En 20 ans, Hong Kong a perdu de son charme pour ses voisins chinois

Hong Kong harbour with city background © Getty Images/iStockphoto

Adolescente, Naomi Wu allait souvent faire du shopping à Hong Kong. Mais cette jeune Chinoise fuit désormais l’ex-colonie britannique qui, 20 ans après sa rétrocession à Pékin, a perdu beaucoup de son pouvoir d’attraction en Chine continentale.

Vêtements, maquillage, sacs à main: Naomi Wu et ses amies dévalisaient autrefois les boutiques hongkongaises, réputées en Asie. Aujourd’hui, celle qui habite à Shenzhen (sud), clinquante métropole moderne frontalière de Hong Kong, a un autre discours.

“Les produits chinois sont désormais tout aussi bien, voir meilleurs”, estime la programmeuse informatique de 23 ans.

“En Chine continentale (c’est-à-dire Hong Kong non compris), il y a maintenant plein de centres commerciaux bien conçus, et de nouveaux bâtiments. Sans compter les nouvelles lignes de métro et les parcs. Shenzhen a construit davantage de gratte-ciels l’an passé que les Etats-Unis et l’Australie réunis”, énumère-t-elle.

Hong Kong célèbrera le 1er juillet les 20 ans de sa rétrocession. Mais le territoire vit de plus en plus dans l’ombre de la Chine, devenue entretemps une puissance mondiale, commerciale et culturelle.

Car depuis 1997, Pékin et Shanghai ont bien changé. Elles proposent désormais un choix de bars, restaurants, centres commerciaux et quartiers d’artistes qui n’ont plus beaucoup à envier aux lieux de sorties hongkongais.

En deux décennies, la Chine a gagné cinq places pour devenir la 2e économie planétaire. Dans le même temps, l’ex-colonie britannique glissait lentement du 24e …au 33e rang mondial.

‘On est dénigré’

Et les consommateurs chinois peuvent désormais commander tout ou presque en se prélassant sur leur canapé avec leurs smartphones, grâce au formidable boom du commerce en ligne.

Un phénomène qui a une influence directe sur le tourisme vers Hong Kong: le nombre de visiteurs venant de Chine continentale y chute désormais de façon croissante (-7% en 2016 sur un an).

Avec ce fossé économique qui se réduit, le ressentiment est croissant à Hong Kong contre une “continentalisation” supposée du territoire autonome, à l’heure où la Chine y étend son influence dans le commerce, la politique, l’éducation ou encore les médias.

Certains l’accusent de resserrer son emprise sur Hong Kong, de saper son identité et ses libertés. Des milliers de manifestants avaient défilé en 2014 dans les rues de la ville pour réclamer du gouvernement central à Pékin des avancées démocratiques.

Et les touristes venus de Chine continentale, aux manières jugées rustres par les Hongkongais, pâtissent de ce climat. Et ne se sentent plus toujours les bienvenus dans le territoire.

“On dépense beaucoup d’argent, mais on est dénigré”, déplore Naomi Wu, choquée d’avoir entendu des critiques acerbes dans le métro hongkongais lors de son dernier séjour.

Hostilité mais liberté

Sur les réseaux sociaux, le désenchantement est le même.

“L’ambiance est très différente d’avant. Dans les rues, les gens me lancent des regards noirs”, écrit l’internaute Jennifer Liu sur Zhihua, un site internet chinois de questions-réponses.

“Les infos que je vois désormais en provenance de Hong Kong me paraissent étranges, pleines d’hostilité.”

Mais Hong Kong a quelque chose que les habitants de Chine continentale n’ont pas: d’importantes libertés. Selon le principe “Un pays, deux systèmes” entériné en 1997 pour 50 ans, le petit territoire autonome (1.000 km carrés) bénéficie par exemple de la liberté d’expression et de l’indépendance de la justice.

Et des milliers de Chinois “de l’intérieur” continuent ainsi à se rendre à Hong Kong chaque année pour diverses raisons: qualité de l’enseignement, placements immobiliers, opportunités de carrière, air plus propre, nourriture plus saine, ou rêve d’obtention d’un “passeport” hongkongais, plus pratique pour voyager.

“L’attrait de Hong Kong auprès des Chinois du continent décline, mais beaucoup veulent toujours y aller pour étudier car ils trouvent là-bas un environnement plus sûr”, déclare à l’AFP Qiao Mu, spécialiste des médias basé à Pékin.

“Ils ont toujours envie de vivre dans une société qui est libre.”

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