Obama peut-il encore relancer l’économie américaine?

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Le risque d’Armageddon financier écarté, Barack Obama veut recentrer le débat sur l’économie et l’emploi. Mais ses marges de manoeuvre pour agir sur la croissance sont limitées. Explications.

Barack Obama aimerait bien passer aux choses sérieuses. Si la menace d’un défaut de paiement a obligé le gouvernement à concentrer toute son énergie ces derniers mois sur le relèvement du plafond de la dette, il est temps de traiter les “vrais” problèmes des Etats-Unis, à savoir un taux de chômage à 9,2% et une croissance faible à 1,3%. “Nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour faire croître cette économie et remettre l’Amérique au travail”, a affirmé le président dans une allocution. “Tout le monde doit s’y mettre. Ce n’est que justice. C’est le principe pour lequel je vais me battre dans les prochaines phases de ce processus”. Il a d’ores et déjà évoqué quelques pistes: des baisses d’impôts pour les classes moyennes, la prolongation des allocations chômage ou encore le lancement de grands projets d’infrastructures susceptibles de créer des emplois. Mais a-t-il vraiment la marge de maneouvre nécessaire pour faire quoi que ce soit?

La relance budgétaire est politiquement impossible

Le moyen le plus efficace de renforcer l’économie serait de mettre en place de nouvelles mesures de relance budgétaire pour booster la consommation des ménages, qui représente 70% du PIB. La consommation, qui calait depuis le printemps, a même chuté entre mai et juin de 0,2%. Occupés à se désendetter, les ménages sont moins prêts à emprunter et à dépenser, d’autant que la valeur de leur maison ne cesse de reculer. Ils sont surtout de plus en plus victimes de la modération salariale et de la prudence dans les embauches dont font part les entreprises afin de renouer avec les profits. Résultat, les revenus ont augmenté en juin de seulement 0,1%, leur plus faible hausse depuis le début de l’année.

Le problème, c’est que “dans le contexte de la crise de la dette dans la zone euro, il sera quasiment impossible à faire passer plus de stimulus budgétaire auprès de la majorité républicaine dans la Chambre des représentants, alors même que dans les faits, les Etats-Unis auraient plus de facilité à lever de la dette sur les marchés, grâce au statut de réserve internationale du dollar”, explique Sylvain Broyer, économiste à Natixis. Obama aura d’autant plus de mal à faire passer la moindre mesure que le compromis trouvé ces derniers jours pour relever le plafond de la dette prévoit une forte réduction du déficit via de lourdes coupes dans les dépenses.Surtout, bon nombre d’élus ont juré que leur priorité était d’empêcher la réélection d’Obama en 2012. Bloquer toute mesure susceptible d’améliorer l’économie est une manière d’y arriver.

La relance monétaire prématurée

Les taux de court terme étant quasi-nuls depuis plus de deux ans, la Fed ne peut jouer sur cet instrument traditionnel de la politique monétaire. Une autre solution monétaire pourrait passer par la réactivation de la planche à billets: Ben Bernanke pourrait lancer une troisième vague d’assouplissement quantitatif (quantitative easing) ou QE3. Après tout, le plafond de la dette a été relevé, rien n’empêche la Fed de reprendre ses rachats de bons du Trésor. Toutefois, “il est peu tôt pour remettre ça sur la table, estime Sylvain Broyer. D’une part, l’inflation est assez élevée, à 3,5%. La Fed a besoin de constater un risque de déflation pour justifier un QE3. Certes, le chômage est à 4 points au dessus de son niveau naturel, donc le risque de déflation existe, mais à long terme. D’autre part, l’efficacité d’un QE3 n’est pas certaine. Et on n’a vu les risques de surchauffe que l’assouplissement quantitatif a fait courir aux émergents”.

Le dollar faible, la solution par défaut

Il ne reste qu’une seule voie, moins avouable: laisser le billet vert poursuivre sa dépréciation de manière à rendre les exportations plus compétitives. “C’est le seul moyen d’inciter à la réindustrialisation du pays sans dépenser d’argent public”, explique Sylvain Broyer. Comment affaiblir le dollar? C’est facile, “il suffit de ne pas régler le problème de la dette”, lance l’économiste. Cela tombe bien, la plupart des analystes sont sceptiques quant à l’efficacité de l’accord trouvé dimanche à réduire le déficit. “Il ne règle pas les problèmes budgétaires de long terme auxquels est confronté le pays”, tranche Sebastian Mallaby, économiste du Council on Foreign Relations “Une réduction des dépenses de 91,7 milliards de dollars [par an en moyenne sur une décennie, ndlr] est insignifiante” par rapport au budget de l’Etat fédéral, confirme Bill King, de la maison de courtage M. Ramsey King Securities. Et pour marquer le coup, Moody’s a relevé mardi le risque de voir la dette des Etats-Unis perdre son triple A.

Trends.be, avec Lexpansion.com

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