Trends Tendances

“Pourquoi négocier, d’une part, la majorité bruxelloise et, d’autre part, les majorités en Wallonie et à la Communauté française ?”

Former une coalition fédérale, tout le monde pressentait que ce serait compliqué, voire très compliqué. En revanche, la constitution de majorités régionales devait a priori couler de source. Or, plus de deux mois après le scrutin, les tractations coincent tant en Flandre qu’en Wallonie, en raison notamment des enjeux fédéraux.

Faut-il vraiment chercher à intégrer Ecolo dans la majorité wallonne si les verts refusent de nous accompagner au Fédéral ? s’interrogent le PS et le MR. Ne faudrait-il pas inviter le sp.a au gouvernement flamand si nous devons de toute façon parler avec les socialistes au Fédéral ? se demande-t-on à la N-VA. Les questions tournent et retournent dans tous les sens et personne ne se risque à tenter de poser la première pièce du puzzle.

L’enchevêtrement des élections et de leurs enjeux a été voulu par les concepteurs de la dernière réforme de l’Etat. Ils ont rassemblé les élections et fait coïncider la durée des législatures pour éviter que le pays ne soit englué dans une sorte de campagne électorale permanente. Ils estimaient alors que l’imminence d’un scrutin à un niveau de pouvoir freinait un peu trop le fonctionnement de tous les niveaux de pouvoir. Ils étaient tellement convaincus du bien-fondé du couplage des élections que l’accord de 2011 prévoyait qu’en cas d’élection fédérale anticipée, la nouvelle législature serait écourtée pour se recaler sur le calendrier des élections européennes et régionales. Cette disposition n’est toutefois pas entrée en vigueur et les partis s’en réjouiront peut-être dans quelques mois…

Le souhait est d’instaurer la plus grande symétrie entre les exécutifs pour faciliter les arbitrages dans un Etat fédéral sans hiérarchie des normes. Mais la législature écoulée a montré que la symétrie politique ne suffisait pas à garantir ces arbitrages et la fluidité des relations entre l’Etat et les entités fédérées. Plusieurs blocages sont en effet venus de Flandre, dont le gouvernement était pourtant l’exacte réplique de la composante néerlandophone de l’exécutif fédéral.

A défaut de symétrie, on évoque parfois des coalitions ” miroirs ” : chacun forme sa majorité régionale et les heureux élus se débrouillent ensemble pour gérer le niveau fédéral. Il faut toutefois déterminer ce que ces miroirs devraient refléter. Dans l’esprit de Bart De Wever, il existe deux démocraties dans notre pays et donc deux images à refléter : celles de la Flandre et de la Wallonie. Mais même dans ses propres rangs, on commence à admettre que Bruxelles ne peut pas être gommée comme cela. ” Un nationaliste doit bien voir l’importance de l’identité bruxelloise “, confie au Soir l’ancien président de la Chambre, Siegfried Bracke.

Les Francophones clament cela depuis des années. Mais politiquement, ont-ils vraiment intégré ce principe ? La manière dont les partis conduisent les négociations gouvernementales laisse penser qu’ils considèrent Bruxelles comme une entité de seconde zone. Pourquoi négocier, d’une part, la majorité bruxelloise et, d’autre part, les majorités en Wallonie et à la Communauté française ? Pourquoi Laurette Onkelinx et Zakia Khattabi pour l’une et Elio Di Rupo, Paul Magnette et Jean-Marc Nollet pour les deux autres ? Toute la discussion repose sur le principe que les gouvernements wallon et communautaire doivent coïncider et tant pis si la capitale emprunte une autre voie. Le seul qui a réussi à faire autrement, c’est Benoît Lutgen en juin 2017, mais de manière bien involontaire, on vous le concède.

En attendant, les Bruxellois ont pris tout le monde de vitesse en formant leur gouvernement régional. Si l’on en veut insérer des reflets complets dans un gouvernement fédéral ” miroir “, cela nous conduirait quasiment à une coalition d’union nationale. Pas sûr que ce dernier adjectif plaise à tout le monde.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content