Prolongation de Tihange 1 : l’Etat se sert au passage

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Oui, le réacteur nucléaire Tihange 1 peut être prolongé jusqu’en 2025. Mais de 2015 à 2025, l’Etat captera 70 % des bénéfices dépassant une marge “équitable”. Afin de financer, notamment, les éoliennes en mer du Nord et les nouveaux investissements dans des turbines à gaz.

Il aura finalement dû attendre deux jours de plus, Melchior Wathelet (cdH). Le plan du secrétaire d’Etat en charge de l’Energie visant à assurer la sécurité énergétique du pays frétillait d’impatience à l’idée d’occuper la table de travail du kern de ce mercredi. Sauf qu’Albert II a décidé de jouer les invités surprises, ce jour-là, éclipsant – forcément – l’ordre du jour. Ce vendredi, faute d’abdication impromptue, le conseil des ministres en version restreinte a donc enfin pu approuver la feuille de route énergétique de la Belgique.

Point fort de ce “plan Wathelet”, la confirmation de la prolongation du réacteur nucléaire Tihange 1 (962 MW) pour dix ans, jusqu’en 2025 donc. Moyennant de solides conditions. Pas question que ce rabiot ne profite, via la fameuse rente nucléaire, qu’aux deux propriétaires du site, GDF Suez et EDF. Voici donc la proposition que le gouvernement adresse aux opérateurs. Hors prolongation, les coûts de production sont estimés, pour 2015, à 27,4 euros le MWh – à charge pour la Commission de régulation de l’électricité et du gaz (Creg) de les auditer annuellement afin de les faire évoluer si besoin. A quoi s’ajoutent 8 euros du MWh afin d’amortir les 600 millions d’euros d’investissement nécessaires à la prolongation. Et le fédéral d’estimer “équitable” que les propriétaires conservent une marge de 6,4 euros du MWh sur la vente de l’électricité sortant de Tihange 1.

Le moindre centime de recette excédant ce montant de 41,8 euros le MWh (pour 2015) connaîtra le destin suivant : il sera prélevé (avant impôt) à 70 % par l’Etat, le solde revenant aux propriétaires. Ces deniers pompés par l’Etat n’iront pas boucher les trous des autoroutes wallonnes ou le gouffre des pensions. Un tiers, au maximum, sera consacré à donner un bon coup de fouet à la production d’électricité en Belgique. Acte un : améliorer les conditions de marché, afin d’empêcher que les centrales au gaz existantes ne ferment, faute de rentabilité. Cela passe notamment par un travail sur les tarifs d’injection et la cotisation fédérale. Acte deux : lancer un appel d’offres pour la construction de 800 MW de capacités de production à base de gaz supplémentaires. Pour en savoir plus sur le cahier des charges, ainsi qu’au passage, sur la réforme attendue du soutien aux éoliennes en mer, rendez-vous le 19 juillet – à moins qu’Albert II ne change soudainement d’avis. Et les deux tiers restants ? Ils serviront à alléger la facture dont s’acquittent ménages et entreprises pour soutenir, justement, ces éoliennes offshore.

“Les producteurs nucléaires attendaient une proposition concrète du gouvernement pour la prolongation de Tihange 1 ? En voici une concrète”, glisse un Melchior Wathelet à la recherche d’une cuisine toujours ouverte en ce début d’après-midi. Pas encore de réaction desdits producteurs, qui doivent sans doute digérer la nouvelle.

Benoît Mathieu

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