La taxe sur les multinationales pourrait rapporter jusqu’à 1,5 milliard au Trésor belge
Avec l’entrée en vigueur du nouvel impôt minimum sur les multinationales, ces dernières paieront 10% d’impôts supplémentaires sur les bénéfices qu’elles réaliseront cette année, selon la dernière analyse de l’OCDE. Une bonne nouvelle pour les administrations fiscales des Etats. Cette taxe pourrait ainsi rapporter, dans le meilleur des cas, jusqu’à 1.5 milliard au Trésor belge. Bien plus que les 634 millions d’euros initialement prévu dans le budget.
Il y a un peu plus d’un an, le 15 décembre 2022, les 27 Etats membres de l’Union européenne ont approuvé la mise en place d’un impôt minimum mondial sur les multinationales. Cet impôt se base sur un principe simple : quel que soit le pays dans lequel une multinationale déclare ses bénéfices, ces derniers seront in fine taxés à un taux minimal identique de 15 % minimum. Concrètement, une entreprise qui paiera moins de 15 % d’impôts dans un pays étranger (où elle possède des filiales par exemple), devra verser à son pays d’origine (dans lequel se situe son siège social) la différence.
Le but de cette taxe est d’ « assurer la prospérité de l’économie mondiale sur la base de règles du jeu plus équitables ». Car la fuite des fonds vers des paradis fiscaux réduit d’autant la capacité des Etats à financer des dépenses publiques, fait davantage peser le poids de l’impôt sur les individus et accroît les inégalités. Selon l’ONG Tax Justice Network, les pays européens auraient, dans l’ensemble, perdu près de 80 milliards de dollars de recettes fiscales en 2020 en raison de l’évasion fiscale des entreprises. Pour rappel, les bénéfices nets enregistrés par les multinationales s’élèvent à 6.000 milliards de dollars en moyenne entre 2017 et 2020. Une belle manne donc.
Signé par près de 140 pays (dont les plus riches comme les Etats-Unis et les membres du G20), l’accord est entré en vigueur au 1er janvier dernier dans plus de 50 pays. Les autres pays devraient suivre dans les prochains mois. Concrètement, toute entreprise d’un pays signataire générant plus de 750 millions d’euros de recettes annuelles est concernée. Y compris celles qui sont localisées dans un paradis fiscal.
Moins de transferts vers les paradis fiscaux
Une des conséquences de cette entrée en vigueur est l’assèchement des transferts des bénéfices vers les paradis fiscaux, précise l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) dans son dernier rapport. Ils devraient diminuer de moitié. Ils passeraient ainsi de 698,4 milliards de dollars en moyenne à 356 milliards de dollars. Il n’est en effet plus aussi rentable de déplacer des bénéfices pour des raisons fiscales. Les paradis fiscaux ont en effet tout intérêt à appliquer eux-mêmes l’impôt minimum, sous peine de voir d’autres pays imposer des taxes supplémentaires. Ce qui fait qu’une plus grande partie des bénéfices seront imposés dans les pays où les activités ont effectivement lieu. L’OCDE met cependant en garde contre l’incertitude qui entoure l’augmentation des recettes, car il est impossible de prévoir le montant des bénéfices qui sortiront des paradis fiscaux. Et le recul effectif «pourrait mettre un certain temps à se matérialiser, à mesure que les multinationales restructurent progressivement leurs opérations », prévient encore l’OCDE dans les Echos. Pas de quoi chagriner les paradis fiscaux. S’ils peuvent taxer moins de bénéfices des entreprises, ils pourront les taxer à un taux plus élevé. De quoi voir, globalement, leurs recettes augmenter.
Une facture fiscale plus lourde pour les multinationales
Une deuxième conséquence de cette nouvelle taxe, toujours selon l’OCDE, est que les multinationales devraient enregistrer une hausse de près de 10 % des impôts sur les bénéfices qu’elles réaliseront de cette année. Car cette nouvelle taxe modifie aussi le paysage fiscal dans les pays « à forte fiscalité », soit dans les pays où le taux officiel est supérieur ou égal à 15 %. De nombreux pays cherchaient, via des crédits d’impôt pour la recherche ou des avantages fiscaux des plus variés, tout de même à attirer les investissements. Ainsi, entre 2017 et 2020, « 36 % des bénéfices totaux des multinationales (2.143 milliards de dollars) étaient soumis à des taux inférieurs à 15 % », relève David Bradbury de l’OCDE toujours dans les Echos. « Plus d’un tiers du total était même imposé à des taux inférieurs à 5 % ». La nouvelle taxe avec un taux minimal de 15% devrait provoquer un recul de 70% de ces tours de passe-passe et régimes d’exception. L’OCDE estime que seuls 7 % des bénéfices totaux des multinationales seront encore faiblement imposés.
Les recettes publiques se réjouissent
Tout cela fait que, toujours selon les derniers calculs de l’OCDE, les recettes seront même beaucoup plus importantes qu’initialement prévu. Cette nouvelle estimation se base sur un plus grand nombre de données (sur quatre exercices fiscaux, au lieu d’un) et des méthodes plus sophistiquées et pointues « qui ont notamment permis de constater que de nombreux bénéfices sont également faiblement imposés en dehors des paradis fiscaux connus », précise de son côté de Standaard. Ainsi les recettes de l’impôt sur les bénéfices augmenteront de 6,5 à 8,1 % au niveau mondial. Cela représente une augmentation des recettes publiques entre 155 à 192 milliards de dollars. Et plus spécifiquement pour la Belgique un gain pour le Trésor belge de 1.1 milliard, voire 1,5 milliard dans le meilleur des cas, dit encore De Standaard. Soit bien plus que les 634 millions d’euros initialement prévu dans le budget.
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