Le G20 à la croisée des chemins

© Belga

Le sommet du G20 qui vient de s’achever à Hambourg place ce comité de pilotage mondial face à un double défi: l’efficacité face aux divergences internes et le besoin de réinventer sans se disperser.

“Nous sommes en période de transition. Le G20 était un forum de réponse à la crise financière, qui a bien fonctionné, et qui aujourd’hui traite les sujets climatiques, migratoire, de développement, de santé, d’éducation, et c’est sans doute son avenir: s’adapter à ces grands enjeux diplomatiques”, explique une source diplomatique, un de ces conseillers participant aux longues nuit de négociations pour rédiger le communiqué final du sommet.

De fait, les parties les plus importantes de ce communiqué de Hambourg, feuille de route sans force légale pour les 20 pays les plus puissants du monde, parlaient de changement climatique et de protectionnisme, moins de régulation bancaire ou de politique monétaire.

“Depuis ses débuts en 2008, le sommet du G20 a constamment élargi son agenda, mais Hambourg a marqué le franchissement d’un palier”, estime pour l’AFP John Kirton, codirecteur du G20 Research Group de l’université de Toronto. “Le G20 s’est imposé comme le lieu de gouvernance mondiale efficace dans les domaines économiques, sociaux, environnementaux, et, de plus en plus, sécuritaires”, selon lui.

Mais le G20 ne se limite pas à son communiqué. La rencontre Donald Trump-Vladimir Poutine de samedi l’a montré: c’est aussi une manière efficace pour les dirigeants mondiaux d’échanger dans un cadre moins formel que celui d’une visite protocolaire.

“C’est très important pour eux de se rencontrer personnellement en terrain neutre, et de parler de toutes les crises à l’agenda”, explique à l’AFP le Docteur Claudia Schmucker, du think tank allemand DGAP.

Pour autant, le G20 ne devrait pas trop élargir son mandat, selon elle. “Un agenda trop large empêche de se concentrer. L’accent devrait rester sur l’économie”. Qui plus est, “le G20 n’a pas la légitimité” pour être une sorte de gouvernement mondial. “La chose qui ressemble le plus à un gouvernement mondial, c’est l’ONU”.

Au-delà du périmètre, se pose la question de la composition du G20, “s’il veut rester un forum pertinent”, prévient Friederike Röder, directrice France de l’ONG ONE.

“Dans 50 ans, il y aura plus de jeunes en Afrique que dans tous les pays du G20 réunis, c’est pourquoi ce groupe doit désormais composer avec l’Afrique. Pour cela, l’Union africaine devrait devenir membre du G20, au même titre que l’Union européenne”.

“Ne pas reculer”

Mais l’extension du domaine de compétence de ce groupe doit aussi faire face une menace intérieure: perdre son efficacité sous le poids des divergences idéologiques de fond.

En particulier si ces divergences prennent racine dans un pays incontournable, comme les Etats-Unis. A Hambourg, les positions à contre-courant de Donald Trump sur le climat et le libre-échange ont forcé le groupe à des acrobaties sémantiques avec un leitmotiv: si on n’avance pas, essayons au moins de ne pas reculer.

“Le G20 n’est pas une instance de mise en oeuvre, mais un moment où les leaders apportent une impulsion politique pour acter les convergences quand il y en a et mettre à plat les divergences. On voit bien que, sur le climat, on ne va pas faire changer Trump d’avis, mais on peut stabiliser les différends. Je pense que la priorité maintenant, c’est que les dirigeants s’entendent pour ne pas reculer”, explique à l’AFP Sébastien Jean, directeur du centre français CEPII.

A Hambourg, “nous sommes dans une dynamique totalement différente par rapport aux précédents sommets. Avant, il s’agissait d’aller de l’avant, pas d’éviter de reculer”, abonde pour l’AFP Thomas Bernes, du cabinet canadien CIGI.

“Il est incontestable que la réunion de Hambourg a bien acté l’existence d’un monde multipolaire”, relève l’économiste Jacques Sapir, qui se réjouit de “la reconnaissance de la légitimité d’action des nations souveraines”.

“Le problème avec les groupes informels est que leurs décisions ne sont pas contraignantes, donc vous avez besoin d’une volonté de coopération” des membres, analyse Mme Schmucker, pour qui la situation ne doit pas durer trop longtemps, faute de quoi, le groupe sera en danger.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content