Le climat est-il encore une priorité pour les dirigeants européens ?

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Privilégiant la compétitivité des entreprises dans un contexte économique incertain, les dirigeants européens semblent vouloir mettre le holà sur leur engagement envers le climat.

Ce vendredi les 27 dirigeants européens se réunissent pour un sommet informel à Grenade, en Espagne. Ils y discuteront notamment de l’immigration, de la défense, de la position concurrentielle de l’Europe et de l’élargissement de l’Union européenne. Ils aborderont aussi l’agenda stratégique pour les cinq prochaines années. Un agenda qui devrait aussi définir les priorités post-élections européennes de 2024. Le projet de texte préparé par le cabinet de Charles Michel, président du Conseil européen a déjà fuité chez Greenpeace et est repris par plusieurs médias. Il met en avant cinq priorités : la défense, la compétitivité, les relations internationales, les migrations et l’élargissement de l’UE. Contrairement à il y a cinq ans, le climat n’occupe plus une place centrale.

Une “Europe climatiquement neutre, verte, équitable et sociale” n’est clairement plus au cœur des priorités. Seules quelques lignes seraient consacrées au climat et celui-ci est relégué dans la section “résilience et compétitivité”. S’il est dans cette catégorie, c’est à cause des lois fixant des objectifs climatiques à long terme, par exemple la neutralité climatique d’ici 2050. L’accent n’est donc plus mis sur le développement de telles mesures, mais sur leur simple mise en œuvre. Le projet de texte souligne également l’importance de l’efficacité énergétique, de l’économie circulaire et de la décarbonisation pour rendre le modèle économique durable. Il vise également à renforcer la souveraineté énergétique et la sécurité d’approvisionnement en matières premières. Mais aussi diminuer la dépendance de l’Europe en ce qui concerne les technologies vertes, les médicaments essentiels, les matières premières et la production alimentaire.

Une politique environnementale en mode mineur

Le fait que la politique environnementale se fera en mode mineur les prochaines années n’est pas vraiment une surprise. La guerre en Ukraine, la crise énergétique et l’inflation ont bousculé l’agenda européen, détournant l’attention de la lutte contre le changement climatique. Et puis les objectifs majeurs, tels que la neutralité climatique d’ici 2050, ont déjà été fixés par la loi. La principale préoccupation sur ce sujet est désormais de la mettre en œuvre et de maintenir le cap. Alors qu’en ce qui concerne la politique de défense, la politique migratoire ou encore la politique industrielle tout reste à faire ou presque.

A ce constat s’ajoute la montée de partis politiques d’extrême droite dans de nombreux États membres. Or ce sont souvent des partis nettement moins enclins à soutenir des mesures climatiques. Ainsi, fin juin, les Premiers ministres de l’Autriche, la Croatie, la Suède et l’Irlande, tous membres du Parti populaire européen, ont déclaré qu’on ne pouvait ajouté aucune nouvelle mesure du Green Deal ne pourrait être ajoutée.

Tout cela fait que les nouvelles mesures climatiques font l’objet d’une opposition de moins en moins voilée parmi de toujours plus nombreux dirigeants politiques. Ainsi la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, qui a toujours milité en faveur du Green Deal européen, semble aujourd’hui freiner un peu le mouvement. Dans son récent discours sur l’état de l’Union, elle a surtout parlé de la compétitivité de l’Europe. Même en Belgique. Alexander De Croo a lui aussi appelé à une “pause réglementaire” pour éviter que les entreprises ne quittent l’UE.

Un texte alarmant selon Greenpeace

Ce qui ressemble à s’y méprendre à un rétropédalage et voir le climat ainsi relégué au second plan inquiète les organisations environnementales. Car après un été ou le changement climatique s’est manifesté de façon très concrète, nul doute que des mesures drastiques sont nécessaires pour lutter contre le réchauffement planétaire.

Si de nombreuses lois européennes ont déjà été mises en place dans le cadre du Green Deal européen et qu’il n’est nullement question de supprimer les objectifs climatiques déjà établi, nombreux sont ceux qui craignent que la réduction de l’attention accordée au climat n’entraîne des retards dans la mise en œuvre de ces lois. Or pour que ces objectifs ambitieux soient atteints, il est essentiel de maintenir le cap. Tout retard pourrait en effet avoir des conséquences graves pour l’avenir de la planète.

L’organisation Greenpeace est ainsi très critique envers le projet de texte et le qualifie d’”alarmant”. Toujours selon l’organisation ce manque d’ambition climatique pourrait faire perdre à l’Europe son leadership dans la lutte contre le changement climatique.

Pour ces derniers, plutôt que de tempérer, il faut au contraire maintenir l’urgence et même accélérer la tendance. Car on le voit encore avec ce projet de loi, en matière de climat, l’attention et l’engagement politique peuvent rapidement fluctuer. Rappelons tout de même qu’il ne s’agit là que d’un projet de loi et qu’il est donc encore susceptible d’être modifié.

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