Gouvernement bruxellois: Leisterh fait un pas de côté
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David Leisterh (MR) a annoncé vendredi en fin d’après-midi qu’il faisait un pas de côté en tant que formateur du gouvernement bruxellois.
Après “plus de 8 mois, force est de constater que malgré toute la force et la patience que j’ai pu y mettre, et ce jusqu’aux dernières heures avant ce communiqué de presse, les positions des différents partis ne permettent pas la formation d’une majorité. Plusieurs partenaires ont empêché toute exploration raisonnable d’une solution. A ce stade, je fais donc un pas de côté”, a-t-il expliqué dans un communiqué.
M. Leisterh avait annoncé il y a deux semaines qu’il entamait une série de consultations de la dernière chance, dans l’espoir de voir émerger une dynamique pour sortir la Région bruxelloise de l’enlisement politique observé depuis les élections de juin dernier. Il s’était dit prêt à tirer “toutes les conclusions qui s’imposent”.
“Il y a 5 ans jour pour jour, j’ai été élu président du MR à Bruxelles. Depuis, ma formation politique a gagné les élections et nous sommes redevenus le premier parti à Bruxelles. C’est cette victoire qui m’a conféré le rôle de formateur, un rôle qui ne provient pas d’une désignation royale mais d’une coutume qui a souvent porté ses fruits et qui consiste à obtenir un accord de gouvernement autour d’une majorité claire, des deux côtés du groupe linguistique”, a-t-il expliqué.
Un passage obligé pour faire bouger les choses
Pour M. Leisterh, “il est indispensable que le deuxième parti au parlement bruxellois, à savoir le PS, auteur d’une exclusive à l’égard du parti du Premier ministre (ndlr: la N-VA) prenne ses responsabilités. “Après 8 mois, j’espère que mon pas de côté sera le passage obligé pour faire bouger les choses dans une dynamique positive et constructive. Mon souhait le plus profond …est que Bruxelles dispose du gouvernement de réformes dont la Région a besoin”, a poursuivi M. Leisterh, disant rester “disponible pour ces réformes budgétaires, sécuritaires, socio-économiques tant attendues”
“Bruxelles a tout d’une grande et mérite des politiques qui dépassent des jeux tactiques de basse politique. Espérons que le geste posé aujourd’hui permette cela”, a-t-il conclu.
De son côté, le PS bruxellois a pris acte vendredi soir de la “démission de David Leisterh comme formateur du gouvernement bruxellois”. “Des contacts bilatéraux pris ces derniers jours, et constatant la polarisation extrême mise en scène à son encontre, le PS Bruxellois est arrivé à la conclusion que seule une initiative menée par des partis qui recueillent la confiance de tous est de nature à apporter une réponse à la crise actuelle”. “Dans ce cadre, le PS Bruxellois contribuera dans un esprit sérieux et constructif à toute initiative prise dans le but de parvenir rapidement à la constitution d’un gouvernement régional s’appuyant sur une majorité parlementaire stable”, a insisté la formation sortie deuxième du scrutin régional de juin dernier.
Christophe De Beukelaer et Elke Van den Brandt mèneront une mission d’information
Le chef de file des Engagés bruxellois Christophe De Beukelaer et la formatrice néerlandophone Elke Van den Brandt (Groen) ont annoncé vendredi soir qu’ils mèneraient une mission d’information dans les prochains jours.
“Le pas de côté de David Leisterh en tant que formateur et le refus du Parti Socialiste de prendre l’initiative en tant que deuxième parti francophone confirment l’impasse politique sans précédent que traverse Bruxelles. La situation est grave. Les défis en matière de qualité de vie, de sécurité, de propreté et de finances ne peuvent plus attendre. Pour reprendre les termes des partenaires sociaux: ‘l’inaction n’est plus une option'”, ont indiqué ces deux chefs de file dans un communiqué commun.
Tenant à saluer l’engagement de David Leisterh au cours des huit derniers mois et la multiplication des efforts que celui-ci a entrepris “pour bâtir une majorité stable”, ils ont dit “respecter pleinement sa décision de passer le relais”. “La décision de David Leisterh suspend de facto les négociations. Elke Van den Brandt met également en pause son rôle de formatrice néerlandophone pour pouvoir entamer une mission d’information bruxelloise avec Christophe De Beukelaer”, ont-ils précisé. “Nous devons, dans le respect des appartenances linguistiques, travailler ensemble, francophones et néerlandophones, pour aboutir à une solution. Notre mission est claire: réunir autour de la table des négociations un nombre suffisant de partis démocratiques pour enfin former un gouvernement bruxellois”, ont ajouté les deux informateurs.
Ceux-ci ont précisé qu’ils organiseront “des discussions franches”, en recevant dès lundi les 13 chefs de file des partis bruxellois. “Nous identifierons les véritables points de blocage et organiserons des rencontres multilatérales pour tenter de les dépasser, avant d’envisager les prochaines étapes de la formation d’un gouvernement, en ce compris la désignation éventuelle de médiateurs ou de démineurs”, ont détaillé M. De Beukelaer et Mme Van den Brandt. “Le temps presse. Bruxelles ne peut plus attendre. Nous appelons chaque responsable politique à prendre ses responsabilités et à libérer son agenda. L’intérêt général doit redevenir notre seule boussole pour garantir à Bruxelles un gouvernement stable, capable de relever les défis”, ont-ils conclu.
Un jeu du chat et de la souris
Au jeu du chat et de la souris, les formations politiques bruxelloises se renvoient la balle de celui/celle qui est responsable de la crise persistante, huit mois après les élections régionales. Dès le début des négociations, plusieurs formations ont émis des vetos: le MR, l’Open Vld et Les Engagés à l’égard du PTB et la Team Fouad Ahidar – pas franchement désirée non plus ailleurs, notamment du côté de Vooruit; du PS, d’abord discrètement et puis publiquement vis-à-vis de la N-VA. Idem, en ce qui concerne cette dernière du côté d’Ecolo et de DéFI mais ceux-ci ne sont pas enclins à monter dans une majorité après leurs défaites électorales respectives.
Depuis le mois de décembre, et l’annonce des néerlandophones de leur volonté de coalition entre Groen, Vooruit, l’Open Vld et la N-VA à laquelle le PS refuse de se joindre, le blocage est total. Le MR et les Engagés, initialement liés au PS dans un engagement commun à constituer l’aile francophone de la majorité, attribuent à celui-ci la responsabilité du blocage. Les socialistes s’en défendent, disant avoir été clairs d’emblée à l’égard de la N-VA, dont la présence au gouvernement tirerait le gouvernement plus à droite alors que le parlement bruxellois est davantage marqué à gauche. Et du côté néerlandophone, l’Open Vld n’en a jusqu’à présent pas démordu: il ne veut pas siéger au gouvernement sans la N-VA.
Les organisations patronales déplorent l’absence de gouvernement bruxellois
Plusieurs organisations patronales ont déploré vendredi l’absence de gouvernement bruxellois après que le formateur David Leisterh (MR) a jeté l’éponge.
L’Union des classes moyennes (UCM) et son équivalent flamand Unizo ont regretté un “naufrage politique, qui fragilise davantage un écosystème bruxellois déjà à la dérive”. Ce blocage institutionnel “met gravement en péril l’avenir économique de la Région Bruxelles-Capitale, et place les indépendants et PME en première ligne de l’inaction politique”, ajoutent les deux organisations. “Bruxelles a besoin d’un gouvernement opérationnel, capable de prendre des décisions claires et de mettre en place des réformes indispensables pour assurer la stabilité et la prospérité économique de la Région.”
Même son de cloche du côté d’Agoria Brussels. “La situation actuelle est intenable pour les entreprises bruxelloises. La situation budgétaire alarmante, le blocage d’Innoviris et d’autres administrations dû au système des douzièmes provisoires, la sécurité et le climat entrepreneurial catastrophique : il y a assez de défis qui ont besoin de réponses fortes et rapides”, alerte Brieuc Janssens, directeur de l’organisation. Pour Agoria Brussels, la formation d’un gouvernement est cruciale afin d'”améliorer la sécurité dans la région”, d'”assainir les finances publiques” et de “restaurer un climat favorable à l’entrepreneuriat”.