Le gouvernement De Croo fragilisé, la justice bruxelloise éreintée, le pays divisé

Olivier Mouton
Olivier Mouton Chef news

Après les manquements constatés dans le suivi du terroriste tunisien, les priorités politiques s’orientent vers la sécurité. Sans que toutes les zones d’ombre soient levées. Et dans un contexte polarisé comme jamais.

L’assassinat de deux supporters suédois par un Tunisien, lundi 16 octobre, aurait donc pu être évité. Les manquements sont innombrables. Aucun signalement au sujet de sa radicalisation, de ses actes de délinquance ou de sa demande d’asile n’ont été suivis d’effet. Surtout, une demande d’extradition émanant de Tunisie est passée sous les radars: le ministre de la Justice, Vincent Van Quickenborne (Open VLD) a démissionné ce week-end après cette faute impardonnable, qui contredisait tout l’argumentaire du gouvernement sur la difficutlé de coopérer avec ls pays d’origine.

Et maintenant? Voici quatre conséquences majeures de cette crise.

1 Le gouvernement fragilisé

Le remplacement de Vincent Van Quickenborne a été réalisé en un tour de main, par son chef de cabinet adjoint, Paul Van Tigchelt. En la personne de “Van Quick”, les libéraux flamands perdent un homme fort, eux qui sont déjà dans les limbes dans les sondages. Surtout, tous les enseignements n’ont pas été tirés des événements de la semaine passée. La ministre de l’Intérieur, Annelies Verlinden (CD&V), et la secrétaire d’Etat à l’Asile, Nicole de Moor (CD&V), auraient également pu partager une reponsabilité politique devant les errements des services.

Circulez, il n’y a plus rien à voir: désormais, le gouvernement De Croo lavera son linge sale en famille après avoir fait la transparence durant quelques jours. Le leitmotiv du Premier ministre, Alexander De Croo, reste d’oeuvrer à ses solutions. S’il tombait, en effet, cela ouvrirait une période plus trouble encore. La Belgique, cela dit, continue à donner l’image d’un “failed state”.

Et pendant ce temps, son parti, l’Open VLD, explose: l’ancienne présidente Gwendolyn Rutten quitte la scène et son ancien homme fort Patrick Dewael annonce qu’il siègera désormais comme indépendant au parlement.

2 La justice bruxelloise pointée du doigt

Ainsi, une demande d’extradition émanant de la Tunise est-elle restée… dans la mauvaise armoire, alors que le magistrat en charge a traité tous les autres dossiers comparables. La justice bruxelloise est montrée du doigt et constituera un des chantiers majeurs des semaines à venir. Sous-financée, dépeuplée en raison des contraintes linguistiques, surchargée…: les maux sont connus de longue date. Reste à trouver des moyens au sein d’un budget déjà à la corde.

Plus largement, en dépit des réformes menées, la justice et la police restent les parents pauvres d’une démocratie belge au sein de laquelle l’exécutif déconsidère la législatif et le judiciaire. Le mal est profond.

3 L’économie sera de la revue

Comme toujours ,une urgence chasse l’autre. Tel est le lot d’une politique soumise aux événéments et à la pression de l’opinion publique. A peine le budget 2024 bouclé, et alors que l’on entre en campagne électorale, voici donc le gouvernement De Croo qui s’accroche au pouvoir pour éviter les affaires courantes et gérer ce qui doit l’être.

Les chantiers de réformes structurelles concernant la fiscalité, l’emploi ou les pensions sont reportées à la pochaine législature. C’était déjà acquis. Mais la campagne électorale va se dérouler dans un climat où les dossiers économiques occuperont une portion congrue. Le congrès politique du MR, ce week-end, en a témoigné: cap sur une vision sécuritaire de la société.

4 Une société polarisée à l’extrême

Enfin, tant l’attentat que les secousses sur les opinions publiques du conflit au Proche-Orient polarisent davantage encore nos sociétés qui étaient déjà écartelées. Les semaines à venir risquent d’être sensibles, a fortiori en cas d’intervention terrestre d’Israël dans Gaza, d’élargissement du conflit ou de nouveaux attentats sur le sol européen. Avoir un gouvernement de plein exercice dans ce contexte est une bonne chose, mais quelle est encore sa crédibilité?

Le PTB a déjà choqué en mettant sur pied d’égalité les terroristes du Hamas et une armée israélienne, “un peu plus terroriste encore” (sic). La gauche rivalise de positions sur le terrain communatariste en vue des élections. Quant à l’extrême droite flamande, elle se frotte les mains de voir ses sujets de prédilection à l’avant-scène.

2024 promettait une Belgique coupée en deux, tout est là pour que cela se confirme.

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