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“Faut-il un Etat stratège?”

A l’heure où, pour réparer une partie des dommages causés par le confinement qu’ils ont décidé, les Etats et la Banque centrale européenne injectent d’énormes masses de capitaux, on entend de plus en plus de voix proposer d’en revenir à une plus grande intervention de l’Etat dans l’économie, à lui allouer à tout le moins un rôle de “stratège”, voire à en revenir au système de la planification.

Celle-ci a été à l’honneur (et l’est encore dans une certaine mesure) dans les Etats communistes, tout comme, autrefois, dans ceux d’inspiration fasciste. Les plans quinquennaux soviétiques faisaient partie d’une politique économique globale qui fut la cause des pires famines de l’histoire russe.

Il est vrai qu’après la Seconde Guerre mondiale, plusieurs Etats occidentaux dont la France et la Belgique ont aussi, pendant quelque temps, recouru à une planification. Cette période fut une ère d’expansion économique, sans qu’il soit démontré qu’elle était la conséquence de la planification ou qu’elle avait été couronnée de succès ” malgré ” celle-ci.

Il est étrange que ces propositions d'” Etat stratège ” qui ne proviennent pas toujours d’économistes catalogués à gauche soient particulièrement insistantes en cette période où, sans doute plus que jamais, l’inefficacité des Etats a été démontrée de manière éclatante. Non contents d’avoir décidé, sans doute à la légère, d’un confinement qui est la cause réelle de la pire crise économique en temps de paix depuis 1945, les Etats ont, dans la gestion courante de la crise, commis des erreurs multiples et répétées, tant dans les conseils et instructions donnés à la population que dans la fourniture de certains produits, qu’ils ont entendu monopoliser.

Quelqu’un souhaite-t-il vraiment doter de pouvoirs de stratège notre ministre de la Santé, Maggie de Block ? Ses multiples maladresses ne sont toutefois pas isolées et d’autres ministres du gouvernement n’ont guère fait mieux, tandis que les mêmes erreurs ont été commises, au plus haut niveau, par le président français et ses ministres. Le tout sans parler de la gestion catastrophique de la crise par le gouvernement socialo-communiste espagnol qui, en décrétant seulement au mois de mai une quarantaine obligatoire pour tous les voyageurs arrivant en Espagne, a définitivement saccagé la saison touristique du pays européen qui tire le plus de ressources de cette industrie.

Les Etats ont montré qu’ils n’étaient pas capables de gérer, même au quotidien. Il ne faut pas attendre d’eux qu’ils exercent une fonction de ” stratège “. Il n’y a aucune raison de penser que les hommes et les femmes élus à la tête de l’Etat ont de plus grandes capacités de gestion que les entreprises et les individus qui gèrent pour leur propre compte. Il est encore plus étonnant de constater, chez les partisans de l’Etat stratège, une fascination pour le rôle du Parti communiste dans la République populaire de Chine.

Sans doute celle-ci n’a-t-elle plus la même conception de la stratégie d’Etat que Mao, dont les décisions économiques acculèrent des dizaines de millions de Chinois à la mort par manque de nourriture. Les entreprises chinoises ont commencé à prospérer lorsque le pays s’est adapté à l’économie de marché. Mais il est vrai que le Parti conserve un rôle stratégique important. Cette mission et les pouvoirs qui en découlent, propres à un régime totalitaire, n’ont pourtant pas empêché le pays d’être à la source d’une épidémie dont le monde entier subit les conséquences. Non seulement l’Etat stratège n’a pas été capable de l’empêcher mais, au lieu d’intervenir lorsqu’il en était encore temps, il a laissé la pandémie se propager, a tout fait pour en cacher l’existence et a manifestement falsifié le nombre de victimes, avant et après l’expansion de l’épidémie. Curieux Etat stratège, toujours prêt à adopter la méthode forte, celle du confinement, imité par la plupart des Etats européens alors que la petite Taiwan s’en est abstenue et a géré la crise mieux que personne.

Les crisespeuvent, certes, être mises à profit pour changer ce qui, dans le système, a mal fonctionné. Il est certain qu’en l’espèce, la plupart des Etats ont été incapables de faire face correctement à celle-ci, malgré des pouvoirs considérables et des budgets colossaux. Les choses doivent changer. Mais certainement pas dans le sens d’une attribution de pouvoirs ou de moyens financiers encore plus importants aux Etats. L’heure est venue de ramener ceux-ci au rôle qu’ils n’auraient jamais dû perdre : celui de garantir les droits et les libertés des citoyens.

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