Comment Georges-Louis Bouchez a piégé Maxime Prévot en restant hors du gouvernement
Le président du MR a attendu la toute dernière minute pour annoncer son casting ministériel, lundi matin. Sans lui. Alors qu’il plaidait pour que tous les présidents de partis soient du gouvernement, il a laissé son homologue des Engagés y aller seul. Voilà le MR débarrassé d’un rival encombrant, involontairement… ou pas.
Georges-Louis Bouchez, président du MR, a piégé Maxime Prévot, président des Engagés, lors du casting ministériel. Volontairement ou pas, on ne le saura sans doute jamais, du moins cela ne sera pas confessé. Mais en restant en dehors du gouvernement et à la présidence du MR, le libéral a désormais un boulevard devant lui avec le départ de son homologue, charismatique et maître d’œuvres de la refonte des Engagés.
Pourtant, c’est bien Georges-Louis Bouchez qui avait plaidé le premier, et à répétition, pour que les présidents de partis fassent partie du gouvernement. Ce ne sera pas son cas. L’annonce de cette décision, à la dernière minute, n’a laissé aucun choix à Maxime Prévot. Qui n’a guère apprécié la manœuvre. “C’est un coup tout à fait volontaire”, tranchent certains dans les milieux sociaux-chrétiens.
Colère et storytelling
Le président des Engagés a appris le casting ministériel libéral alors qu’il était à la RTBF radio. Sa première réaction fut teintée de stupeur et ses premiers mots en témoignent: “Je respecte les choix qu’il pose, a-t-il souligné à l’encontre de Bouchez. J’entends que c’est pour lui le gage de la stabilisation de sa famille politique. Il m’importera de m’assurer qu’il y aura le même égard pour la stabilisation de l’action gouvernementale.” C’est froid. Traduisez: je n’étais pas informé et ce choix m’indispose.
Selon nos informations, Maxime Prévot était réellement en colère après ce coup de Jarnac. Même s’il ne l’exprimera jamais et dispose, avec le poste de vice-Premier et des Affaires étrangères, d’un beau portefeuille. Il doit quitter la présidence du parti, qu’il cède temporairement au député européen Yvan Verougstraete, ET le maïorat de Namur.
Georges-Louis Bouchez a justifié son choix tardif. “Occuper de hautes fonctions politiques, comme celle de Président de parti impose souvent à votre cerveau de lutter contre vos envies, justifie le MR. Rejoindre personnellement ce gouvernement aurait été un immense honneur. Mais je dois encore contribuer à conclure les négociations bruxelloises, garantir la bonne exécution des accords de gouvernement à tous les niveaux de pouvoir, mais aussi et surtout porter un projet de société global au nom du Mouvement réformateur.“
Le storytelling de sa décision laisse entendre qu’il a contacté tous les ténors du parti dimanche pour forger son opinion, avant de “dormir dessus”. L’annonce a été faite en toute dernière minute, lundi, avant la prestation de serment au palais à 9h, prenant tout le monde au dépourvu. Seul Bart De Wever a été informé.
Pour Maxime Prévot, cela peut être perçu commue une trahison. Son principal rival – bien qu’ami politique – continuera à se positionner, tandis que les Engagés doivent passer par la case “élections internes”. Logique, mais aurait-il agi de même si GLB avait annoncé son choix plus tôt?
Une première “représaille”
Faut-il y voir une première représaille? En quittant son poste de bourgmestre de Namur, Maxime Prévot a choisi une bourgmestre faisant fonction de son parti, plutôt qu’une libérale, comme ce fut le cas lors de son précédent mandat ministériel.
“Plusieurs hypothèses étaient susceptibles d’être légitimes”, communiquaient les Engagés, lundi soir. Dont “celle de Anne Barzin (MR), ayant déjà assumé le remplacement de Maxime Prévot de 2014 à 2017 lorsqu’il était ministre wallon”. Mais c’est finalement Charlotte Bazelaire (Les Engagés), l’élue ayant obtenu le plus de voix après Maxime Prévot lors des dernières élections communales, que le président a lui-même “choisi de privilégier”.
Parmi les arguments: “Les Engagés ayant frôlé la majorité absolue en octobre dernier, il n’apparaissait pas raisonnable que le mayorat soit cette fois attribué à une autre famille politique.”
Cette tension entre les deux hommes, qui ne sera jamais confirmée dans leur chef, portera-t-elle préjudice à la “belle entente” MR – Engagés? C’est trop tôt pour le dire, les deux formations étant désormais engagées ensemble dans trois exécutifs, en attendant la Région bruxelloise. Cette entente est, notamment, cruciale pour la stabilité du gouvernement fédéral.
Seules les prochaines années le diront. Mais quoi qu’il en soit, l’épisode est remarquable.
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