Le clash annoncé de la taxe sur les plus-values

BELGA PHOTO JONAS ROOSENS
Baptiste Lambert

Laisser Georges-Louis Bouchez en dehors du gouvernement était un risque pour l’Arizona. Il n’aura pas fallu attendre longtemps. Et le premier rififi entre Bart De Wever et le président du MR s’est produit sur la taxe des plus-values. C’était annoncé.

À peine 24 heures. Au lendemain du vote de confiance de la nouvelle équipe fédérale, Georges-Louis Bouchez mettait déjà son Premier ministre dans l’embarras dans une double interview accordée au Tijd et au Morgen. Il y faisait mention d’un accord manuscrit entre Bart De Wever et lui, au sujet de la taxation sur les plus-values.

Et que contenait “bout de papier” soi-disant signé par les deux protagonistes ? Que les investisseurs qui gardent leurs actions pendant au moins 10 ans sont dispensés de payer cette taxe. Il est vrai que cette exemption est apparue et a disparu au gré des super-notes du formateur, mais elle ne faisait pas partie de la dernière version de l’accord de gouvernement.

L’opposition n’en demandait pas tant

Dans l’opposition, on a bien sûr flairé la bisbille gouvernementale pour lui donner de l’ampleur. Le chef de groupe du PS, Pierre-Yves Dermagne, a demandé des clarifications au Premier ministre : “On exige que ce document et tous les autres avenants à l’accord de gouvernement soient rendus publics par le Premier ministre, puisque Monsieur Bouchez a rendu public cet élément.”

Dimanche matin, le ministre des Finances, Jan Jambon (N-VA), bottait en touche : “Bien sûr, au cours des négociations, de nouvelles propositions sont toujours mises sur la table, mais elles ne comptent que si un accord formel est conclu. Je suis donc très formel : à part l’accord de gouvernement, il n’existe rien d’autre à ma connaissance. »

Même son de cloche du côté du Bart De Wever : “En dehors de l’accord de gouvernement et du tableau budgétaire, il n’y a à mes yeux pas de documents ayant un statut qui leur permettrait d’être réclamés par le Parlement.”

Stefaan Van Hecke, le chef de groupe d’Ecolo-Groen, qui réclamait également ce document, note toutefois une subtilité : “Il ne dit pas qu’il n’y a pas de documents, mais plutôt qu’il n’y a pas de documents que le Parlement puisse exiger.”

“Entre la version Bouchez et la version Jambon, quelqu’un ne dit pas la vérité”, a renchéri Pierre-Yves Dermagne, qui enjoint le Premier ministre “à se présenter devant le Parlement, sans tarder !”

Les tractations sont loin d’être terminées

Ce dossier sentait la poudre dès l’annonce de l’accord de gouvernement. Et pour cause : plusieurs versions de l’accord transitaient dans les rédactions, et elles différaient sur la taxe des plus-values, notamment entre les versions francophone et néerlandophone. Des traductions maladroites, l’absence d’une ligne dans l’accord en français et quelques changements de dernière minute, fruits de négociations au finish.

Cela fait désordre, malgré quelques circonstances atténuantes. “L’accord sur la taxation des plus-values est tombé dans les dernières heures de ces négociations-marathon. Les collaborateurs devaient travailler dans des conditions très difficiles. Mais ce n’est pas un drame. Dans un accord de gouvernement, on fixe les objectifs, les principes et les stratégies. Les modalités seront le lot du ministre des Finances. Lorsque Jan Jambon disposera d’un projet de loi, nous en reparlerons”, a nuancé Georges-Louis Bouchez.

Jan Jambon ne veut pas anticiper ce débat qui s’annonce toutefois déjà houleux. Le ministre des Finances a confirmé que des éléments devraient être complétés dans le projet de loi. Cela concerne la condition des 10 ans, mais aussi la participation à partir de laquelle un investisseur peut bénéficier du taux progressif (20% pour le moment). Là aussi, il y a désaccord entre le MR, Vooruit et le cd&v.

Comme un air de Vivaldi

Quoi qu’il en soit, les socialistes flamands ne se laisseront pas faire par l’étrange coup de com’ de Georges-Louis Bouchez. “Avez-vous lu une exemption pareille dans l’accord de gouvernement ?”, a ironisé Conner Rousseau, président de Vooruit.

En tout cas, cette sortie de Bouchez n’a pas faire rire Sammy Mahdi, le président du cd&v, dans De Ochtend, sur la VRT : “Nous avons pour mission, en tant que gouvernement, de mettre de l’ordre et faire de grandes réformes. Débuter de cette manière ne convient pas. Si on a l’ambition de faire mieux que les générations précédentes, alors on doit, dès la première direction, aller tous dans le même sens.”

Et de conclure : “Il y a eu beaucoup de bouts de papier qui ont circulé dans tous les sens pendant les négociations. On a beaucoup griffonné, mais finalement ce sont l’accord de gouvernement et les tableaux budgétaires qui comptent. Et il est clair que l’on doit aller chercher 23 milliards d’euros, dont 2,3 milliards du côté des épaules les plus larges. Là-dedans, 500 millions viennent d’une taxe sur les plus-values. Il y a un bout de papier très clair, c’est l’accord de gouvernement”.

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