Donald Trump vs. Xi Jinping : l’Europe, entre le marteau et l’enclume ?

crédit : Getty Images.

Donald Trump pourrait engager les États-Unis dans une guerre commerciale avec la Chine. Cela aurait des répercussions énormes sur l’Europe, montre une nouvelle étude d’Allianz Trade.

L’impact du retour de Donald Trump à la Maison Blanche sur l’Europe fait couler beaucoup d’encre, depuis les élections américaines au début du mois. Mais à côté de cet impact direct, il pourrait aussi y avoir un impact qui vient par effet de ricochet : celui découlant de la relation entre Washington et Pékin.

C’est que Trump souhaite instaurer des hausses agressives des taxes d’importation sur les produits chinois (à 25%, voire 60% dans le scénario extrême). La Chine devrait répliquer, ce qui pourrait mener à une surenchère de taxes et à une guerre commerciale.

Le crédit-assureur Allianz Trade s’est penché sur la question. “Les relations entre les États-Unis et la Chine resteront tendues et le commerce mondial continuera à se fragmenter. L’UE sera de plus en plus prise en étau entre les États-Unis et la Chine. L’économie belge, petite, ouverte et orientée vers l’exportation, est également menacée par l’impact d’une guerre commerciale”, peut-on lire.

Chiffres

Quel serait l’impact sur la Belgique ? Allianz Trade a fait les calculs. À politique inchangée par rapport à aujourd’hui, les gains de l’exportation des entreprises belges seraient de 67 milliards de dollars, sur la période de 2025-2026. Mais ces gains pourraient chuter en cas de guerre commerciale limitée (scénario probabble) : ils ne seraient alors plus que de 64,4 milliards de dollars. Ils chuteraient encore plus en cas de guerre commerciale totale (scénario extrême), à 58,4 milliards de dollars. Résultat : pertes d’emplois et hausse du déficit budgétaire, qui est déjà important.

Au-delà de la Belgique, “une guerre commerciale ravivée mais contenue pourrait ramener la croissance nominale du commerce mondial en dessous de 5 % en 2026 (-0,6 point de pourcentage), avec 67 milliards d’USD d’exportations menacées en Europe et en Chine en 2025-2026 (la moitié du total mondial)”, selon le rapport.

Europe divisée

Les risques sont grands pour l’Europe. Le rapport se veut comme un avertissement. Le Vieux continent pourrait finir par se retrouver entre deux chaises, “à cause de demi-mesures et de divisions internes” – divisions qui affaiblissent la position de négociation de l’UE et les États membres. Voire entre le marteau et l’enclume, car les deux superpuissances qui ont une stratégie de diviser et de conquérir.

Le point faible de l’Europe est sa dépendance aux autres acteurs. Par exemple pour les batteries, les dix premiers importateurs sont asiatiques, dont six sont chinois. Et Northvolt, qui devait devenir le poids lourd européen du marché mondial des batteries, est au bord du gouffre. “L’absence d’une politique industrielle stratégique propre à l’UE est particulièrement désastreuse”, note Johan Geeroms, Director Risk Underwriting Benelux chez Allianz Trade.

Un monde qui se fractionne

Cette guerre commerciale serait en fait la continuation logique d’une tendance déjà en cours, à savoir la fragmentation du monde en plusieurs pôles, ou blocs. Elle viendrait exacerber cette tendance. Les Etats-Unis importent moins depuis la Chine, et la Chine exporte davantage vers des pays qui lui sont proches, géopolitiquement. Le commerce bilatéral entre les pays géopolitiquement alignés représente ainsi 60% du commerce mondial, une hausse de 2 point de pourcent en deux ans.

Ce qui n’est pas optimal pour l’Europe, car elle a toujours tenu au marché libre et a fait affaire avec tout le monde. Elle a donc joué sur les deux bords : en important massivement de Chine, d’un côté, et en s’alignant sur les États-Unis – et en répercutant les taxes et sanctions sur la Chine ou d’autres économies – de l’autre côté. Cet alignement coûte déjà plus cher à l’UE qu’aux USA, car les intérêts économiques ne sont pas les mêmes. Cette position pourrait aussi nuire à l’Europe, dans un contexte de guerre commerciale entre les deux blocs. Elle pourrait même être amenée à choisir son camp.

L’Europe inondée ?

Autre risque qui découle de cette guerre commerciale : l’Europe pourrait se retrouver inondée de marchandises chinoise. Ce que la Chine ne va plus exporter vers les États-Unis, elle pourrait l’exporter vers l’Europe. C’est ce que nous expliquait le stratégiste en chef pour l’Europe auprès de BCA Research, Mathieu Savary, en prévision des élections américaines. Les entreprises européennes pourrait ainsi suffoquer sous ces importations, et la balance commerciale de l’UE pourrait tourner vers un déficit.

L’expert soulignait aussi qu’une guerre commerciale nuirait à la croissance mondiale. Mais l’économie européenne est très vulnérable à la croissance mondiale, notamment à cause du poids des secteurs cycliques.

L’Europe dervrait donc souffrir, à bien des égards, d’une guerre commerciale accrue entre les États-Unis et la Chine.

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