Les citoyens vont-ils payer l’addition au niveau communal ?

Pierre-Yves Jeholet, Adrien Dolimont et Francois Desquesnes - BELGA PHOTO BRUNO FAHY
Baptiste Lambert

Si la nouvelle coalition wallonne ne promettait aucune nouvelle taxe, ses réductions des dépenses dans la sphère publique creusent les finances des communes. Pour l’opposition, c’est tout vu, les citoyens vont devoir passer à la caisse pour compenser, via une augmentation des taxes communales. Les communes doivent se responsabiliser, répond le ministre des Pouvoirs locaux, François Desquesnes (Les Engagés).

Sur demande du ministre François Desquesnes, l’Union des Villes et Communes de Wallonie (UVCW) a remis un avis, début novembre, sur l’avant-projet de décret-programme qui concerne les pouvoirs locaux. L’UVCW craint pour les finances des communes et pointe du doigt la suppression du pourcent supplémentaire d’indexation du Fonds des Communes et le gel de l’indexation des subventions APE.

Ensemble, ces deux réductions des dépenses décidées par la nouvelle majorité régionale devraient peser 458,6 millions d’euros sur la législature. L’UVCW rappelle que le Fonds des communes est la première source de financement des pouvoirs locaux (23%), devant “les recettes additionnelles au précompte immobilier (PRI) et les recettes additionnelles à l’impôt des personnes physiques (IPP), représentant respectivement 17,5% et 17,3% de leurs recettes ordinaires totales.”

Concernant le gel de l’indexation des subventions APE, l’UVCW estime qu’il “aura inévitablement un impact sur l’emploi local”. Ce qui les contraindra, selon l’organisme, “à supporter le poids politique d’un alourdissement de la fiscalité dans le seul but de neutraliser les conséquences financières des décisions régionales”.

L’opposition bondit

À l’instar du rapport Conseil économique, social et environnemental de Wallonie (CESE), qui qualifiait, la semaine dernière, le gel de l’indexation des emplois APE comme “la moins bonne des options”, cet avis de l’UVCW alimente les vents de l’opposition.

Du côté du PTB, Germain Mugemangango accuse la nouvelle majorité wallonne de mentir, “quand elle dit qu’il n’y aura pas de nouvelles taxes. Les économies sur le dos des communes vont susciter de nouvelles taxes locales.” Le député ajoute “que cela a déjà commencé : plusieurs communes ont déjà annoncé des augmentations de la taxe poubelle ainsi que des diminutions des services rendus”. C’est effectivement le cas de la commune de Brunehaut, en Wallonie picarde, qui augmentera sa taxe en 2025, tandis que la commune de Pecq ne ramassera les poubelles qu’une semaine sur deux, pour éviter une augmentation.

Chez Ecolo, même son de cloche. Pour le chef de l’opposition, Stéphane Hazée, les deux mesures de réduction des dépenses font peser un risque sur l’emploi, “alors que c’est un des chevaux de bataille” de la coalition Azur, et sur des taxes communales supplémentaires.

Responsabilisation

Une hausse des taxes communales est certainement une option. Nous l’écrivions début septembre face à la situation catastrophique des finances communales. Une situation qui est toutefois bien antérieure à l’introduction de la coalition Azur en Wallonie. Un rapport de Belfius indiquait que le poids des pensions des agents communaux, ainsi que celui des CPAS pesaient de plus en plus sur les finances locales et devenaient insoutenables. La Région et les communes attendent un geste du fédéral sur ces deux points précis. Cela fait d’ailleurs partie des négociations autour de l’Arizona.

Mais déjà à l’époque, le ministre Desquesnes insistait sur la responsabilité des communes. Au vu de l’état des finances publiques, tous niveaux de pouvoir confondus, “nécessité fait loi, on ne peut pas vivre continuellement au-dessus de ses moyens”, indiquait-il. Le ministre évoquait la simplification administrative et le “spending review” (mise à plat de toutes les dépenses) comme moyens de dégager des marges budgétaires.

À plus long terme, une réflexion sur une fusion verticale et horizontale devait être menée, selon le ministre. C’est-à-dire une fusion entre communes ou une fusion entre une commune et son CPAS, par exemple. Deux formules qui ne rencontrent pas beaucoup de succès jusqu’à présent : “La Wallonie, c’est 3,6 millions d’habitants. Si on ne prend que les communes et les CPAS, on est déjà à plus de 500 organisations. Si vous y ajoutez les intercommunales et les associations, chapitre XII, vous arrivez à 800 institutions publiques. Nos concitoyens ne comprendraient pas qu’on ne fournisse pas un effort d’adaptation”, rétorquait François Desquesnes.

Jusque-là, malgré les crises, la plupart des communes wallonnes ont limité les hausses de taxes sous la précédente législature, au contraire des communes bruxelloises. Et dans l’étude de Belfius, avant les élections, seuls 11 % des élus locaux se montraient disposés relever les taxes pour faire face au défi budgétaire. Or, il n’y a que deux leviers pour équilibrer un budget : relever les recettes (impôts) ou baisser les dépenses. Finalement, majorité et opposition sont dans leur rôle et chaque majorité locale fera son choix.


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