Elia, Fluxys, Proximus, bpost, Umicore, BNP Paribas…: 2025, année cruciale pour un Etat actionnaire stratège

Princesse Elisabeth. L’île énergétique permettra à terme de rapatrier pas moins de 13 TWh par an d’électricité verte produite en mer du Nord.
Olivier Mouton
Olivier Mouton Chef news

Les mauvaises nouvelles et les incertitudes se multiplient pour les interventions de l’Etat fédéral dans les entreprises publiques. De Bernard Gustin à Guillaume Boutin en passant par Chris Peeters et Michael Anseeuw, l’année nouvelle ouvre une période décisive pour convaincre et séduire les investisseurs. Attention, bijoux de famille en péril.  

C’est le paradoxe du moment et il est révélateur. Les entreprises publiques ou semi-publiques on des besoins considérables pour faire face aux défis de l’heure. De l’énergie aux télécommunications en passant par les services postaux ou financiers, les investissements à effectuer sont gigantesques: réseaux électriques, fibre optique, digitalisation… sont devenus des nécessités, avec des milliards à trouver.

Or, Elia, Fluxys, Proximus, bpot, Umicore voire BNP Paribas défraient la chronique plus souvent qu’à leur tour…

Leur modèle de gouvernance, l’absence de stratégie claire (ou du moins lisible) et la paralysie politique découragent les investisseurs. “L’Etat a perdu 2,5 milliards d’euros en bourse cette année”, résumait L’Echo en début de semaine. La perte de valeurs secoue les fondements de certaines institutions, un débat a eu lieu au parlement au sujet de Proximus et même le récent ancrage public au sein d’Umicore a été suivi par une dégringolade boursière.

Arizona: reprise en mains nécessaire

Des enjeux structurels propres à ces secteurs stratégiques partout en Europe expliquent les difficultés. Dans certains cas, des difficultés conjoncturelles internes aux entreprises n’ont pas facilité les choses. Et dans ce contexte fragile, le grand silence de la ministre en charge des Entreprises publiques, Petra De Sutter (Groen), a laissé plus d’un interloctueur pantois. Bien sûr, le gouvernement est en affaires courantes depuis cet été, mais cela n’explique pas tout…

Le gouvernement De Wever, s’il finit par voir le jour, devra prendre ce taureau par les cornes. Des discussions relatives aux participations de l’Etat, à la gouvernance, voire au statut même de ces entités auront-elles lieu? Cela risque de s’imposer, dans un contexte délicat: la future Arizona devra économiser de quatre à cinq milliards par an, la baisse de valeurs des actions interdit toute aventure et compromet toute revente, a priori, sauf à perdre gros.

Ces bijoux de famille sont, par ailleurs, stratégiques pour l’activité de l’Etat fédéral lui-même. Plus que jamais, gérer son énergie, protéger ses communications ou garder la mains sur les flux financiers relève de l’essentiel pour une démocratie. Entre le désir de privatisation idéologique des uns, surtout au MR et à la N-VA, et le souci social des autres, chez Vooruit ou au sein des partis chrétiens-démocrates, le coeur de l’Arizona risque de balancer.

Des personnalités en vue

Pour Elia, la déconvenue boursière est une nouvelles d’autant plus préoccupante que quelque dix milliards d’investissements seront nécessaires dans les réseaux pour faire face au défi de la transition énergétique. En même temps, le potentiel scandale du surcoût de l’île éolienne off-shore Princesse Elisabeth – passé de 2,2 milliards à 7 milliards – continuera à faire couler de l’encre. Spécialiste des remises à flots d’entreprises en péril, Bernard Gustin (Brussels Airlines, Lineas…) deviendra CEO en janvier et aura fort à faire.

Son prédécesseur chez Elia, Chris Peeters, s’emploie désormais à… redresser la barre chez bpost, bousculée par le scandale de la concession de la distribution des journaux et malmenée par un changement fondamental de modèle. “L’entreprise va se renforcer sur des marchés en croissance”, nous disait-il lors d’un Trends Talk, en décembre. Mais lescolis ne compensent pas la baisse du courrier et de nouveaux services dovient être inventés.

Chez Proximus, le CEO Guillaume Boutin fait face à des défis d’une nature similaire, dans un marché européen des télécoms soumis à une concurrence féroce et avec deux caillous dans la chaussure: l’arrivée d’un quatrième opérateur sur le marché belge, Digi, et le financement sur fonds propres de l’installation de la fibre (coût: quelque 6 milliards). “La valeur de Proximus en bourse ne révèle en rien sa valeur intrinsèque”, disait-il lors de son audition au parlement, après les critiques du MR et de laN-VA. Le voilà désormais à la tête de Proximus Global qui réunit les activités internationales digitales de l’opérateur historique belge. Une fuite en avant.

Même Umicore souffre. L’Etat belge était entré dans son capital, via son bras financier la SFPIM, mais le cours de l’action a baissé de moitié dans la foulée. La faute au ralentissement du secteur automobile et aux choix difficiles à faire en matière de batteries électriques.

La valeur de BNP Paribas a également glissé, en dépit des bons résultats du secteur financier: la faute à une autre instabilité politique, en France celle-là.

L’urgence de l’heure, les défis environnementaux, sociaux ou géopolitiques nécessitent un Etat stratège. Les experts ne cessent de le marteler. La réalité, toutefois, témoigne de la difficulté d’accomplir cette mission.

2025 s’annonce comme une épreuve de vérité.

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