Après l’accord de Pâques du gouvernement, les patrons lancent un appel aux syndicats à quitter la rue pour dialoguer. Mais le syndicat socialiste annonce, au même moment, une action contre la limitation des allocations de chômage dans le temps.
Il y a de ces jours où les actualités se téléscopent. Les représentants du patronat, Frédéric Panier (Akt for Wallonia) et Pieter Timmermans (FEB) lancent un appel aux syndicats via la presse: “Quittez la rue. Venez négocier.” Maintenant que l’Arizona a présenté ses réformes, les dés sont jetés, il est temps de penser aux défis majeurs de ce pays.
Mais au même moment, le président de la FGTB donne une toute autre tonalité dans un autre quotidien: le syndicats socialiste va attaquer en justice la mesure de l’accord gouvernemental prévoyant une limitation des allocations de chômage dans le temps. Selon lui, le choc est tout simplement impossible à absorber si rapidement.
Pour rappel, une nouvelle grève générale est annoncée le 20 avril.
L’appel patronal
Frédéric Panier et Pieter Timmermans s’expriment en chœur dans Le Soir: non, les mesures prises par le gouvernement ne sont pas parfaites et oui, il y a de la place pour la concertation. “Le premier train de réformes auquel nous avons droit, ce n’est pas du sur-mesure pour les patrons, c’est du sur-mesure pour notre pays”, souligne l’administrateur délégué de la Fédération des entreprises de Belgique (FEB).
“La question n’est pas de savoir si c’est un accord sur mesure pour les employeurs, mais si c’est un accord sur mesure, en tout cas à la hauteur, pour relever les grands défis devant nous, estime le CEO d’Akt for Wallonie. J’en vois deux, de taille : que faire dans une Europe qui décroche, je dirais depuis quinze ans, sinon retrouver les façons de créer de la richesse afin de pouvoir la partager ? Et comment faire face efficacement au vieillissement et au dérèglement climatique sinon en mettant en œuvre les réformes structurelles qui peuvent redonner de la force à nos économies, ce qui permettra de financer nos régimes sociaux ? L’accord de gouvernement va dans le bon sens.”
La limitation des allocations de chômage dans le temps? “Un, ça existe déjà partout, dit Pieter Timmermans. Deux, ça a démontré son efficacité : la société est là pour vous aider, mais elle attend des efforts de la part de l’allocataire. La limitation dans le temps est un encouragement pour vraiment aller chercher de l’emploi, avec un accompagnement des Régions.”
D’oû cette invitation: “Là, je lance un appel aux syndicats : il vaut mieux se mettre à table avec nous et discuter de certaines choses que de manifester constamment dans la rue. Comment voulez-vous que nous continuions à avoir de l’espoir dans la concertation sociale quand des grèves et d’autres actions visent les entreprises ? Moi, je dis simplement : il y a beaucoup plus à obtenir autour de la table que dans la rue.”
L’attaque syndicale
Pas sûr que la réponse syndicale soit à la hauteur des espérances. La mesure concernant la limitation des allocations de chômage dans le temps est considérée comme un casus belli par les représentants des travailleurs. Les propos du ministre du Travail, David Clarinval (MR), annonçant 100000 exclusions de chômeurs au 1er janvier 2026 les ont choqués.
La FGTB entend donc riposter en justice, annonce L’Echo. Ses chiffres sont d’ailleurs plus élevés que ceux annoncés par le gouvernement: selon elle, ce sont pas moins de 145.000 personnes qui se retrouveraient exclues du chômage dès le mois de janvier 2026, dont une grande partie risque d’aller frapper à la porte des CPAS.
Une action sera donc intentée devant le tribunal du travail. Le syndicat socialiste compte s’appuyer sur le principe du “standstill” consacré par l’article 23 de la Constitution. Dans ses grandes lignes, cet article garantit à chacun de “mener une vie conforme à la dignité humaine”, notamment en garantissant un niveau d’emploi aussi stable que possible et le droit d’information, de consultation et de négociation.
Selon la jurisprudence, un délai de deux ans devrait être respecté avant la mise en œuvre d’une telle mesure. “L’idée est aussi de faire prendre conscience que les citoyens qui vivent en Belgique ont des droits et que ce n’est pas parce qu’on est chômeur que l’on a moins de droits que les autres”, précise Thierry Bodson.
Difficile, dans ce contexte, d’imaginer rapidement une joyeuse concertation sociale autour des mesures de l’Arizona.