Liège, métropole en quête d’ambitions

Liège vue aérienne 2007
Vue partielle du centre de Liège

Vingt ans après sa création, le GRE-Liège se cherche un nouveau souffle. Cette structure qui doit piloter le redéploiement économique de la métropole liégeoise tient en tout cas déjà son nouveau pilote. Reste à voir s’il parviendra à fédérer toutes les forces vives locales autour d’une grande ambition: faire de Liège une des grandes métropoles européennes de la connaissance et du savoir d’ici 2030.

Il est de retour à la maison. Après deux années mouvementées à Namur en tant que chef de cabinet de Christophe Collignon, Jean-Christophe Peterkenne (56 ans) retrouve la Cité ardente. Avec un défi de taille: donner un nouvel élan aux forces vives liégeoises en les fédérant autour de l’un ou l’autre grands projets métropolitains.

Pour y parvenir, il a reçu les clés du GRE-Liège (Groupement de Redéploiement Economique du pays de Liège) en décembre dernier. Un outil qui a connu des hauts et des bas depuis sa création en 2004. Et qui, force est de le constater, avait clairement besoin d’un nouveau souffle. “J’arrive en toute humilité, je n’ai pas de baguette magique, souligne celui qui succède à Jean-Luc Pluymers, le directeur historique du GRE, parti à la retraite. Je souhaite refaire du GRE cet ‘ensemblier’ au sein duquel opérateurs privés et publics élaborent des projets économiques innovants et porteurs. L’heure est venue de redéfinir un projet collectif pour Liège – je parle bien du territoire provincial –, de se refixer un cap. J’arrive donc avec une certaine vision, en étant conscient de nos forces et faiblesses, pour que l’on détermine rapidement un projet ambitieux. Il est important d’écrire une nouvelle histoire pour Liège. Nous avons le scénario et les acteurs, il faut maintenant mettre cela en musique.”

Jean-Christophe Peterkenne
Jean-Christophe Peterkenne © PG

L’heure est venue de redéfinir un projet collectif pour la métropole liégeoise, de se refixer un cap.” JEAN-CHRISTOPHE PETERKENNE

Cet homme de réseau au carnet d’adresses particulièrement épais a en tout cas reçu certaines garanties. Il ne s’installe pas dans un placard doré. Les besoins sont là. Son rapide tour d’horizon effectué ces dernières semaines montre que les milieux économiques, académiques et politiques sont clairement demandeurs d’une vision commune. La présence de tous les poids lourds politiques liégeois (Bacquelaine, Daerden, Demeyer, Greoli, Henry, Jeholet, Morreale) pour examiner la quarantaine de candidatures qui sont parvenues pour ce poste le démontre notamment. “Je ne me serais pas engagé dans cette voie si je ne sentais pas que nous sommes à un momentum important et que tout le monde veut avancer dans la même direction, précise celui qui a porté la candidature de Liège Expo 2017. Il y a une vraie volonté de relancer la dynamique du GRE, de définir les orientations stratégiques communes du développement liégeois. La tâche n’est donc pas mince mais elle est passionante!”

Viser le triple A

Les bases de cette stratégie ont en tout cas déjà été définies par Jean-Christophe Perterkenne. Si les ambitions se dressent désormais à l’horizon 2030, le lancement d’une grande opération de séduction et de consultation des principaux acteurs a été donné le 8 mars lors d’un événement au Mosa Ballet School rassemblant le petit monde liégeois qui compte. Les invités y ont découvert les trois principaux objectifs qui vont délimiter le futur champ d’action, une sorte de “Triple A” pour le territoire liégeois.

“Le clin d’œil me paraissait judicieux, sourit celui qui a installé ses bureaux au troisième étage de la Grand Poste. Il y a trois fondamentaux évidents, qui sont de véritables guidelines: il faut augmenter le taux d’emploi de l’économie liégeoise, il faut accroître la notoriété et la compétitivité du territoire de même qu’accélérer la transition vers une économie décarbonée.” De grands concepts qu’il va falloir faire atterrir pour coller avec la réalité de terrain. Sans quoi l’adhésion sera relativement faible.

Pour y parvenir, Jean-Christophe Peterkenne a donc sorti de son chapeau une vision commune qui doit rassembler le Grand Liège. A savoir bâtir une des grandes métropoles européennes de la connaissance et du savoir. “C’est vraiment dans cette voie que nous devons nous distinguer. L’objectif pour cette métropole ‘à forte intensité de connaissance’ est de faire en sorte qu’à l’avenir tous les actes, toutes les décisions, tous les projets structurants de toutes les parties prenantes soient conçus pour atteindre au moins un des trois objectifs stratégiques du Triple A. Liège, cap 2030!, c’est donc un engagement et une ambition de bâtir une métropole ouverte sur le monde, créative et décarbonée!”

Projets rassembleurs

D’ici juillet 2023, la petite équipe de cinq personnes actives au GRE rencontrera et présentera cette stratégie à l’ensemble des acteurs liégeois. Syndicats, intercommunales, Noshaq, ULiège et Hautes Ecoles, pôles de compétitivité, Agoria, CCI, UCM et différents interlocuteurs régionaux seront sollicités. L’idée étant d’identifier d’ici l’automne quelques grands projets rassembleurs autour desquels une dynamique pourra se créer.

“J’imagine qu’il devrait y en avoir entre 10 et 20”, estime Jean-Christophe Peterkenne. L’idée étant que chaque acteur s’interroge sur la manière dont il pourrait répondre aux ambitions de devenir cette métropole du savoir. “Je pense qu’il faut surtout systématiser une approche qui se fait actuellement au cas par cas. Les principaux acteurs se parlent mais le dialogue reste confiné à quelques personnes. Il faut davantage de liant dans ces démarches.”

Einstein et Chertal

L’homme peut en tout cas tirer parti de son expérience comme pilote de Liège 2017 pour démontrer qu’il a la capacité de faire aboutir des projets d’envergure. Car si Astana a, au final, été choisie pour l’organisation, plusieurs projets structurants se sont concrétisés. L’aménagement d’un nouveau quartier à Coronmeuse est un premier élément. Les premiers immeubles sortent de terre alors que la vente des appartements suit un rythme élevé.

Le tram en est un autre. Même s’il a pris du retard, il devrait entrer en service en 2024. Et d’autres vont suivre. “Je ne vais pas citer tous les grands projets auxquels je pense pour l’avenir sinon ce travail collectif n’aurait plus de sens. Mais il y en a néanmoins l’un ou l’autre dont on peut parler. Le Télescope Einstein en est un. L’objectif est de créer le plus grand laboratoire mondial en matière de détection d’ondes gravitationnelles. Un projet développé avec les Néerlandais et les Allemands dans l’Euregio Meuse-Rhin. Il est évident que c’est un dossier emblématique et stratégique dans notre démarche de métropole qui met le savoir en avant. Il coche toutes les cases. Les retombées peuvent être énormes. Nous sommes en concurrence avec la Sardaigne. Une réponse est attendue d’ici 2025. Nous piloterons, à la demande du gouvernent wallon, le projet d’ici là, de manière à mettre le plus de chances de notre côté.”

Parmi les autres dossiers structurants, le projet originel du GRE reste toujours d’actualité. A savoir la réhabilitation des immenses friches industrielles d’ArcelorMittal. Déterminer le devenir de ces sites est un enjeu majeur. “La Wallonie négocie toujours pour acquérir les quatre grandes friches liégeoises (282 ha), précise encore Jean-Christophe Peterkenne. Le GRE a un vrai rôle à jouer pour coordonner l’affectation future de ces sites. La friche de Chertal s’étend sur 180 ha. Vous imaginez bien que les enjeux sont gigantesques et pourraient clairement changer la face liégeoise. Ces exemples démontrent que nous sommes à un tournant de l’histoire liégeoise et qu’il n’y a plus de temps à perdre.”

La discrète structure de la reconversion liégeoise

Fondé en 2004 par le quatuor Michel Daerden, Jean-Pierre Delwart, Didier Reynders, Guy Mathot et des syndicats, le GRE-Liège a directement connu quelques sérieux ratés à l’allumage. Sa création est alors liée à la première annonce de fermeture par Arcelor de la phase à chaud. Pour envisager la reconversion de ce site, forces vives et syndicats se mettent d’accord sur la mise en place d’un outil stratégique devant réfléchir à son devenir. Avec l’idée de contribuer à la réindustrialisation de la région.

Les critiques sur l’utilité de cet outil se sont toutefois régulièrement abattues sur le GRE. Et ce jusqu’au milieu des années 2010. Surtout dans un paysage liégeois où les structures supra-communales sont multiples. Son positionnement comme acteur de réflexion, chargé du volet prospectif de la métropole semble aujourd’hui accepté. Reste que certains demeurent encore sur leur faim quand il faut évoquer le bilan de cette structure. Quelques réalisations sont toutefois à épingler. La principale est Renowatt, un projet pilote de rénovation énergétique de bâtiments publics. Citons également l’étude préliminaire visant à analyser la faisabilité du Musée de la Boverie, la mise en place de “Reverse Metallurgy” dont l’objectif était de développer des technologies de pointe pour le recyclage de métaux ou encore de l’événement Liège to build organisé dans le cadre du Mipim à Cannes et qui rassemble en une journée tout le gratin immobilier local. Ajoutons que le GRE est aujourd’hui présidé par Yves Prete, un habitué des conseils d’administration (Air Belgium, Protection Unit, Sonaca, ex-président de l’UWE).

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