Les CPAS wallons tirent la sonnette d’alarme : “La compensation prévue pour les exclusions du chômage est dérisoire”

Luc Vandormael - BELGA PHOTO BENOIT DOPPAGNE
Baptiste Lambert

Déjà en grande difficulté financière, les CPAS wallons craignent l’arrivée des allocataires exclus du chômage après deux ans, si les moyens n’arrivent pas. Cette mesure, qui est sur la table fédérale, serait “un changement de paradigme, une révolution”, préviennent Luc Vandormael et Alain Vaesen, respectivement président et directeur de la Fédération des CPAS de Wallonie.

La Fédération des CPAS de Wallonie faisait sa rentrée politique, ce jeudi. Avec forcément un sujet sur toutes les lèvres : la fin des allocations de chômage après deux ans, qui figure en bonne place sur la table de négociation de l’Arizona, mais aussi dans le programme des deux partis à la tête de la Wallonie : le MR et Les Engagés.

Cette mesure concernerait en premier chef les CPAS, puisque ceux qui ne parviendraient pas à retrouver un emploi glisseraient directement vers le revenu d’insertion (RIS). Et naturellement, les CPAS craignent une charge supplémentaire alors que l’état de leur finance n’est déjà pas rose, comme en atteste le grand rapport de Belfius, publié en juin dernier, sur les finances des communes wallonnes.

Luc Vandormael s’explique, en chiffres : “Les exclusions du chômage, cela concernerait en tout 52.000 personnes en Wallonie. Tout le monde ne viendra pas, mais on évalue le nombre de personnes qui débarqueraient dans les CPAS entre de 17.000 à 34.000. C’est un changement de paradigme complet, une révolution. Pour vous donner un ordre d’idée, il y a actuellement 75.000 bénéficiaires du RIS en Wallonie.”

“Entre 71 et 219 millions d’euros”

Un changement de paradigme qui couterait, selon les CPAS, “entre 71 et 219 millions d’euros, rien que pour la Wallonie“.

Or à ce stade, “il n’y a aucune mesure compensatoire qui est prévue.” La note de Bart De Wever parle toutefois de 200 millions d’euros à l’échelle du pays : “Cela représenterait une augmentation du taux de remboursement du revenu d’intégration par le fédéral de 5%.” Pour la Fédération des CPAS, “c’est dérisoire”, alors que le taux de remboursement varie d’une commune à l’autre de 55 à 70% (en fonction du nombre de RIS).

Luc Vandormael et Alain Vaesen plaident plutôt pour un taux de remboursement de 95%, en plus de moyens supplémentaires pour engager du personnel. Pour permettre aux CPAS de réaliser leurs missions : “Car on nous demande aussi une mission d’accompagnement et d’activation, dans les 30 jours, pour ces bénéficiaires supplémentaires, il ne s’agit pas seulement de leur payer le RIS.”

Manque de personnel

Dans une précédente analyse, les CPAS estimaient leurs besoins en personnel à 800 personnes, et ce, sans la mesure d’exclusion du chômage après deux ans.

La Fédération regrette en tout cas “l’effet cumulatif de toute une série de mesures”. Luc Vandormael énumère : “Le ministre Jeholet a par exemple confirmé la non-indexation des personnels APE. On nous met aussi dans les pattes une réforme de la fonction publique, avec la fin des nominations. Il y a également la division du Fonds spécial de l’aide sociale, alors qu’on avait demandé un renforcement. Et last but not least, on nous charge de réaliser la fusion de certains CPAS avec les communes, telle qu’inscrite dans la DPR, mais on ne connait aucun tenant et aboutissant.”

Bref, le sac à dos déjà bien chargé est alourdi de plusieurs pierres. Tel est le sentiment des CPAS qui veulent toutefois se montrer constructifs, en reprenant un tour de consultation avec le gouvernement wallon. “C’est aussi dans son intérêt. Si l’on ne nous donne pas les moyens, la politique du MR et des Engagés ne pourra tout simplement pas être appliquée.”

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