un décret paysage amendé, voire un retour pré-paysage.
Sur le plan économique, les intentions sont louables, avec une mesure appelée depuis des lustres par les entreprises : une simplification administrative dans l’obtention de permis. On se dirige également vers une digitalisation des procédures, mais prudence, celle-ci est annoncée depuis des lustres. La nouvelle majorité de centre-droit fait par contre table rase du plan de relance qui sera complètement remodelé. MR et Engagés, plus globalement, veulent en finir avec le saupoudrage wallon.
Au niveau fiscal, Georges-Louis Bouchez a promis qu’aucun nouvel impôt ne serait levé. La vignette automobile, qu’il appelle de ses vœux pour faire payer les navetteurs étrangers, n’impactera pas, promet-il, l’assiette fiscale du Wallon. Il reste à voir comment réagiront la Flandre et Bruxelles. Mais le duo a surtout annoncé la plus grande baisse d’impôt jamais vue en Wallonie : 1,5 milliard d’euros, qui proviennent surtout de la baisse des droits d’enregistrement à 3%, comme en Flandre, pour les primo-accédants, et de la réduction de 50% de toutes les tranches des droits de succession.
Forcément, un tel cadeau fiscal devra se payer. Et il faut le dire, c’est ici le plus grand point d’interrogation de cette DPR et DPC : les finances publiques. L’objectif est lisible, il s’agit de réduire le déficit sur 10 ans en sabrant dans les dépenses publiques. La réalisation est beaucoup plus nébuleuse. Et pour cause, le MR et les Engagés n’ont proposé aucun tableau budgétaire. Il s’agit là de leur plus grand défi et ils seront attendus au tournant : montrer que “rationaliser” et “restructurer” la Wallonie ne sont pas que des mots. Car Maxime Prévot et Georges-Louis Bouchez l’ont promis : il ne s’agira pas d’austérité.
En attendant, les présidents du MR et des Engagés ont certainement réussi leur rentrée. Les promesses de campagne et la volonté de changement se traduisent dans leur programme de gouvernement. Il reste à voir si cela se fera aussi dans la réalité. Ce quasi sans faute souffre toutefois d’un manquement évident : la relégation complète du chapitre dédié à l’environnement, annoncé à la va-vite, et très peu consistant. C’est une erreur, sur le fond et la forme : cela donne des munitions gratuites à l’opposition.
Accord de gouvernement en Wallonie et en FWB
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici