“Tout le monde ne prend pas la pleine mesure du ralentissement que l’on est en train de vivre”
Dans notre Trends Talk, l’économiste Philippe Ledent (ING) souligne combien les nombreux chocs du moment nécessitent une réponse adéquate. Parce que cela pourrait constituer un tournant.
Phillipe Ledent, Senior Economist chez ING et chroniqueur régulier de Trends Tendances, est l’invité de notre Trends Talk, qui passera en boucle ce week-end sur Canal Z. Il évoque longuement cette période sans précédent pour l’économie mondiale.
Est-ce un moment désarçonnant pour un économiste ? “C’est une période fatigante, c’est clair, entame-t-il. C’est une période qui, intellectuellement a un côté passionnant. On a une succession de chocs énormes. Après le Covid, on a de nouveaux chocs : la géopolitique, l’inflation… Autant le Covid était un choc inédit parce qu’on n’avait plus vraiment connu de crise sanitaire depuis très longtemps, autant ici, c’est un retour à des chocs que l’on a pu connaître, principalement dans les années 1970. On doit en revenir à la macroéconomie de base.”
Mais l’ampleur des chocs, reconnaît-il est inédite. “Ce ne sont pas de petites variations, ce sont de grandes variations : c’est en cela que c’est désarçonnant.” Il est clair, souligne-t-il, que nous sommes très loin de l’équilibre du modèle économique, avec une ampleur susceptible de provoquer un chaos inédit.
Pourtant, certains paramètres économiques ne restent-ils pas, bon an mal an, assez rassurants ? “Il y a deux niveaux, souligne-t-il. Tout d’abord, comprend-on l’ampleur du choc initial ? Je ne pense pas que tout le monde a pris la pleine mesure du ralentissement que l’on est en train de vivre.” On vit comme en avant, finalement ? “Non, probablement pas. Mais si vous prenez les projections économiques de la Banque européenne aujourd’hui, elle ne prévoit pas de récession. Elle mène donc sa politique monétaire dans un cadre où elle ne conçoit pas de récession. Probablement parce que l’évaluation de l’impact a été faite il y a un mois et demi et les chocs sont à ce point importants, la situation changement tellement rapidement que les projections faites il y a un mois et demi sont probablement moins valables.”
Sommes-nous dans une période où les cycles économiques sont plus courts, plus chaotiques, plus rapprochés ? Pourrait-on connaître une reprise, à nouveau, si la situation géopolitique s’apaise ? “C’est la deuxième question, dit Philippe Ledent. Quel sera l’impact de tout cela à moyen et long terme des chocs que nous vivons aujourd’hui ? Est-ce une sorte de rappel à l’ordre, de réveil, de modification brutale du fonctionnement de l’économie et puis, après, on repart sur de meilleures bases, un peu comme avec l’accélération de la digitalisation pendant le Covid ? Cette fois, on commence à se poser la question de l’accélération de la transition énergétique. Comment va se comporter le marché du travail, va-t-il souffrir, un peu, beaucoup ? Ou la compétitivité ?”.
Ce multiple choc pourrait aussi marquer “la fin de la naïveté européenne” dans un monde où tout le monde ne joue pas le jeu du commerce international. “Au fur et à mesure que l’on prend la mesure de ce qui se passe, on comprend l’importance de prendre des mesures fortes”, dit-il. L’économiste évoque aussi longuement le risque d’assister à un tournant ou que l’on ne réponde pas à la question de savoir le système économique avec lequel avancer. Parce que certains, partisans de la décroissance, avancent masqués.
C’est une équation avec de nombreuses inconnues, que Philippe Ledent analyse longuement durant ce Trend Talk, à ne pas manquer.
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