Saut d’index ou annualisation : quels seraient les impacts d’une modification de l’indexation ?

Le gouvernement Arizona avait promis à son électorat de ne pas augmenter les impôts, du moins dans les mots. © Getty Images
Baptiste Lambert

Si l’Arizona devrait éviter un saut d’index pur et simple, le gouvernement fédéral travaille “sur d’autres formes d’indexation”, a reconnu le vice-premier ministre David Clarinval (MR). Par ailleurs, ce dernier plaide toujours pour un saut d’index limité aux allocations sociales alors que d’autres envisagent de revoir l’indexation pour les hauts salaires. L’économiste Philippe Defeyt a mesuré l’impact d’une annualisation de l’indexation et d’un saut d’index des allocations.

La question de l’indexation des salaires et des allocations refait surface dans un contexte budgétaire tendu. Avec plus de 10 milliards d’euros d’économies encore à trouver, le gouvernement fédéral cherche des pistes de rationalisation. “Nous travaillons sur d’autres formes d’indexation”, a confié David Clarinval à Trends-Tendances, tout en écartant l’idée d’un saut d’index généralisé. Le MR prône toujours un saut d’index limité aux allocations sociales, jugé “plus juste et plus soutenable”.

Pour les libéraux, l’enjeu est de réduire les dépenses publiques sans nuire à la compétitivité des entreprises. “On peut très bien ne pas indexer pendant un an les allocations de chômage ou les pensions, qui ont beaucoup augmenté sous la Vivaldi”, plaide le vice-Premier ministre, en rappelant son opposition à toute hausse de la fiscalité. D’autres pistes sont également à l’étude, dont une “annualisation” du mécanisme d’indexation, c’est-à-dire une adaptation unique, chaque 1er janvier, plutôt qu’au fil des franchissements de l’indice pivot.

L’annualisation de l’indexation

Dans une note, Philippe Defeyt, économiste et ancien mandataire Ecolo, a chiffré les conséquences de cette annualisation, “sans se prononcer sur le fond de ces orientations”. En se basant sur les perspectives d’inflation du Bureau fédéral du Plan, il estime que le passage à une indexation unique par an ferait perdre, selon les hypothèses, environ 1.450 euros de pouvoir d’achat cumulé à un salarié médian (30.000 euros nets annuels) sur la période 2026-2029.

Le mécanisme, appliqué au 1er janvier 2027, impliquerait la suspension des indexations prévues en 2026. “Une fois le choc absorbé, les salaires reprennent leur progression, mais à un niveau inférieur”, souligne Defeyt. Pour les agents publics, dont les revenus sont étroitement liés à l’indice-santé, cette mesure se traduirait par un léger différentiel durable : un salaire net inférieur d’environ 1,5 % en 2029 par rapport au régime actuel.

L’économiste souligne aussi un problème d’équité : les travailleurs déjà soumis à une indexation annuelle au 1er janvier 2026 seraient privés d’ajustement pendant deux années pleines, “alors que tous les autres auront été indexés au moins une fois en 2025”. Autrement dit, une réforme uniforme pourrait créer des distorsions entre secteurs.

Enfin, en termes nominaux, la masse salariale brute diminuerait d’environ 3,9 milliards en moyenne par an au cours de la période de 2026 à 2029.

Saut d’index sur les allocations

La seconde hypothèse analysée par Philippe Defeyt concerne un saut d’index sur les prestations sociales en 2026. Selon ses calculs, la mesure représenterait un gain brut de 2,5 milliards d’euros à l’horizon 2029. Les pensions concentreraient près de 65 % de ces économies.

Mais ce gain serait partiellement annulé par les effets de second tour, selon l’économiste : baisse de la consommation, moindres recettes fiscales et parafiscales. “Le bénéfice net pour le niveau fédéral serait plus proche de 1,6 milliard d’euros”, estime-t-il. Une économie significative, certes, mais loin de combler les besoins de financement du gouvernement.

Des alternatives balayées

Du côté des centristes, Yvan Verougstraete (Les Engagés), a suggéré la semaine dernière de limiter l’indexation automatique aux salaires jusqu’à 5.000 euros bruts, au-delà desquels elle serait remplacée par une négociation individuelle. “L’indexation actuelle est une machine à fracture sociale”, a-t-il estimé, soulignant l’écart de montant absolu entre bas et hauts salaires.

De quoi recevoir la bénédiction des syndicats ? Pas du tout. La FGTB rappelle que “toucher à l’indexation, c’est la condamner” et plaide plutôt pour une réforme fiscale sur les hauts revenus, en augmentant la progressivité de l’impôt.

Trouver un équilibre

Le débat met en lumière le dilemme permanent : concilier rigueur budgétaire, compétitivité et équité sociale. Dans le contexte d’un déficit qui s’accélère, les marges sont étroites. Certains partenaires de l’Arizona ne veulent pas augmenter la pression fiscale, d’autres veulent limiter la casse de la baisse des dépenses publiques. Une équation impossible qui pousse l’Arizona à réfléchir à une piste “technique” comme l’annualisation ou le saut d’index pour freiner la hausse automatique des coûts salariaux.

Mais la note de Philippe Defeyt le rappelle : les effets ne sont jamais neutres. Annualiser l’indexation ou geler temporairement les allocations peut sembler indolore à court terme, mais pèsera sur le revenu réel des ménages et la demande intérieure.

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