Le conseil constitutionnel français recale la “loi Dexia”

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Voici un peu moins d’un an, la Tribunal de grande Instance de Nanterre (TGI) a rendu une décision qui a fait l’effet d’une petite bombe. Elle concernait les prêts “toxiques”, ces crédits structurés qui avaient été vendus notamment par Dexia à de nombreuses collectivités locales et dont les taux étaient parfois liés à l’évolution du franc suisse, du dollar, du pétrole,…. Des structures éminemment risquées et donc certaines ont mal tourné, obligeant l’emprunteur à payer plus que ce à quoi il s’attendait.

Dans un différend opposant Dexia et le département de Seine Saint-Denis, le TGI avait estimé en février 2013 que Dexia n’avait pas trompé son client. Cela n’avait pas empêché les juges d’invalider plusieurs contrats en raison d’un vice de forme : le fax de confirmation de ces contrats ne contenait pas en effet le TEG (taux effectif global), ce que la loi française imposait pourtant. Du coup, les emprunteurs n’étaient plus tenus qu’à payer le taux légal, qui, en France, est très, très bas. Il est aujourd’hui fixé à 0,04%. Une excellente affaire pour les emprunteurs qui avaient donc tout intérêt à dénoncer leurs prêts pour bénéficier de ce taux légal très avantageux. Et ils ne s’en sont pas privés. Certains emprunteurs qui ne paient que 1% d’intérêt ont décidé d’introduire une action en justice. Selon certaines estimations, il y aurait 300 procédures en cours dont 250 concernent des prêts octroyés par Dexia.

Car, l’omission du TEG dans les fax de confirmation de crédits bancaires n’était pas rare. Et les banques françaises ont soudain pris peur. Selon certaines estimations, si tous les clients qui ont reçu un fax de confirmation de crédit sans TEG demandaient de revenir au taux légal, la perte pour le secteur bancaire français pourrait représenter 20 milliards d’euros.

Le gouvernement Ayrault avait cru trouver un extincteur pour éteindre la mèche de cette bombe potentielle : il avait indiqué dans au détour de la loi des finances contenant le projet de budget 2014 que les collectivités qui voudraient bénéficier du fonds de soutien créé pour les aider à supporter le cout des emprunts toxiques devaient cesser leurs poursuites.
Mais dans les dernières heures de 2013, le conseil constitutionnel français a rejeté cette “loi de validation”. Il estime que cette loi rétroactive a une portée trop large, dépassant de loin le seul cadre des “crédits toxiques” et que la loi des finances n’est pas le lieu pour modifier la législation sur le crédit.

Toutefois, “Bercy”, le ministère français des Finances, ne s’avoue pas vaincu. Ses fonctionnaires préparent déjà un nouveau texte juridiquement plus solide. Cette nouvelle mouture de la “loi Dexia” devrait clarifier une bonne fois pour toute l’application de la TEG et valider ces contrats aujourd’hui litigieux.

Le portefeuille toxique de Dexia désormais inférieur à 1,5 milliard d’euros

Une bonne partie du risque associé aux crédits toxiques de Dexia est aujourd’hui supporté par l’Etat français via la Sfil, la structure liée à qui a repris le portefeuille des anciens crédits de Dexia aux communes françaises.. Sur un peu plus de 12 milliards d’euros de crédits potentiellement à problèmes qui avaient été octroyés par le groupe franco-belge, une dizaine de milliards ont été sortis de Dexia, qui ne conservait plus, au moment de sa mise en liquidation à l’automne 2012, que 2,3 milliards de crédits sensibles. Et avec le temps, ce portefeuille s’est réduit. “Nous avons poursuivi notre entreprise de désensibilisation, rappelle Caroline Junius, qui dirige la communication de Dexia. Il n’y avait plus que 1,7 milliards de crédits sensibles fin juin 2013 et au 31 décembre, nous étions en dessous de 1,5 milliard, précise-t-elle.”

Car si Dexia n’a plus le droit de faire du crédit comme une banque normale, une exception a été apportée à cette interdiction : l’Europe a permis en effet à Dexia d’octroyer pour 600 millions d’euros de nouveaux prêts aux collectivités désireuses de se débarrasser en douceur de leurs emprunts toxiques. Dexia octroie à ces emprunteurs un prêt à taux fixe, assorti d’u taux un peu plus élevé que celui du marché, et cette marge sert à dénouer les anciens crédits structurés et déboucler les structures qui les composaient. L’Europe a fixé deux périodes au cours desquelles Dexia peut offrir ces nouveaux prêts. La première est déjà révolue. Elle s’est achevée au 30 juin 2013. La seconde s’ouvre cette année, de juin à novembre. Sur cette enveloppe de 600 millions d’euros, 116 millions ont déjà été utilisés.

P.-H.T.

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