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Le paradis ou l’enfer pour le secteur du paiement européen?
Vous connaissez cette blague européenne, n’est-ce pas ? Le paradis, c’est là où les cuisiniers sont français, les mécaniciens sont allemands, les amants sont italiens et tout est organisé par les Suisses. En enfer, la police est allemande, les mécaniciens sont français, les amants sont suisses et tout est organisé par les Italiens.
Dans le monde des paiements, le paradis est celui où les paiements instantanés sont suédois, le compte-à-compte est néerlandais et le P2P est italien. Je n’oserais pas décrire les pays qui sont les plus proches de l’enfer mais l’Europe offre un paysage très contrasté avec la survivance des chèques en France, la faible acceptation des cartes de crédit en Allemagne ou la lenteur d’un simple virement dès qu’il traverse une frontière. Beaucoup d’espoir a été mis dans les conséquences attendues de l’implémentation de la norme PSD2 mais force est de constater que, jusqu’à présent, l’interfaçage de simples comptes à vue et l’enlisement du débat sur la qualité des interfaces (« API ») en a déçu plus d’un.
Pourtant l’Europe n’a pas à rougir des innovations apportées par ses fintechs les plus innovantes : Klarna, N26, Trustly sont les plus connues mais chaque pays européen recèle ses propres pépites. On peut s’attendre à ce que les deux grandes tendances de fonds, soit l’open banking d’une part, et la généralisation du paiement instantané d’autre part vont s’entremêler et générer une foultitude d’innovations.
Voilà donc la perspective du paradis sur terre : un choix infini de méthodes de paiements, une acceptation universelle, voire même une potentielle baisse des coûts pour les consommateurs et les commerçants…
Ce paradis est à notre portée… à condition que les régulateurs et les législateurs locaux ne jouent pas la carte « nationale » en surréglementant non seulement le paiement proprement dit mais aussi les services annexes qui ont fait le succès des plus belles « paytechs » dans leur pays d’origine. Je pense par exemple à la réglementation sur les crédits à la consommation, ou à une mauvaise interprétation des lois de la concurrence. Enfin, si les intentions de MiFID sont louables, force est de constater qu’être pieds et poings liés par une formule « purement déclarative » n’encourage pas la proposition de services financiers innovants (crédit sur mesure, investissement automatisé).
Voilà donc l’enfer : un puzzle de 27 marchés locaux avec ses propres règles, ses acteurs dominants, des particularismes en tout genre, bref un dédale au détriment des consommateurs et des entrepreneurs.
Nous sommes convaincus que la meilleure manière d’influencer la réglementation de demain est l’exemplarité des meilleurs d’entre nous : leur succès commercial mais aussi la prospérité de leurs actionnaires. Quoi de mieux qu’un service adopté instantanément par des millions d’européens pour démonter le besoin qu’il comble ?
Mais nous voilà en 2020 et le moins qu’on puisse dire c’est que le diable et les cavaliers de l’apocalypse sont à nos portes, j’ai bien sur nommé pandémie, décroissance, intérêts négatifs et crise de liquidité. Les volumes de paiement s’effondrent et la transition accélérée vers des moyens de paiements digitaux ne compense pas l’effet dépressif général. Mais, nous ne sommes pas en en 2008 où le vers était dans le fruit du monde financier et a altéré la confiance que le public avait dans ses institutions financières. Lorsque nous aurons traversé cette mauvaise passe, quelle belle opportunité de montrer que l’industrie du paiement aura démontré sa formidable résilience en continuant à assurer le fonctionnement du système sanguin de l’économie européenne tout entières.
C’est bien la force et l’étendue d’un réseau d’opérateurs industriels comme le nôtre à l’échelle de tout un continent qui fera toute la différence dans l’Europe d’après-crise.
Thibault de Barsy
Vice-Président & General Manager
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