La Cour des comptes très réticente à l’idée d’évaluer les programmes politiques

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Le président de la Cour des comptes, Philippe Roland, a exprimé mardi ses vives réticences à l’idée de confier à son institution le soin d’évaluer les programmes des partis politiques. Outre la charge de travail considérable, il redoute la mise à mal de l’indépendance de la Cour.

La Commission de l’Intérieur de la Chambre a procédé à une série d’auditions sur deux propositions de loi du CD&V qui s’inspirent du modèle néerlandais. Chaque parti politique soumettrait ses priorités électorales à la Cour des comptes qui serait chargée d’en analyser l’impact budgétaire et économique. Celle-ci pourrait se faire assister d’autres institutions comme le Bureau du plan.

“Les propositions organisent un modèle de négociation entre la Cour des comptes et le politique, et le destinataire final n’est pas le parlement mais le citoyen qui doit voter, ce qui nous amène très loin du modèle défini par la Constitution. Je lance un appel à la prudence quand il s’agit d’amener la Cour des comptes dans l’arène politique. Dans cette arène, la Cour n’aura pas le rôle du lion”, a déclaré M. Roland.

D’un point de vue pratique, la mise en oeuvre de ces propositions implique un travail considérable. Aux Pays Bas, pas moins de 85 personnes sont mobilisées pendant deux mois avant les élections pour analyser les propositions des partis, a averti le commissaire adjoint du Bureau fédéral du Plan, Jan Verschooten. En Belgique, le Bureau ne peut compter pour une telle mission que sur 50 collaborateurs qui ont d’autres missions à remplir. La Cour des comptes, de son côté, a vu ses tâches se multiplier ces dernières années: du contrôle des recettes aux déclarations de mandats en passant par les obligations de certification contenues dans les “six pack” européen.

Ce travail implique en outre de définir des modèles et de s’accorder sur des critères qui peuvent être extrêmement variables: l’effet budgétaire, économique, en termes d’emploi, sur le développement durable, à court, moyen ou long terme, etc. De la part des partis, il exige aussi de formuler des propositions précises.

“Il ne faut pas sous-estimer la tâche. Une initiative comme celle-là demande un cadre, des moyens ainsi qu’un mandat très clair”, a indiqué Christian Valenduc, secrétaire de la section “fiscalité” du Conseil supérieur des Finances.

Tous les partis semblent favorables à l’idée de soumettre les programmes électoraux à une instance indépendante. Le MR a exprimé sa volonté de de voir cette législation entrer en vigueur “dès le scrutin du 25 mai 2014”. La députée Jacqueline Galant a déposé un amendement allant dans ce sens. A quelques semaines des élections, le cas paraît toutefois peu probable. Le Bureau du plan a d’ores et déjà fait savoir que son attention était accaparée par le respect des obligations budgétaires belges à l’égard de l’Union européenne. Bart Somers (Open Vld) a suggéré qu’une loi soit votée avant la fin de la législature, le gouvernement se chargeant de la mettre en oeuvre sous la prochaine législature.

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