Conner Rousseau démissionne de son poste de président de Vooruit
Conner Rousseau quitte la présidence de Vooruit. “Ma personne ne peut gêner les défis de notre parti”.
Conner Rousseau est au coeur de la tempête depuis plusieurs semaines pour des propos racistes envers la communauté rom prononcés alors qu’il était ivre en septembre dernier dans un café de Saint-Nicolas.
Une démission avec effet immédiat
Rousseau estime lui que le “tapage” autour de sa personne a trop entravé les objectifs du Vooruit. “L’agitation autour de ma personne détourne l’attention de l’essentiel. Il ne s’agit plus de ce pour quoi Vooruit se bat. Il s’agit de la lutte pour de meilleurs salaires et pour la santé des gens. De la lutte contre l’extrême droite, qui est si importante. La lutte se poursuivra sans moi, car les défis sont plus importants que jamais”. Il a également parlé d’une “chasse aux sorcières sur sa situation privée”.
M. Rousseau a également présenté ses excuses avec insistance, déclarant qu’il avait profondément honte. Il a déclaré avoir commis une “grave erreur”. Le président du Vooruit a lancé un appel à ceux qui auraient pu vouloir se détourner du parti à cause de ses déclarations. “Restez. Les bonnes personnes sont aux bons endroits pour continuer le combat”. Il espère que les gens pourront lui pardonner et évoque une “seconde chance, dans ou hors de la politique”. Il n’a pas donné plus de détails à ce sujet.
Le nom du successeur de Rousseau n’a pas encore été révélé. Les socialistes flamands auraient néanmoins déjà convenu de désigner un président intérimaire pour reprendre les rênes du parti, alors que se profilent les prochaines élections. Celui-ci devrait être présenté samedi à la presse. Le nom le plus souvent évoqué vendredi soir était la cheffe de groupe à la Chambre, Melissa Depraetere.
De total inconnu à incontournable
Rousseau est devenu président en 2019 en tant que total inconnu. Agé de 26 ans à peine à l’époque, il était devenu le plus jeune président de parti de l’histoire politique belge. Après avoir fait ses classes dans l’équipe de communication de Freya Van den Bossche et puis comme collaborateur de l’ancien président du parti John Crombez, Conner Rousseau avait fait son entrée sur la scène politique à l’occasion d’une profonde opération de renouveau des socialistes flamands, alors en pleine crise. Jeune, charismatique, très présent sur les réseaux sociaux, débatteur habile, celui qu’on rebaptisera “Kingconnah”, va réformer et rajeunir le parti. Après des années difficiles, il a fait remonter le parti socialiste dans les sondages et le rebaptise Vooruit (“En avant”).
Les socialistes affichent aujourd’hui des taux entre 15 et 20 %. C’est, virtuelement, le troisième parti de Flandre. Conner Rousseau figure même dans le trio des personnalités politiques les plus populaires de Flandre. Et même devant le Premier ministre Alexander De Croo.
Rousseau s’est fait connaître par sa façon de communiquer bien à lui, sa participation à des émissions de divertissement telles que “The Masked Singer” et ses opinions souvent tranchées sur par exemple le fait d’imposer un “job de base” aux chômeurs de longue duré et ou sur la migration avec le plan GRIP (« contrôlé, juste, tourné vers l’intégration et la participation ») .
Il va aussi, lors des négociations pour la constitution de la coalition Vivaldi en 2020, il obtient deux postes ministériels, dont celui de la Santé publique alors que le monde traverse une crise sanitaire historique. Outre le rajeunissement du parti, Rousseau a également ramené d’anciennes figures de proue. Il réussit à faire revenir Caroline Gennez et Frank Vandenbroucke comme ministre.
Ces performances seront toutefois assombries au milieu de cette année par une série de rumeurs sur sa vie privée et des comportements prétendument déplacés envers de jeunes adolescents. Ces plaintes seront classées sans suite, mais son étoile pâlit. Acculé, il reconnaîtra dans une interview sur YouTube être bisexuel.
Deux mois plus tard, début septembre dernier, nouveau dérapage. Alors qu’il est ivre dans un café de sa ville de Saint-Nicolas, il tient des propos racistes envers les Roms qui seront notifiés dans un procès verbal de la police. VTM et le Laatste Nieuws mettront peu de temps après la main sur le document, mais Conner Rousseau en fait interdire la publication par un juge, ce qui suscitera l’indignation dans toute la presse du pays. Affaibli, honteux, il présentera ses excuses pour ses propos, rencontrera la communauté Rom. Mais jeudi, le Nieuwsblad ravive la polémique en publiant plusieurs extraits du procès verbal de Saint-Nicolas. Conner Rousseau y qualifie notamment les Roms de “déchets bruns”.
Les citations littérales du rapport officiel qui a été rédigé ont suscité beaucoup de dégoût dans la politique flamande. Critiqué tant à l’extérieur qu’à l’intérieur de son parti, il finit par jeter l’éponge vendredi soir.