Le nouveau pacte de stabilité ne facilitera pas vraiment la vie de la Belgique

Vice-prime minister and Finance Minister Vincent Van Peteghem
Pierre-Henri Thomas
Pierre-Henri Thomas Journaliste

Notre pays, qui doit réaliser chaque année un effort de 0,4% du PIB pour stabiliser une dette déjà bien trop élevée selon les critères européens, a quelques années ans pour imprimer une trajectoire budgétaire plus soutenable.

Finalement, après d’âpres discussions, les ministres européens des finances ont accouché d’un nouveau pacte de stabilité et de croissance. L’ancien pacte avait été suspendu en 2020 en raison de la crise sanitaire mais cette suspension prenait fin au début de l’an prochain. Dans cette nouvelle mouture, qui doit encore être approuvée par le Parlement européen, les deux grandes lignes rouges du pacte précédent, ne pas dépasser un endettement de 60% du PIB et un déficit de 3% du PIB, restent de mise.

Une trajectoire de moyen terme

Mais le texte, qui se veut être moins rigide que le pacte précédent, est le fruit d’un compromis entre les faucons et les colombes, entre les pays du Nord, emmenés par l’Allemagne, qui plaident pour une stricte orthodoxie budgétaire et les pays du Sud, emmenés par l’Italie et la France, plaidant pour davantage de marges de manœuvre budgétaire. Sur le principe les pays présenteront un plan pluriannuel de trajectoire budgétaire qui devra être validé par la Commission.

Le nouveau pacte sera dans les faits applicable à partir de 2025 puisque les budgets 2024 sont déjà rédigés. Il prévoit que les pays, comme la Belgique, dont le ratio d’endettement est supérieur à 90 % du PIB devront réduire leur dette d’un point de pourcentage par an pendant toute la durée de leur plan de dépenses national. Cet objectif est réduit de moitié pour les pays dont le taux d’endettement est supérieur à 60 % mais inférieur à 90 % du PIB. Et des objectifs supplémentaires sont imposés aux pays, comme la Belgique, dont le déficit est supérieur à 3 % du PIB et qui ont un endettement supérieur à 60% du PIB. Ces pays devront se serrer la ceinture pour ramener leur « déficit structurel primaire », c’est-à-dire le déficit hors éléments conjoncturels et hors charges d’intérêt, à 1,5 % du PIB.

Les sanctions sont renforcées dans le cadre de l’accord, les pays qui ne respectent pas les objectifs de leur plan de dépenses faisant l’objet d’une procédure pour déficit excessif. Ces mauvais élèves seront obligés de réduire leurs dépenses de 0,5 % du PIB par an.

Compromis

Mais pour contenter les pays fortement endettés, plusieurs mesures ont été décidées qui, à court terme, devraient leur faciliter la vie. Ainsi, explique Bernard Keppenne, l’économiste en chef de CBC, « à  partir de 2025, les Etats membres auront de quatre à sept années pour réduire leurs déficits et leurs endettements. En plus, la France a obtenu que les paiements d’intérêts soient exclus de l’effort de réduction du déficit jusqu’en 2027 pour les pays dont le déficit budgétaire est supérieur à 3 % du PIB ». Et l’économiste ajoute que « ce pacte tient compte du fait que les gouvernements vont devoir réaliser d’énormes investissements pour passer des combustibles fossiles aux énergies renouvelables, et accorde même un traitement spécial aux dépenses de défense ».

Le compromis est donc, pour contenter les colombes, que l’on donne un peu de temps aux pays très endettés pour se remettre sur la trajectoire et que l’on enlève des calculs de déficit les investissements, spécialement en termes de transition énergétique et de sécurité. Et pour contenter les faucons, qu’à plus long terme, une trajectoire chiffrée de désendettement est imposée aux pays dispendieux.

Trop compliqué ?

Rappelons ce que cela signifie pour la Belgique. En début de semaine, le gouverneur de la Banque nationale Pierre Wunsch rappelait que dans notre équation budgétaire, les efforts demandés, à politique inchangée, juste pour stabiliser notre niveau d’endettement qui atteint 105% du PIB aujourd’hui, représentent 0,4% du PIB par an, soit 2 milliards. Pour remettre le pays dans une trajectoire plus ou moins en ligne avec le prescrit européen, cet effort devrait être au moins doublé, ce qui représenterait au minimum 4 à 5 milliards par an.

Voilà les grandes lignes du nouveau pacte de stabilité et de croissance, mais beaucoup d’observateurs estiment que le texte est très compliqué à mettre en œuvre, car il comprend de multiples exceptions aux règles générales et qu’il sollicite des concepts qui, en soi ne sont pas précisément définis, comme celui de « déficit structurel ».

Au final, comme le souligne dans Les Echos l’économiste français Xavier Timbeau, directeur de l’OFCE, « quand les règles sont nombreuses et compliquées, c’est l’arbitre qui décide, ce qui veut dire que beaucoup dépendra de la façon dont la Commission européenne les fera appliquer. »

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