Pas de réforme fiscale: la Vivaldi est morte, le MR montré du doigt trop facilement
Pschiiittttt! Il n’y aura pas de réforme fiscale cette législature. Le gouvernement fédéral n’a plus de projet. Des arguments libéraux auraient dû être entendus. La politique est la grande victime.
Mais que va encore faire le gouvernement fédéral d’Alexander De Croo (Open VLD) d’ici le 9 juin 2024? Gérer les affaires courantes. Pas de réforme structuelle, en tout cas. La réforme fiscale est morte et enterrée, après une réforme des pensions qui n’en était pas une. La majorité Vivaldi, composée de sept partis, était décidément trop écartelée idéologiquement et gangrénée par des relations personnelles déteriorées: impossible pour elle de donner le jour à ses ambitions.
Pour être de bon compte, il faut reconnaître que le contexte a changé en cours de législature. Après avoir géré les crises (Covid, Ukraine, inflation), le gouvernement s’est retrouvé dans un contexte plus difficile pour mener à bien ces réformes, en bout de course, dans un contexte de pré-campagne électorale, alors que la situation des finances publiques se déteriore à vitesse grand V. On était toutefois en droit d’attendre davantage de courage et d’audace.
La Vivaldi, qui était née pour porter un “projet positif pour la Belgique” face au nationalisme flamand et à la volonté confédérale de la N-VA, a échoué sur ce terrain vital. Elle portera une lourde responsabilité sur le résultat attendu dans les urnes, l’an prochain, et la montée des extrêmes. “Le seul gagnant est l’anti-politique”, souligne le politologue Carl Devos (UGent).
Le MR pointé du doigt
En attendant, on se demande ce que socialistes, écologistes et libéraux pourront encore faire ensemble tant leurs relations, singulièrement du côté francophone, se sont dégradées. Depuis six mois, rouges et vert accablent en permanence Georges-Louis Bouchez, comme pour mieux démontrer qu’il est impossible de travailler (encore) avec lui.
En retour, les libéraux se la jouent “seul parti libéral de la coalition”, celui qui défend la création d’activités et empêche les taxes nouvelles. Quitte à faire grincer des dents au sein du parti frère, l’Open VLD. Le MR ne se cache même plus dans son rapprochement avec la N-VA sur le terrain socio-économique.
Dans le cas de l’échec de la réforme fiscale, on épingle sa responsabilité, “totale” pour reprendre les termes de Thomas Dermine (PS). Il est vrai que le vice-Premier libéral David Clarinval avait lui-même refusé de poursuivre, lundi, avant de participer à une réunion en Conseil des ministres restreint pour acter l’échec. C’est évident: le MR est celui qui a empêché d’atterrir avant le 21 juillet, comme promis.
Des arguments libéraux qui valent
Toutefois, il est un peu facile de considérer que le MR aurait bloqué uniquement pour des caprices visant à défendre les plus riches, comme on le prétend à gauche. Oui, une part de cette résistance vient de la volonté de ne pas taxer davantage le capital, mais ce n’est pas l’essentiel de l’histoire.
Trois arguments libéraux auraient mérités d’être davantage entendus. Un, le budget dérape sérieusement et il est irresponsable de ne pas intégrer cette réforme dans un tout, en intégrant la nécessité de réduire les dépenses, aussi. Deux, le niveau de taxation dans ce pays est indécent et certaines des mesures prises pour financer la diminution des charges, notamment les hausses de TVA, étaient imbuvables. Trois, la hausse du taux d’emploi doit être une priorité absolue dans ce pays et si le levier fiscal était un moyen d’activer davantage de sans-emplois, d’autres mesures d’accompagnement étaient nécessaires.
Ce qui est vrai, par contre, c’est que cet échec est préjudiciable pour tous les partis de la Vivaldi et pour la politique dans son ensemble.
La Vivaldi est morte, on se demande ce qu’elle pourra encore faire, mais aussi comment elle pourrait renaître après le prochain scrutin. La N-VA salue le blocage du MR en reprenant ses arguments, on voit le jeu politique s’ouvrir d’une autre manière, mais alors que tous les partis devront peut-être collaborer lors de la prochaine législature, c’est la perspective d’un blocage permanent qui glace le sang.
Car il ne manquera pas de faire renaître des doutes existentiels pour la Belgique. Dès 2024.
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